En Guyane, les femmes sont plus diplômées que les hommes, mais restent sous-représentées dans les postes de pouvoir, le sport et certaines professions clés. À l’occasion de la Journée internationale des droits des femmes, trois figures féminines témoignent des défis et des avancées dans leur domaine.
Les femmes en politique : un accès limité aux postes clés
Si la parité est obligatoire dans les conseils municipaux, les femmes restent minoritaires aux postes de décision. En Guyane, seulement 22,7 % des maires sont des femmes, et leur accès aux fonctions exécutives reste compliqué.
Arlène Bourguignon : "Les femmes doivent souvent choisir entre engagement politique et vie familiale"
Première adjointe au maire de Mana, Arlène Bourguignon n’a pas rencontré d’obstacles majeurs pour accéder à son poste, mais elle reconnaît que la charge familiale freine l’engagement des femmes en politique.
"Les femmes restent les piliers de la famille. S’engager en politique demande du temps et des sacrifices sur la vie personnelle. Beaucoup hésitent à franchir le pas, surtout les jeunes femmes."
Elle souligne également que la présence des femmes apporte un regard différent sur la gestion des affaires publiques.
"Quand on parle d’éducation, une femme va voir au-delà des repas scolaires. Elle pense aussi aux réalités des familles, aux besoins des enfants en dehors de l’école."
Enfin, elle rappelle que le sexisme reste une réalité dans les sphères de pouvoir :
"Quand un homme s’énerve en politique, on parle d’autorité. Quand une femme élève la voix, on la qualifie d’hystérique. Il faut toujours être irréprochable."
Le sport en Guyane : un manque de visibilité pour les femmes
Avec seulement 32,8 % de licenciées sportives, les femmes restent minoritaires dans de nombreuses disciplines, notamment le football et le cyclisme. Si certaines catégories comme le handball ou la natation sont plus équilibrées, la médiatisation du sport féminin est encore largement inférieure à celle du sport masculin.
Katia Benth : "Les performances des femmes restent trop souvent dans l’ombre"
Ancienne athlète de haut niveau, Katia Benth n’a pas ressenti de discrimination dans l’athlétisme, un sport mixte, mais elle constate un traitement inégal des performances féminines.
"Dans certaines disciplines, les résultats des femmes sont moins mis en avant que ceux des hommes. Une championne de France en boxe sera à peine mentionnée, alors qu’un footballeur sera médiatisé toute une semaine."
Elle note tout de même une évolution positive :
"Les mentalités changent. De plus en plus de jeunes filles osent s’inscrire dans des sports traditionnellement masculins comme le rugby ou la boxe."
Son message aux futures sportives est clair :
"Il ne faut pas se limiter à cause des stéréotypes. Peu importe la discipline, il faut oser et se lancer."
Médecine et entrepreneuriat : un accès encore inégal
En France, plus de 50 % des médecins sont des femmes, mais en Guyane, la profession reste majoritairement masculine. Les longues études et la nécessité de partir en métropole pour se former constituent des freins majeurs pour les jeunes Guyanaises.
Dr Moubitang : "Le manque de modèles féminins freine l’ambition des jeunes filles"
Médecin et responsable d’une maison de santé à Saint-Laurent-du-Maroni, le Dr Moubitang observe que les jeunes Guyanaises hésitent davantage à se lancer dans des carrières médicales.
"La médecine demande de longues études et des sacrifices. Beaucoup de femmes ne se projettent pas dans ce métier, car elles voient peu de modèles féminins autour d’elles."
Elle souligne aussi que les responsabilités familiales jouent un rôle dans cet écart :
"Les femmes doivent souvent gérer leur foyer, ce qui rend plus difficile le départ en métropole pour se former. Les hommes ont plus de flexibilité pour voyager et poursuivre leurs études."
Selon elle, il est crucial de mieux accompagner les jeunes filles dans leur orientation pour changer cette dynamique.
"Il faut les encourager dès le plus jeune âge, leur montrer que ces carrières leur sont accessibles et qu’elles peuvent réussir."
Un combat encore à mener
Si les femmes en Guyane ont gagné du terrain dans plusieurs domaines, les inégalités persistent. Que ce soit en politique, dans le sport ou dans les professions médicales, elles doivent encore surmonter des freins culturels, sociaux et économiques pour atteindre l’égalité.
À travers ces témoignages, une réalité s’impose : les femmes ont un rôle clé à jouer, mais leur accès aux responsabilités et à la reconnaissance est encore semé d’embûches. Le changement passe par une meilleure représentation, une médiatisation plus juste et un accompagnement renforcé pour encourager la prochaine génération de femmes guyanaises à briser ces barrières.