Selon le site d'investigation Mediapart (lien vers l'article payant) qui révèle l'affaire, le colonel Eric Steiger a été condamné à 6.000 euros d'amende le 28 mai 2021 par la cour d'appel de Paris pour "violences volontaires sur conjoint". Une peine plus légère que celle prononcée en première instance : en février 2020 il avait été condamné à six mois de prison avec sursis mais avait fait appel de ce jugement. Lors du second procès, le haut-gradé a reconnu les faits, selon un extrait du jugement publié par Mediapart : "Éric Steiger a déclaré avoir pris conscience que son comportement envers sa femme avait été violent et il tenait à reconnaître sa responsabilité".
Pas d'enquête disciplinaire
Selon Mediapart, aucune enquête disciplinaire n'a été diligentée par la gendarmerie. Et la condamnation de mai 2021 n'a pas empêché la promotion du colonel de gendarmerie : le 8 juillet dernier, il est devenu numéro un de la gendarmerie en Nouvelle-Calédonie. Jusqu'alors numéro deux, il a succédé au général de division Christophe Marietti.
Contactée par Mediapart, la Direction générale de la gendarmerie nationale (DGGN), explique que les circonstances sont un "contexte douloureux de séparation du couple après 20 ans de vie commune. L'officier concerné a rendu compte à sa hiérarchie de chaque étape de la procédure. Une décision de justice définitive est intervenue le 28 mai 2021. La décision ne faisait pas obstacle à ce que la DGGN nomme l’intéressé sur son poste actuel".
Un courrier à Marlène Schiappa
Interviewée par le site d'investigation, l'ex-épouse du haut-gradé (le couple est en instance de divorce) explique avoir pourtant alerté par courrier, le 5 octobre 2020, la ministre déléguée à la citoyenneté, Marlène Schiappa, des violences commises par son mari. Éric Steiger venait d’être muté et nommé numéro deux de la gendarmerie en Nouvelle-Calédonie. Dans ce courrier, elle s'interrogeait : "Comment un homme violent dans sa vie privée […] pourrait-il occuper un tel poste nécessitant une éthique et un comportement irréprochables ? Comment un tel paradoxe pourrait-il se produire, étant donné l’ensemble des projets à l’initiative de la gendarmerie contre les violences conjugales ?" Elle explique n'avoir jamais reçu de réponse à son courrier.
Des violences commises en 2018
Les faits incriminés remontent à 2018. L'épouse du haut-gradé explique avoir d'abord subi des humiliations verbales. Il la traite "d'illettrée", de "saleté", de "grosse conne" et l'humilie devant leurs trois enfants. Fin 2017, les violences physiques débutent. A deux reprises, la fille ainée du couple est contrainte de s'interposer pour protéger sa mère, comme elle le confirmera lors de l'enquête. En juin 2018, l'épouse porte plainte. Après une garde à vue, Éric Steiger est placé sous contrôle judiciaire, avec interdiction d’entrer en contact avec son épouse, de se rendre à son domicile et avec une obligation de soins psychiatriques.
Interrogé par Mediapart, l'avocat d'Éric Steiger, Thibault de Montbrial, affirme qu'"il y a eu des violences mais pas de coups, sinon la peine aurait été différente. Éric Steiger n'est pas un “cogneur de femmes”".
Pas de réaction au ministère de l'Intérieur
Médiapart explique enfin avoir contacté le cabinet du ministre de l'Intérieur, sans réponse à ce jour. Le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, avait déclaré le 1er août au journal Le Parisien que tout policier ou gendarme condamné pour violences conjugales ne devait plus être en contact avec le public, dans l’attente d’une décision du conseil de discipline, dont les membres doivent être réunis sous trois mois maximum.