Depuis trois générations, les femmes plasticiennes d’Haïti ont du mal à être reconnues. Elles souffrent d’une dévalorisation systémique.
Les études confirment une maigre présence des œuvres des femmes dans les collections publiques et privées ainsi qu’une participation minimale aux expositions.
Les Haïtiennes qui ont persisté dans le monde artistique ont été remarquées plutôt pour leurs apparences physiques, leurs situations maritales et le nombre d’enfants qu’elles ont mis au monde. Leurs œuvres artistiques étaient secondaires.
Dans sa conférence, Barbara Prézeau-Stephenson est remontée à trois générations d’artistes plasticiennes haïtiennes qui ont continué à travailler malgré les préjugés et les difficultés associés à la misogynie haïtienne.
Luce Turnier
Elle a parlé de Luce Turnier. Née en 1924, elle a fait des études au Centre d’Art d’Haïti où elle était l’une des rares femmes à y être inscrite.
Femme de caractère, elle a été stigmatisée par la société haïtienne parce qu’elle portait des pantalons et parce qu’elle avait été divorcée à deux reprises.
Luce Turnier a effectué de nombreux voyages dans la Caraïbe, l'Europe, et en Amérique du Nord.
Malgré l’importance de son travail et sa participation en 1946 à l’exposition collective de l’UNESCO à Paris, Luce Turnier, qui décède en 1994, reste marginalisée de la scène artistique à cause de son genre.
Rose-Marie Desruisseau
L'artiste est née en 1933. Issu d’une famille de riches paysans, son père voulait qu’elle devienne secrétaire. Elle a pu prendre des cours de peinture et de dessin. Mais pendant dix ans, à cause des pressions familiales, elle n’a pas pu pratiquer son art.
Le travail de Rose-Marie Desruisseau est centré sur les traditions Vodou. Elle a raconté également l’histoire d’Haïti dans ses œuvres.
Elle était atteinte d’un cancer et d’une maladie psychologique que la société haïtienne a décidé d'attribuer à des punitions des dieux.
Louisiane Saint-Fleurant
Peintre et sculptrice, Louisiane Saint-Fleurant a commencé à travailler son art à l’âge de 50 ans. Ancienne employée de maison et cuisinière, elle s’est installée à Soissons-la-Montagne, le lieu de naissance du mouvement artistique Saint-Soleil.
Louisiane Saint-Fleurant était la seule femme peintre du groupe.
Myrlande Constant
Elle est la première femme haïtienne à réussir sa carrière d’artiste.
Née en 1968, elle est spécialiste de l’art des drapeaux Vodous, une tradition dominée par les hommes. La mythologie et les cérémonies Vodous sont centrales dans son travail.
Les récits historiques du tremblement de terre de 2010 ainsi qu’un hommage à la reine Taïno, Anacaona, font partie des récits historiques qu’elle développe dans ses œuvres.
Ses techniques de perlage, elle les a apprises de sa mère.
Ses œuvres ont été exposées à la Biennale de Venise. Elle est la première Haïtienne à bénéficier d’une exposition solo au Musée de Fowler à UCLA, Université de Californie, Los Angeles.
Tessa Mars
L'artiste haïtienne, âgée de 40 ans a réussi son parcours. Elle a fait ses études à Rennes. Elle a eu des expositions individuelles et fait plusieurs résidences artistiques dans le monde. Elle a même créé Tessalines, son alter ego, une version féminine du General Jean-Jacques Dessalines.
Tessa Mars est célibataire et libre de ses mouvements.
Installée à Porto Rico, elle s’inspire des mythologies et des légendes haïtiennes, de la vie quotidienne en Haïti ainsi que son expérience de femme et d’immigrante.
Après une lutte de trois générations, les artistes plasticiennes d'Haïti commencent à être reconnues pour leur art.