Affaire Roukia : l'ex-patron du Groupe d'intervention régional de Mayotte interpellé en Bretagne

Un kwassa kwassa aux environs de Mayotte (images d'archives)
Gérard Gauthier, l'ancien patron du GIR de Mayotte a été interpellé hier matin à Rennes. Il est soupçonné d'avoir dirigé un réseau de trafic de drogue, qui a causé la mort de Roukia, une lycéenne de 18 ans, en janvier 2011.
Gérard Gauthier, l’ex-chef du Groupement d'intervention régional (GIR) de Mayotte, le fer de lance de la lutte contre le trafic de drogue et de clandestins sur l’île, a été interpellé chez lui hier matin à Rennes et placé en garde à vue au siège de la direction départementale de la sécurité publique (DDSP). Cette information a été dévoilée par la chaîne I>Télé. Cette interpellation s’est déroulée sur commission rogatoire d’un juge d’instruction de Mayotte, Hakim Karki, dans le cadre de l’affaire Roukia. Cette lycéenne de 18 ans est morte par overdose en janvier 2011.

 

Retour à Mayotte

L'un des ex-collaborateurs de l’ancien capitaine de gendarmerie a également été interpellé et placé en garde à vue. De son côté, Gérard Gauthier a choisi de se faire défendre par un ténor du barreau de Paris, Me Francis Szpiner, bien connu en Outre-mer pour avoir défendu Gaston Flosse en Polynésie française. Selon les informations d'I>Télé, l’ex-chef du GIR, aujourd’hui à la retraite pourrait être conduit, tout comme son collaborateur, au tribunal de grande instance de Mamoudzou afin d’être mis en examen pour « trafic de drogue » par le juge Hakim Harki. 
 

Overdose d'héroïne

Tout est parti de la mort d'une lycéenne de 18 ans, Roukia, dont le corps avait été retrouvé le 15 janvier 2011 dernier, à moitié enfoui à Trévani, au nord de Mamoudzou. Un meurtre avait été envisagé avant que l'autopsie ne révèle un décès par overdose d'héroïne, fait rarissime sur cette île de l'océan Indien et 101e département français, où les drogues dures sont quasi-inexistantes. La mort de cette jeune femme avait causé une vive émotion dans l'île, où avait eu lieu une marche début février pour demander "justice". 
 

Trafic de stupéfiants à Mayotte

La drogue fatale à Roukia, la lycéenne de 18 ans, aurait été fournie par un informateur du GIR, qui l'aurait lui-même récupérée des mains d'un policier. Bref, il s'agirait d'une affaire d'indicateur qui aurait mal tourné. Hakim Karki, le juge d'instruction de Mayotte, chargé d'enquêter sur ce décès, soupçonne l'ex-patron du GIR, Gérard Gauthier d'avoir organisé le trafic de stupéfiants dont pourrait être issue la drogue ayant provoqué la mort de la jeune fille.

Système ahurissant

Le journal Le Point, dans une enquête publiée le 17 juillet 2013  précise que, selon plusieurs témoignages, l'ancien capitaine aurait régulièrement encouragé ses hommes à importer de la drogue dure à Mayotte, via ses "indics". Ces transports se seraient faits à bord de kwassas, ces barques qui emmènent les clandestins jusqu'à Mayotte. Ce système ahurissant aurait été probablement mis en place pour gonfler les chiffres de saisies de drogue et arrestations de dealers. Le GIR de Mayotte était l'un des plus efficaces de France, poursuit Le Point. La marchandise acheminée par les barques était livrée sur deux plages par des clandestins, devenus" indics" du GIR contre l'obtention de cartes de séjour ou de quelques billets. Quand les barques arrivaient sur les plages, les fournisseurs étaient arrêtés, mais pas les passeurs.

Dysfonctionnement à Nanterre

Toujours selon Le Point, en juin dernier, l’ex-capitaine avait déjà été placé en garde à vue, dans les locaux de la PJ à Nanterre, mais la garde à vue n'a pas été prolongéeen raison d'un oubli ! Résultat : les deux fonctionnaires avaient été libérés sur le champ. Depuis, hasard ou réalité, les deux gendarmes étaient officiellement en dépression, ce qui leur a évité de répondre, début juillet, à la convocation à Mayotte du juge d'instruction. Mais cette fois, il semble bien que Gérard Gauthier et son collaborateur ne pourront pas échapper à la  justice, et qu'enfin l'affaire Roukia pourra être jugée. 

Ecoutez ci-dessous le reportage de Toufaili Andjilani qui a pu rencontrer ce matin à Paris l'avocat de la famille de Roukia, Mansour Kamardine.

Mansour Kamardine, au micro de Toufaili Andjilani pour Radio Outre-mer 1ère