1959, Fidel Castro appuyé par Che Guevara entame la révolution en renversant le dictateur Batista, puis se rapproche de l’URSS. Tout pour déplaire au voisin américain qui tente en 1961 une invasion avec des exilés cubains recrutés par la CIA.
L’opération est un fiasco et se solde par un humiliant échec pour les USA. Qu’à cela ne tienne le président Kennedy décrète en 1962 un embargo censé étrangler rapidement cette menace communiste.
Cuba ne doit pas être abandonné aux communistes et nous n'envisageons pas de le faire.
John Fitzgerald Kennedy– Président des USA (1961-1963)
66 ans plus tard, le pouvoir castriste, qui a affronté treize présidents américains, est toujours là. L’échec est patent et devient même un cas d’école.
On ne fait pas tomber un pouvoir politique en exerçant un embargo économique, qui plus est en empoisonnant le quotidien de la population que l’on prétend soutenir. C’est pourtant la position défendue année après année par les ambassadeurs américains aux Nations-Unies drapés dans le respect des droits humains, littéralement contre le reste du monde.
Nous n'avons aucun problème à nous trouver seul face à nos convictions (...) mais vous blessez littéralement les cubains en disant au régime cubain que c'est acceptable de traiter les gens ainsi.
Nikki Halley - ambassadrice USA aux Nations Unies (2018)
La rhétorique justifiant l’embargo a évolué au fil du temps. Si dans les années 60, l’administration américaine condamnait le rapprochement avec Moscou, elle s’appuie depuis 1982 sur des accusations de soutien au terrorisme, notamment à des groupes armés révolutionnaires en Amérique latine.
L’administration Obama a retiré l'île de Cuba de cette liste en 2015, l’administration Trump l’y a réinscrite en 2021 (aux côtés de la Corée du Nord ou de l’Iran) en invoquant un soutien présumé au Farc de Colombie. Cette implication n’a jamais été prouvée, au contraire Cuba a joué un rôle important dans les négociations de paix entre les FARC et le gouvernement colombien.
En réalité les raisons de l’embargo sont d’abord électoralistes et idéologiques. Car les premiers ennemis du régime castriste sont les membres de la puissante communauté cubaine de Floride, un état qui peut faire basculer une élection américaine, et dont est issu Marco Rubio, l’actuel chef de la diplomatie américaine. Qu’ils soient démocrates ou républicains, les politiques prennent donc soin de ne pas s’aliéner les exilés cubains de Miami, d’autant que la décision finale de lever l’embargo reviendrait au congrès.
De ce que je sais, de ce que j’ai pu voir dans ma vie, Cuba a beaucoup de défauts, mais je ne crois pas que supporter le terrorisme en fasse parti.
Willian González, musicien de rue à la Havane
Le blocus à nouveau, tout est contre Cuba, l’inscription sur la liste, en fait leur but c’est de nous écraser.
Yudit Sayas, habitante de la Havane
Pour verrouiller l’île, les États-Unis vont même imposer des sanctions aux pays et aux entreprises qui commercent avec Cuba à travers des législations qui correspondent parfois à des violations du droit international.
Par exemple depuis 1996, dans le cadre de la loi Helms Burton, promulguée sous administration Clinton, tout navire accostant dans un port cubain se voit privé d’entrée aux États-Unis pendant six mois. Conséquence : les armateurs préfèrent renoncer à ravitailler l’île ou alors se font payer au prix fort.
Autre exemple, la loi Torricelli impose des sanctions à tout pays apportant une assistance à Cuba : imaginons que le Mexique octroierait une aide de 100 millions de dollars à La Havane, Washington diminuerait alors d’autant son aide à Mexico.
L’embargo impose aussi des restrictions sur les voyages, l’envoi d’argent ou même le matériel médical. L’inscription sur la liste des États soutenant le terrorisme n’est qu’un élément supplémentaire de l’arsenal juridique et administratif destiné à étouffer l’île dans le but de faire tomber le régime castriste. Une stratégie vaine depuis plus de 60 ans et qui pèse d’abord sur la population cubaine.