Restriction du droit du sol à Mayotte : les élus mahorais relancent le débat sur la fin du titre de séjour territorialisé

Devant la préfecture de Mayotte, à Mamoudzou, plusieurs personnes attendent leur tour pour déposer ou récupérer un titre de séjour.
Alors que l'Assemblée nationale a adopté en première lecture la proposition de loi pour restreindre le droit du sol à Mayotte, les élus mahorais sont partagés sur l'efficacité de la mesure. Tous sont en revanche unanimes pour demander la suppression du titre de séjour territorialisé.

Ce fut une séance houleuse à l'Assemblée nationale ce jeudi 6 février avant l'adoption en première lecture de la proposition de loi pour restreindre le droit du sol à Mayotte. Plusieurs élus mahorais se disent satisfaits, mais restent sur leur faim. "On est ravi, car je constate que c'est un grand pas pour Mayotte, ça faisait longtemps qu'on attendait ça", se réjouit Saidali Boina Hamissi, le délégué départemental du Rassemblement national. "Il nous reste encore beaucoup de travail, mais ça va limiter cette submersion migratoire qui sévit sur notre territoire."

La députée mahoraise de son parti, Anchya Bamana, n'était pourtant pas emballée à la tribune de l'Assemblée, annonçant que son groupe allait "voter ce texte, sans illusions, en reconnaissant sa nécessité, mais en déplorant son caractère si incomplet." Par courrier ce vendredi, la députée évoque "10h de théâtre" et "beaucoup de blablas." L'ancienne maire de Sada dénonce notamment le "refus de supprimer le visa territorialisé" du ministre de la Justice, Gérald Darmanin. Elle avait déposé un amendement en ce sens, qui n'a pas été examiné car jugé irrecevable.

Quand Darmanin annonçait la fin du séjour territorialisé

Actuellement, les titres de séjours délivrés à Mayotte ne sont valables que dans le département, un étranger régularisé sur l'île ne peut se déplacer sur le reste du territoire national. Cette question et celle du droit du sol ont été liées par Gérald Darmanin. En février 2024, Mayotte est paralysée par des barrages pour protester contre l'insécurité et l'immigration clandestine. À l’époque ministre de l'Intérieur, il se rend sur place et promet la suppression du droit du sol par une réforme constitutionnelle et la fin du titre de séjour territorialisé. Pour Gérald Darmanin, l'un ne peut se faire sans l'autre. "Nous aurons beaucoup moins de titres de séjour, ces visas territorialisés n'auront plus lieu d'être", expliquait-il.

Depuis, la question du droit du sol est revenue dans le débat public, et même à l'Assemblée nationale du fait de cette proposition de loi du parti Les Républicains. "On aimerait que la suppression du droit du sol fasse l'unanimité, mais aussi qu'on aille tous ensemble travailler pour demander la levée du séjour territorialisé", explique Abdoul Kamardine, le président de la fédération LR à Mayotte. "On a besoin du rassemblement de tous les parlementaires français."

Une question qui rassemble du RN à LFI

Tous les bords politiques semblent unanimes sur cette question, même la France Insoumise dont le représentant à Mayotte a été pris à partie par le ministre de la Justice ce jeudi. "Une question pour la France Insoumise, M. Abdullah Mikiledi (sic) a déclaré en novembre 2023 qu'il fallait plus de fermeté sur l'île, mais aussi revoir les conditions de nationalité", a lancé Gérald Darmanin lors de l'ouverture de la séance, des propos démentis ensuite par le député LFI Manuel Bompard. Invité pour s'exprimer sur l'opération Wuambushu en avril 2023, le porte-parole mahorais expliquait alors "avoir toujours demandé haut et fort la fin des titres de séjours territorialisés." 

Une position qui n'a pas évolué. "Si on insiste dessus à La France Insoumise, c'est parce que quand l'État est en échec, quand il n'arrive pas à empêcher les migrants d'entrer à Mayotte, il faut qu'on les répartisse dans l'espace Shengen", explique Abdullah Mikidadi ce vendredi. "Ce droit du sol, il va résoudre quoi ? Les migrants ils ne viennent pas pour être français, ils viennent ici pour avoir une meilleure vie."