Un 14 juillet à Cayenne sans tambour ni trompette sous crise Covid en Guyane

La colonne de la République place des palmistes à Cayenne
14 Juillet, jour de la fête nationale. Un 14 Juillet très particulier cette année en Guyane en raison de la crise Covid que vit le territoire. Pas de défilés, pas de militaires invités et une cérémonie qui s’est déroulée sur la place des Palmistes à Cayenne en moins de 10 minutes.
 
Le silence a remplacé le défilé militaire.
Place des palmistes à Cayenne, ce mardi matin est un 14 juillet de crise sanitaire. Aucun défilé, pas de militaires ni de familles invités.
La préfecture ne souhaitait pas plus de 10 personnes pour respecter les consignes de sécurité et les gestes barrières.
 
Le président de la CTG, Rodolphe Alexandre, le préfet de Guyane, Marc Del Grande et la maire de Cayenne, Marie-Laure Phinéra-Horth
Seuls, la maire de Cayenne et le Président de la Collectivité territoriale entourent le préfet pour cette cérémonie qui marque la fête nationale.
Le préfet, Marc Del Grande a choisi de lire un texte de Victor Hugo évoquant la révolution.

 
14 juillet en Guyane

Normalement, pour le 14 juillet on ne lit pas de texte mais je souhaitais que nous ne fassions pas un simple dépôt de gerbe. Quand nous avons cherché à plusieurs un texte qui incarnait bien le 14 juillet et dans lequel on pouvait puiser des leçons pour aujourd’hui, on a vraiment trouvé que ce texte de Victor Hugo était beau et invitait à la résilience de la Guyane.

Marc Del Grande préfet de Guyane
 


De loin, une ancienne victime de guerre : Roger Legrand, 77 ans. Un homme originaire de la Moselle, qui durant la seconde guerre mondiale a vu sa famille placée en camp. Roger Legrand ne manque jamais un défilé du 14 juillet nous dit-il.
20 ans qu’il vient sur la place des Palmistes assister aux festivités et il avoue être ce mardi de 14 juillet 2020, un peu perdu devant cette grande place vide.
 
Roger Legrand, victime de guerre

Jamais ! Jamais je n’ai vu un 14 juillet pareil ! C’est dommage parce que  c’est une date, c'est historique. Le 14 juillet, ça compte, on était libre ! J’espère que ça va continuer parce que ça devient catastrophique dans le monde. [...] L’être humain n’est pas aussi bête, j’espère …

Roger Legrand


2 gerbes de fleurs ont été disposées au pied de la colonne de la République. La cérémonie a duré 8 minutes.


 
LE 14 JUILLET PAR VICTOR HUGO ( Troisième discours au Sénat pour l’amnistie. Séance du 3 juillet 1880)
J'appellerai seulement votre attention sur un fait. Messieurs, le 14 juillet est une fête ; votre vote aujourd'hui touche à cette fête. Quelle est cette fête ? Cette fête est une fête populaire. Voyez la joie qui rayonne sur tous les visages, écoutez la rumeur qui sort de toutes les bouches. C'est plus qu'une fête populaire, c'est une fête nationale. Regardez ces bannières, entendez ces acclamations. C'est plus qu'une fête nationale, c'est une fête universelle. Constatez sur tous les fronts, anglais, espagnols, italiens, le même enthousiasme ; il n'y a plus d'étrangers.

Messieurs, le 14 juillet, c'est la fête humaine. Cette gloire est donnée à la France, que la grande fête française, c'est la fête de toutes les nations. Fête unique. Ce jour-là, le 14 juillet, au-dessus de l'assemblée nationale, au-dessus de Paris victorieux, s'est dressée, dans un resplendissement suprême, une figure, plus grande que toi, Peuple, plus grande que toi, – l'Humanité !

Oui, la chute de cette Bastille, c'était la chute de toutes les Bastilles. L'écroulement de
cette citadelle, c'était l'écroulement de toutes le tyrannies, de tous les despotismes, de
toutes les oppressions. C'était la délivrance, la mise en lumière, toute la terre tirée de toute la nuit. C'était l'éclosion de l'homme. La destruction de cet édifice du mal, c'était la construction de l'édifice du bien. Ce jour-là, après son long supplice, après tant de siècles de torture, l'immense et vénérable Humanité s'est levée, avec ses chaînes sous ses pieds et sa couronne sur sa tête.

Eh bien, messieurs, ce jour-là, on vous demande de le célébrer de deux façons, toutes deux augustes. Vous n'y manquerez certainement pas. Vous donnerez à l'armée le drapeau, qui exprime à la fois la guerre glorieuse et la paix puissante, et vous donnerez à la nation l'amnistie, qui signifie concorde, oubli, conciliation, et qui, là-haut, dans la lumière, place au-dessus de la guerre civile la paix civile.

Le 14 juillet a marqué la fin de tous les esclavages. Ce grand effort humain a été un effort divin. Quand on comprendra, pour employer les mots dans leur sens absolu, que toute action humaine est une action divine, alors tout sera dit, le monde n'aura plus qu'à marcher dans le progrès tranquille vers l'avenir superbe.

Messieurs, ce sera un double don de paix que vous ferez à ce grand pays : le drapeau, qui exprime la fraternité du peuple et de l'armée ; l'amnistie, qui exprime la fraternité de la France et de l'humanité.

Rendons grâce à la République.

VICTOR HUGO