"Marges exorbitantes, opacité financière, entorses à la concurrence… Alors que le géant GBH est pointé du doigt dans la crise sociale contre la vie chère aux Antilles, Libération a pu consulter des dizaines de documents internes qui mettent en lumière l’ampleur de ses bénéfices réels."
Selon le journaliste qui a réalisé cette enquête Emmanuel Fasten, ces dizaines de documents internes émanent d’un cadre supérieur de la multinationale martiniquaise. Un des 170 managers ayant accès à ces documents ultra-confidentiels et qui travaillerait "depuis près de 20 ans dans la branche automobile du Groupe".
Des marges quatre fois plus importantes ?
Dans ce secteur, les concessions de GBH réaliseraient une marge nette comprise entre 18 % et 28 %, soit trois à quatre fois celles pratiquées dans l’Hexagone sur les mêmes voitures vendues.
Comme le rapporte Guadeloupe la 1ère, le groupe se défend et met en avant des frais d’approche, ces coûts induits de transports et d’importations et d’octroi de mer. Mais en réalité, il n'en serait rien, selon Emmanuel Fansten. Ces coûts d’approche ne représenteraient que 15 à 20 % du prix de vente final, soit l’équivalent de la TVA dans l’Hexagone.
Il y aurait des frais appliqués qui profiteraient en réalité à nombre d’entreprises intermédiaires qui appartiennent à la constellation de sociétés de GBH. Cette structuration permettrait d’accumuler des marges, de ventiler les bénéfices et d’alléger les comptes d’exploitation des entreprises les plus rentables.
La pratique des "marges arrière"
Autre sujet abordé dans l’article et rapporté par Martinique la 1ère : la pratique des "marges arrière". Des marges qui "reposent sur le fait d’exiger de ses fournisseurs des remises de prix en fin d’année pour objectifs atteints", souligne le journal.
Citant GBH, Libération avance que ces marges arrière "représenteraient seulement 5 à 7 % du chiffre d’affaires du Groupe". Des pourcentages contestés par Christophe Girardier, auteur de plusieurs rapports sur la distribution dans les Outre-mer, qui "estime" que "les marges arrière de GBH peuvent atteindre jusqu’à 25 % de son chiffre d’affaires annuel".
Cette enquête est publiée quelques jours avant que GBH ne soit convoqué au tribunal. Plusieurs lanceurs d'alerte ont effet engagé une action en justice contre le groupe pour l'obliger à publier ses comptes annuels. L'audience a été renvoyée au 23 janvier 2025.
La réaction du préfet
Invité de la matinale radio de Martinique la 1ère, le préfet de Martinique Jean-Christophe Bouvier a réagi ce vendredi à cette enquête.
"Nous savions que ce marché posait question, nous l'avions souligné, a-t-il reconnu. Je vais naturellement, sur les bases des informations diffusées par le journal Libération, interroger les services de contrôle de l'État pour savoir s'il y a une infraction à la législation sur les prix qui mérite qu'il y ait des investigations poussées de la part de ces services."