Face à l’explosion du nombre de mules arrêtées en Guyane, deux parlementaires guyanais réclament l’installation d’un scanner corporel à l’aéroport Félix Eboué. Mais cet appareil ne permet pas de détecter la drogue ingérée.
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Depuis trois ans, le nombre de passeurs de drogue – les « mules » en jargon douanier - arrêtés à l’aéroport Félix Eboué ou sur le chemin de l’aéroport guyanais a explosé : 111 en 2013, 135 en 2014, 171 depuis le 1erjanvier, selon les douanes. Les saisies de cocaïne augmentent elles aussi : 143,7 kg en 2014, 273,6 kg depuis le 1er janvier, soit d’ores et déjà un quasi-doublement des quantités saisies par rapport à l‘année dernière. Les deux tiers des « mules » sont françaises et près de la moitié (44 %) viennent de Saint Laurent du Maroni. Ces derniers mois, deux parlementaires guyanais ont interpellé le gouvernement sur ce phénomène. « Il y a de plus en plus de jeunes guyanais qui se lancent dans cette action, c’est très dangereux », s’inquiète Gabriel Serville, député du Parti Socialiste Guyanais (PSG). Dans une question écrite à la ministre de la justice en juin, puis un courrier au ministre de l’intérieur, le député maire de Matoury a réclamé l’installation d’un scanner à l’aéroport où passeraient les passagers afin de « mieux lutter contre les trafics ». Même inquiétude et même revendication chez le sénateur Antoine Karam (PSG) : « Il y a un scanner à Georgetown, à Miami ou dans des aéroports de la Caraïbe, si on peut mettre en place cet appareil, cela changerait les choses », souligne le parlementaire.
Mais contrairement à ce qu’indiquent les élus, le type de scanner installé dans plusieurs aéroports à travers le monde pour contrôler les passagers ne permettra pas d’identifier la plupart des mules qui passent de la drogue à partir de la Guyane. En effet, contrairement à son homologue médical, ce scanner corporel ne permet pas de voir sous la peau, par exemple de la drogue ingérée dans l’estomac. Il donne seulement une vision du corps des voyageurs, sous leurs vêtements. Or, selon les douanes, sur les 171 mules arrêtées depuis le 1er janvier, 102 portaient de la drogue « in corpore », c'est-à-dire ingérées dans leurs estomacs ou insérées dans l’anus. La plupart des autres mules arrêtées cachaient la drogue dans leurs bagages de soute, soumises à d’autres contrôles. Malgré tout, pour les douanes, cet appareil serait un progrès : « Ce scanner corporel pourrait être complémentaire de nos autres modes d’action », explique Thierry Gose, chef divisionnaire des douanes en Guyane. « Il peut nous permettre de détecter la drogue transportée sur la peau, dans les sous-vêtements », ajoute t-il.
Expérimenté en 2008 à l’aéroport de Nice puis en 2010 à Roissy Charles de Gaulle, sur la base du volontariat des passagers, l’usage de ce type d’appareil a finalement été abandonné au titre de la protection de l’intimité et de la vie privée, suite à des réactions hostiles d’associations telle la ligue des droits de l’homme. «Nous ne sommes pas dans l’hémisphère nord, il faut renforcer la prévention et adapter les lois pour vaincre ce fléau», rétorque le sénateur Antoine Karam. Au final, le seul moyen de détecter la drogue ingérée par les mules est de les amener à l’hôpital de Cayenne pour leur faire passer une radio. L’installation à l’aéroport Félix Eboué d’un appareil de radio mobile a été envisagée en début d’année, mais le projet a été abandonné en raison du coût trop élevé du dispositif, avec notamment la nécessité d’avoir un médecin et une équipe spécialisée sur place.
Le reportage de Laurent Marot et Elise Ramirez
Pas de détection de la drogue ingérée
Mais contrairement à ce qu’indiquent les élus, le type de scanner installé dans plusieurs aéroports à travers le monde pour contrôler les passagers ne permettra pas d’identifier la plupart des mules qui passent de la drogue à partir de la Guyane. En effet, contrairement à son homologue médical, ce scanner corporel ne permet pas de voir sous la peau, par exemple de la drogue ingérée dans l’estomac. Il donne seulement une vision du corps des voyageurs, sous leurs vêtements. Or, selon les douanes, sur les 171 mules arrêtées depuis le 1er janvier, 102 portaient de la drogue « in corpore », c'est-à-dire ingérées dans leurs estomacs ou insérées dans l’anus. La plupart des autres mules arrêtées cachaient la drogue dans leurs bagages de soute, soumises à d’autres contrôles. Malgré tout, pour les douanes, cet appareil serait un progrès : « Ce scanner corporel pourrait être complémentaire de nos autres modes d’action », explique Thierry Gose, chef divisionnaire des douanes en Guyane. « Il peut nous permettre de détecter la drogue transportée sur la peau, dans les sous-vêtements », ajoute t-il.
Adapter les lois
Expérimenté en 2008 à l’aéroport de Nice puis en 2010 à Roissy Charles de Gaulle, sur la base du volontariat des passagers, l’usage de ce type d’appareil a finalement été abandonné au titre de la protection de l’intimité et de la vie privée, suite à des réactions hostiles d’associations telle la ligue des droits de l’homme. «Nous ne sommes pas dans l’hémisphère nord, il faut renforcer la prévention et adapter les lois pour vaincre ce fléau», rétorque le sénateur Antoine Karam. Au final, le seul moyen de détecter la drogue ingérée par les mules est de les amener à l’hôpital de Cayenne pour leur faire passer une radio. L’installation à l’aéroport Félix Eboué d’un appareil de radio mobile a été envisagée en début d’année, mais le projet a été abandonné en raison du coût trop élevé du dispositif, avec notamment la nécessité d’avoir un médecin et une équipe spécialisée sur place.Le reportage de Laurent Marot et Elise Ramirez