Le réalisateur Alain Maline s’est éteint vendredi soir en métropole des suites d’une longue maladie. Connu pour ses collaborations avec les grands noms du cinéma français, c’est en Guyane qu’il a laissé une empreinte marquante. Entre passion et controverses, son parcours sur ce territoire fut jalonné de projets ambitieux et d’oppositions marquées.
Un coup de foudre cinématographique pour la Guyane
Alain Maline découvre la Guyane en septembre 1985 lors d’un voyage officiel avec François Mitterrand. Fasciné par ce territoire, il décide d’y tourner Cayenne Palace en 1987. Le film, qui suit l’histoire d’un homme en quête de son père, un ancien bagnard, suscite immédiatement des réactions mitigées. Certains critiques dénoncent une vision biaisée de la Guyane.
"Un journal avait écrit que Cayenne Palace était un crachat au visage du peuple guyanais", se souvient un proche du réalisateur. En plus de la controverse, Maline doit faire face à des difficultés de production : coûts d’assurance élevés, manque de soutiens locaux et tensions culturelles.
Malgré cette réception houleuse, il persévère et réalise en 1990 Jean Galmot, Aventurier, un film à la portée historique qui rencontre un meilleur accueil.
Le rêve contrarié d’un pôle cinématographique en Guyane
Convaincu que la Guyane possède un potentiel cinématographique, Alain Maline ambitionne d’y créer un pôle dédié au septième art. Il tente d’implanter des studios à Montsinéry-Tonnegrande, mais son projet rencontre une forte opposition. "Des agriculteurs ont défilé dans les rues de Cayenne pour protester", confiera-t-il plus tard. Perçu par certains comme un intrus, il devient une figure controversée.
En 2001, il parvient malgré tout à établir des studios à Cayenne. Cependant, faute de financements et de productions, le projet ne trouve pas le succès escompté.
Un regard affiné et un héritage durable
Avec le temps, Alain Maline ajuste son approche de la Guyane. Il s’oriente vers des récits plus profonds et ancrés dans l’histoire. En 2011, il co-réalise un documentaire sur Gaston Monnerville. En 2013, Des Pépites dans le ciel des Guyanes met en lumière des figures guyanaises du spatial et du sport, dont la championne olympique Lucie Décosse.
En 2015, il tente un retour à la fiction avec Le Caïmandor, un projet qui restera inachevé.
Un legs indélébile dans le cinéma guyanais
"C’était le premier à voir la Guyane comme une terre de cinéma", souligne le réalisateur guyanais Marc Barrat, qui a fait ses débuts à ses côtés. "Il a formé de nombreux jeunes et leur a donné des ambitions."
Si Cayenne Palace a laissé des traces, Alain Maline a su évoluer et proposer un regard plus nuancé sur le territoire. "Avec Jean Galmot, Aventurier, il a posé un regard plus profond, plus enraciné dans l’histoire", rappelle Marc Barrat.
L’annonce de sa disparition a touché profondément ceux qui l’ont côtoyé. Marc Barrat, qui a travaillé à ses côtés sur plusieurs productions, témoigne :
Quand sa femme me l’a annoncé, j’étais en train de conduire. Je ne l’ai pas réalisé tout de suite... Mais après, quand j’y ai repensé, ça m’a fait du mal. C’était mon premier film. Un pan de ma vie professionnelle qui part avec lui.
Malgré les controverses qui ont entouré son parcours, Alain Maline était profondément attaché à la Guyane.
C’était un personnage, un provocateur, une grande gueule. Mais il était réellement tombé amoureux de la Guyane. Il n’aurait pas autant galéré sinon. Il aimait son petit carbet, son punch, son carnaval. Ce n’était pas juste le cinéaste, c’était l’homme lui-même qui était piqué par le pays
Alors que la Guyane continue d’attirer des productions cinématographiques, le parcours d’Alain Maline demeure une illustration des défis et des opportunités qu’offre le septième art sur ce territoire unique.