Mouvement social en Guyane : où en est la situation ce vendredi ? [SYNTHESE]

Les principaux axes routiers bloqués par une mobilisation globale.
Des mouvements sociaux et des barrages paralysent la Guyane depuis cinq jours. Les écoles sont fermées, les vols Paris-Cayenne suspendus. La nuit dernière a été agitée à Cayenne en marge des barrages. La réponse de la ministre est jugée "insuffisante et inopérante" par les élus guyanais.
Entrées de villes bloquées, écoles fermées, liaisons aériennes perturbées. La situation reste tendue en Guyane au cinquième jour de mobilisation. Des mouvements sociaux paralysent toujours le département. Des barrages sont érigés dans plusieurs villes.
 

Tensions sur des barrages sauvages

La nuit dernière a été particulièrement agitée dans certains quartiers de Cayenne où des barrages sauvages avaient été érigés jeudi dans la journée. Le préfet de Guyane a demandé aux forces de l'ordre "d'éradiquer le plus rapidement possible tous les barrages sauvages (…) sur lesquels se produisent des rackets, constituent un délit et une menace grave au titre de l'ordre public". "Seuls les barrages dressés et tenus par des collectifs seront maintenus" précise le préfet de Guyane.

Pneus brûlés, vitres brisées, poubelles éventrées : à la tombée de la nuit, jeudi, des violences ont éclaté dans des quartiers de Cayenne, sur ces barrages sauvages. Des jeunes s'en sont notamment pris à un automobiliste qui a été roué de coups. Les forces de l'ordre sont intervenues et les malfaiteurs se sont éparpillés. A Cayenne, le calme est revenu vers 22h30 (heure locale). (Regardez cette vidéo amateur relayée par la page Facebook de Guyane1ère).

Département paralysé

Situation calme en revanche sur les dizaines de barrages érigés par les collectifs et les manifestants aux entrées des villes de Cayenne, Rémire-Montjoly, Matoury, Kourou ou encore Saint-Laurent du Maroni. Des chapiteaux sont installés sur ces barrages faits de palettes et de pneus. Les manifestants y jouent du tambour et occupent les soirées en chansons.

Jeudi, l'ancienne ministre de la Justice, Christiane Taubira s'est rendue sur le barrage de Kourou où elle a été chaleureusement accueillie. "Si les élus considèrent que je peux être d'une aide quelconque, je le ferai très volontiers", a déclaré l'ancienne ministre guyanaise. (Regardez ci-dessous l'interview de Guyane 1ère).

 

Sur ces barrages, des collectifs citoyens, des syndicats et des organisations socioprofessionnelles notamment celle des transporteurs, dénoncent des problèmes de santé, d'éducation, d'économie et de sécurité. (Retrouvez l'ensemble des revendications ici). Ce vendredi, les Amérindiens ont aussi appelé à se mobiliser, notamment contre le "vol" de leur terre et un projet d'extraction aurifère controversé, ainsi que les associations de lutte contre l'orpaillage.
 

Centre spatial bloqué, écoles fermés

A Kourou, un barrage bloque l'accès au Centre Spatial depuis lundi et a conduit Arianespace à ajourner le lancement de la fusée Ariane 5. "Il n'y aura pas de lancement tant que la situation sociale ne sera pas réglée", a indiqué jeudi Didier Faivre, directeur du Centre spatial guyanais. Le rectorat a lui annoncé, jeudi 23 mars, la fermeture des établissements scolaires jusqu'à nouvel ordre. La Collectivité Territoriale de Guyane, la Préfecture, et le Grand Port Maritime sont également bloqués. Un conteneur rempli de denrées alimentaires a notamment été dérouté vers le Surinam selon Guyane 1ère , ce vendredi. Certaines stations-services commencent à connaître des pénuries d'essence sans plomb, et des appels à fermer les magasins ont été lancés jeudi.

Vols Paris-Cayenne suspendus

La desserte aérienne est, elle aussi, perturbée. Le vol Air France Paris-Cayenne de ce vendredi 24 mars est annulé. Hier déjà, le vol 852 d'Air France assurant la liaison Paris-Cayenne avait dû faire demi-tour au-dessus de l'Atlantique. Un autre vol d'Air Caraïbes a été dérouté vers Pointe-à-Pitre. En raison des blocages, le nombre de personnel de lutte anti-incendie est insuffisant sur l'aéroport de Cayenne qui ne peut plus assurer la sécurité des gros porteurs. La Direction générale de l'Aviation civile (DGAC) recommande donc aux gros porteurs de ne plus atterrir ni décoller de Cayenne jusqu'à nouvel ordre. Les vols régionaux entre Cayenne et les Antilles sont également suspendus, selon Guyane 1ère. Les compagnies annoncent que les passagers qui ont des billets pour la Guyane entre les 24 et 28 mars peuvent reporter leur voyage.
 

Réponse "insuffisante et inopérante" de la ministre

Actuellement en visite à La Réunion, la ministre des Outre-mer, Ericka Bareigts a réagi dans un communiqué, jeudi, en demandant la levée des blocages. Elle a annoncé des réunions de travail à Paris à partir de mardi prochain sur les thèmes de la santé, l'économie et la sécurité.

Invitée de France Ô jeudi soir, la ministre a maintenu ses propositions alors que les élus guyanais estiment qu'il s'agit d'une réponse "insuffisante et inopérante". Dans un communiqué, quatre parlementaires guyanais (Chantal Berthelot, Georges Patient, Gabriel Serville et Antoine Karam) estiment qu'il est "inconcevable de demander aux manifestants de suspendre leur mouvement et de lever les blocages pour venir s'entretenir avec les cabinets ministériels dans les bureaux parisiens". "La solution à cette crise majeure ne pourra être trouvée que sur le sol guyanais", précise les quatre parlementaires.