Gaston Flosse rend sa Légion d'honneur : un geste à la portée uniquement symbolique

Gaston Flosse
Dans un courrier au vitriol adressé à François Hollande, l'ex-président déchu de Polynésie annonce qu'il rend sa Légion d'honneur, parce qu'il s'estime "bafoué dans (son) honneur". Mais, l'ordre de la Légion d'honneur explique que, de fait, Gaston Flosse en est toujours membre. Explications. 
Dans un long courrier au vitriol adressé à François Hollande (consultable ici sur le site du Tahoeraa Huiraatira), Gaston Flosse annonce qu'il rend sa Légion d'honneur. Le motif : le chef de l'Etat a refusé la grâce présidentielle partielle que l'élu polynésien sollicitait après sa condamnation - confirmée en juillet 2014 par la cour de cassation - à quatre ans d'emprisonnement avec sursis, 125.000 euros d'amende et trois ans d'inéligibilité pour prise illégale d'intérêts et détournement de fonds publics. Voici un extrait de la lettre de Gaston Flosse à François Hollande :

" j'attendais de vous davantage de hauteur, plus de grandeur. J'attendais de cette République que j'ai servie si longtemps et que je chéris envers et contre tout, un peu de reconnaissance, mais elle s'est montrée ingrate, elle qui a pourtant su me trouver (...) lorsqu'il fallait plaider la nécessité et l'innocuité de vos essais nucléaires (...)

 Parce que j'ai une autre idée de la France, et parce que je m'estime bafoué dans mon honneur, je vous rends ma légion d'honneur. (...)















 

Réaction de la grande chancellerie de la Légion d'honneur

Mais à la Grande chancellerie de la Légion d'honneur, on relativise l'annonce faite par Gaston Flosse. "Rendre sa Légion d'honneur n'a aucune portée juridique", explique un des responsables de la Grande chancellerie à la1ere.fr. "Lorsque vous êtes membre de la Légion d'honneur, vous l'êtes à vie, à moins d'être exclu". Dans les faits, Gaston Flosse ne peut donc rendre sa Légion d'honneur, qui lui a été remise en juillet 1975. Il peut simplement décider de ne plus la porter. 



Peut-il être exclu de l'ordre de la Légion d'honneur ?

A l'inverse, on peut s'interroger sur une éventuelle décision de la Grande chancellerie de retirer la Légion d'honneur à Gaston Flosse, après sa condamnation judiciaire.
La Légion d'honneur répond à des règles précises. Concernant les condamnations judiciaires, le règlement de la Grande chancellerie précise qu'il existe trois sanctions, d’importance croissante :

  • Le blâme
  • La suspension, dont la durée varie selon la gravité de la faute
  • L’exclusion définitive. Elle est automatique en cas de condamnation par les tribunaux pour crime ou peine supérieure à un an de prison ferme.
Les deux dernières sanctions sont prononcées par le président de la République et publiées au Journal officiel.

En théorie, donc, Gaston Flosse, après sa condamnation définitive confirmée par la cour de cassation en juillet dernier, pourrait se voir infliger une sanction. Mais dans la pratique, les retraits de Légion d'honneur sont rares et ne concernent jamais les élus politiques :

  • En 1998, après sa condamnation pour "complicité de crime contre l'humanité", Maurice Papon avait automatiquement perdu sa Légion d'honneur. En 2007, à sa mort, il a choisi d'être enterré avec le symbolique ruban rouge. 
  • En 2011, le couturier britannique John Galliano s'est vu retirer sa Légion d'honneur après avoir été condamné pour des injures antisémites. 
  • Décoré en 2005, le cycliste américain Lance Armstrong, convaincu depuis de dopage, s'est vu retirer sa Légion d'honneur pour "comportement contraire à l'honneur" en avril 2014.
A la Grande chancellerie, on confirme que les personnalités politiques condamnées conservent, dans les faits, leur insigne. Un peu gêné, un membre de la Grande chancellerie explique que pour les procédures disciplinaires, "l'usage est d'attendre que toutes les procédures judiciaires soient terminées. L'idée est d'avoir une vue d'ensemble sur les dossiers". En clair, tant que tous les dossiers judiciaires dans lesquelles Gaston Flosse est concerné ne sont pas purgés, la Grande chancellerie décide...de ne rien décider.