En Guyane, une enquête est menée sur neuf militaires, après une plainte pour extorsion déposée par des orpailleurs clandestins

Une zone exploitée par les orpailleurs clandestins, le long du fleuve Maroni.
Les autorités confirment, à Guyane La 1ère, l’information publiée vendredi 10 janvier, par France-Guyane. Le 9 octobre dernier, une plainte a été déposée pour "extorsion" par des orpailleurs illégaux à la gendarmerie de Saint-Laurent du Maroni. Une enquête est menée sur neuf militaires.

C’est un peu la blague de "l’arroseur arrosé", mais elle ne fait pas du tout rire en haut lieu. 

Le 9 octobre dernier, des orpailleurs illégaux, donc des personnes qui littéralement "volent" l’or de la Guyane en polluant l’environnement, sont venus déposer plainte à la Brigade Territoriale de la gendarmerie de Saint-Laurent du Maroni. Ils expliquent alors avoir été volé de leur or, et d’une partie de leur matériel.

Un vol sur un chantier clandestin

Mais l’affaire prend une autre tournure. Les suspects désignés par les plaignants ne sont autres que neuf militaires de l’armée française. Ils sont donc soupçonnés d’avoir agi hors procédure, pour leur propre compte.

Selon les illégaux, "l’extorsion" présumée aurait eu lieu quelques jours avant, sur leur chantier clandestin, dans le secteur du massif Lucifer, une zone forestière classée en ZNIEF (Zone Naturelle d’Intérêt Ecologique, Faunistique et Floristique), à Saint-Laurent du Maroni.

Les militaires en garde à vue le 5 novembre

L'information a été révélée par France-Guyane vendredi 10 janvier.

Joint peu après, le général Jean-Christophe Sintive, commandant de la gendarmerie en Guyane, nous a confirmé l’information, la date du dépôt de plainte et précisé le secteur où travaillaient ces illégaux présumés victimes. 

"La Section de Recherches (SR) de la gendarmerie a été saisie", précise le Général Sintive. Le 5 novembre, les neuf militaires ont été placés en garde à vue dans les locaux de la SR, route de La Madeleine, à Cayenne.

Quelle quantité d'or ? 

Le patron des gendarmes de Guyane n’a pas souhaité donner de précisions sur une enquête en cours. Même son de cloche au parquet général de la cour d'appel de Cayenne, avec tout de même une précision. France-Guyane a évoqué la quantité minimale de trois kilos d'or présumément extorquée par les militaires aux clandestins. "C'est beaucoup moins", indique le parquet général, "cela se chiffre en quelques dizaines de grammes". A environ 78 euros le gramme d'or début octobre, cela peut tout de même représenter plusieurs milliers d’euros.

Pas d'information sur le régiment

Du côté des Forces Armées de Guyane (FAG), pas d’information sur la compagnie et le régiment concernés par cette affaire. "L’unité en question ne sera pas dévoilée dans un soucis de sécurité des opérations", nous a indiqué par mail la communication du Commandement Supérieur (Comsup) des FAG.

Il pourrait s’agir du 9ème RIMA (Régiment d’Infanterie de Marine) qui opère dans l’ouest de la Guyane, dont le Maroni, mais il n’y a donc pas de confirmation officielle. Plus précisément, les militaires suspectés pourraient être issus d’une compagnie “tournante”, venue d’un autre régiment basé dans l’hexagone, intégrée quelques mois au 9ème Rima. Pas de réponse non plus à ce stade du Comsup sur ce point.

 Une enquête en cours

"Aucune interview ne pourra être accordée afin de préserver le bon déroulement de l’enquête. Soyez assuré que nous mobilisons tous les moyens nécessaires pour faire toute la lumière sur cette affaire", ajoute la communication du Comsup. "Cette procédure, impliquant quelques individus, ne doit en aucun cas ternir l’image de l’engagement des militaires des FAG dans la lutte contre l’orpaillage illégal. Chaque jour, plus de 300 soldats sont déployés en forêt pour combattre ce fléau", conclue la communication de l’Armée en Guyane.

Une opération de lutte dans la région du Massif Lucifer

Dernièrement, une opération renforcée de lutte contre l’orpaillage illégal avait été menée dans cette région du Massif Lucifer, du 28 novembre au 16 décembre 2024, soit après la plainte déposée par les orpailleurs clandestins.

Dans un communiqué de presse du 9 janvier, le préfet de Guyane présentait des "résultats exceptionnels, avec plus de 2 M€ d’avoirs criminels saisis et détruits". Dans le détail : "saisie de 281 grammes d’or et de 437 grammes de mercure ; démantèlement de 10 chantiers alluvionnaires, d’un chantier primaire actif et de 226 carbets avec 11 tables de levée". Toujours selon les autorités, cette action avait permis de "mettre fin à l’activité illicite dans la zone et d’empêcher les garimpeiros d’en reprendre le contrôle".