Législatives 2024. Daniel Dalin :"Nous les Antillais, nous devons faire plus pour nous faire accepter, et c’est en partie cela que dénoncent les habitants en votant RN "

Le premier tour des élections législatives a placé le Rassemblement National en tête. Dans les départements d'Outre-mer, le parti est en net progression. Daniel Dalin président du Crefom (Conseil représentatif des Français d’Outre-mer) tente d'apporter une explication sur cette percée.

Daniel Dalin est président du Crefom (Conseil représentatif des Français d’Outre-mer), un lobby crée en 2014 qui valorise et défend les intérêts des Ultramarins. Le Martiniquais a suivi de près les résultats des élections législatives en Outre-mer, notamment dans les Antilles et donne son explication de la percée du RN. 

Outre-mer la 1ʳᵉ : Comment expliquez-vous les bons scores du Rassemblement national aux élections législatives ?

Daniel Dalin : Le vote RN est différent en Outre-mer, notamment aux Antilles, qu’en Hexagone. La population antillaise se sent méprisée par les gouvernements successifs, encore plus depuis l’élection d’Emmanuel Macron. Glisser un bulletin de vote RN est un moyen de contestation pour les habitants qui dénoncent certaines choses qui se déroulent en Martinique et en Guadeloupe. Par exemple, l’absence de continuité territoriale (le service public doit compenser les handicaps liés à un territoire isolé, enclavé), nous le voyons bien avec les moyens des hôpitaux dans les Antilles. Ce principe fait pourtant partie de la Constitution, mais il n’est pas respecté dans les faits. Les jeunes antillais sont aussi tentés par l’extrême droite, car ils ne connaissent pas l’histoire raciste de ce parti. Comme le RN n’a jamais été au pouvoir, ils pensent que leur politique sera différente de celles des autres.

Il n’y a pas eu de mobilisation contre l’extrême droite dans les Antilles comme il y en a eu dans l’Hexagone. Pourquoi ?

C’est une faiblesse chez nous, nous ne nous mobilisons pas vraiment. Il n’y a pas eu d’appel à voter contre l’extrême droite aux Antilles, car la mobilisation politique ne fait pas partie de notre culture. La dernière la plus importante remonte à 1987, quand les Martiniquais ont refusé de recevoir Jean-Marie Le Pen [des milliers de Martiniquais ont envahi le tarmac de l’aéroport, empêchant l’avion de Jean-Marie Le Pen d’atterrir, NDLR]. Il n’y a pas de sursaut contre l’extrême droite comme dans l’Hexagone, et s’il doit en avoir un, il viendra des Antillais qui vivent dans l’Hexagone, car ils sont plus avertis. Pour autant, les habitants n’adhèrent pas aux idées du RN, ils savent que c’est un parti raciste. Certes, les candidats RN ont fait une percée en Martinique et en Guadeloupe, mais ils arrivent loin derrière les candidats en tête.

Il y a du racisme dans les Antilles ?

En Martinique, en Guadeloupe, les habitants accueillent tout le monde, peu importe la couleur de peau, tant que vous respectez la culture locale. Mais, beaucoup d’Hexagonaux s’installent dans les Antilles avec cette idée de terrain conquis et cela crée des sentiments de racisme et de discriminations. Le gouvernement nous vend l’idée qu’il y a une égalité des chances entre Antillais et Hexagonaux alors dans la réalité, nous ne partons pas avec les mêmes armes. Nous, les Antillais, nous devons faire plus pour nous faire accepter, et c’est en partie cela que dénoncent les habitants en votant RN.