Des prisonniers libérés après le retrait de Cuba de la liste noire étasunienne

Liset Fonseca, mère de Roberto Pérez Fonseca, condamné à 10 ans de prison pour sa participation aux manifestations antigouvernementales de juillet 2021 à Cuba.
C'est le soulagement pour des familles de prisonniers à Cuba. Dès mercredi 15 janvier 2025, une vingtaine de prisonniers ont été remis en liberté. La fin de leur détention survient au lendemain du retrait par Washington de Cuba de sa liste des pays soutenant le terrorisme.

Des ONG et des proches l'ont indiqué à l'AFP. Un premier groupe d'une vingtaine de prisonniers a été remis en liberté mercredi à Cuba, au lendemain du retrait par Washington de l'île de sa liste des pays soutenant le terrorisme.

553 prisonniers libérés en échange de l'allègement des sanctions étasuniennes

À la suite de l'annonce de l'allègement des sanctions étasuniennes mardi 14 janvier, Cuba avait annoncé dans la foulée que 553 prisonniers allaient être libérés. Le gouvernement n'avait cependant pas précisé la date de ces libérations, ni fourni de liste des prisonniers concernés par cette annonce. Aucune information officielle n'avait été communiquée mercredi 15 janvier sur le début du processus de libération.

Les premiers témoignages

"Nous avons reçu hier soir un appel" des autorités "pour nous rendre aujourd'hui (mercredi 15 janvier) à la prison", a déclaré à l'AFP Rosabel Loreto, qui a indiqué qu'à 07h30 du matin, sa belle-mère Donaida Perez Paseiro, 53 ans, "a été libérée" dans la province de Villa Clara (centre). 
Cette dernière, déclarée "prisonnière d'opinion" par Amnesty international pour sa participation aux manifestations antigouvernementales de juillet 2021, a pris ensuite la parole dans une vidéo diffusée sur les réseaux sociaux. 
"Afin que Cuba soit retirée de la liste des pays terroristes, nous avons été (la) monnaie d'échange" du gouvernement, a-t-elle dénoncé. "J'espère avoir bientôt mon mari et mes frères de lutte dans la rue. Nous sommes ici, nous continuerons à nous battre pour la liberté de Cuba".

Une mère de famille a indiqué à l'AFP, sous condition d'anonymat, avoir reçu un "appel de la sécurité de l'État" et que sa fille, condamnée à dix ans de prison pour avoir manifesté en 2021, avait été remise en liberté mercredi matin à La Havane. Son mari, condamné à neuf ans de prison pour les mêmes motifs, est toujours emprisonné, a-t-elle précisé. 

L'information sur de premières remises en liberté a commencé à circuler dans la matinée lorsque des proches ont publié les noms de prisonniers libérés sur les réseaux sociaux.

L'ONG Cubalex, basée à Miami, a indiqué en début de soirée avoir confirmé la remise en liberté de 20 personnes, toutes emprisonnées pour avoir participé aux manifestations des 11 et 12 juillet 2021, les plus importantes depuis l'avènement de la révolution castriste en 1959.

L'ONG Justicia 11J, basée à l'extérieur de l'île, avait confirmé à la mi-journée la libération d'une dizaine de personnes. Il "ne s'agit pas d'une amnistie", mais de remises "en liberté conditionnelle", a insisté auprès de l'AFP Leonardo Fernandez, membre de l'ONG. 

Cuba inscrite à plusieurs reprises sur la liste des États soutenant le terrorisme 

Mardi 14 janvier, le président des États-Unis Joe Biden a annoncé le retrait surprise de l'île communiste de la liste noire des États soutenant le terrorisme, où figurent aussi la Corée du Nord, l'Iran et la Syrie, et La Havane s'est engagée à libérer des prisonniers dans le cadre d'un accord négocié avec l'aide de l'Église catholique.

"La nouvelle de la libération progressive annoncée de 553 prisonniers cubains est un signe de grande espérance" a réagi mercredi 15 janvier le Cardinal Pietro Parolin, secrétaire d'État du Saint-Siège, auprès de Vatican news.

La décision du président américain intervient avant la prestation de serment lundi de Donald Trump, dont le parti soutient une ligne dure contre Cuba. Mercredi 15 janvier, le secrétaire d'État désigné par Donald Trump, Marco Rubio, a estimé que Cuba méritait d'être désigné comme un État soutenant le terrorisme, laissant entendre que l'administration Trump pourrait révoquer la décision de son prédécesseur.

"Je n'ai aucun doute dans mon esprit" sur le fait que Cuba "remplit toutes les qualifications pour être un État soutenant le terrorisme", a-t-il déclaré lors de son audition au Sénat. Quelques jours avant de céder le pouvoir à Joe Biden en janvier 2021, Donald Trump avait en effet pris la décision exactement inverse à celle du président démocrate, en replaçant Cuba sur la liste noire.

Le ministre cubain des Affaires étrangères, Bruno Rodriguez, a répliqué que les successives inscriptions et retraits de Cuba de la liste au cours des vingt dernières années avaient "démoli" cette mesure.
"Elle n'existe plus. Personne ne pourra plus y croire, car c'est une confirmation absolue, tangible, que cette liste n'a pas pour but de lutter contre le fléau du terrorisme, mais qu'elle est simplement un (...) vulgaire instrument de coercition politique", a-t-il accusé devant la presse.

Selon des chiffres officiels, quelque 500 personnes ont été condamnées à des peines allant jusqu'à 25 ans de prison pour leur participation aux manifestations de 2021. Des ONG et l'ambassade des États-Unis à Cuba comptabilisent au total un millier de "prisonniers politiques" sur l'île.
La Havane nie l'existence de prisonniers politiques et accuse les opposants d'être des "mercenaires" à la solde de Washington.