"On m’a promis l’oasis au milieu du désert", résume avec amertume Florent Ramseyer. Le basketteur professionnel, de retour dans l’Hexagone, ne compte pas en rester là après son bref passage à l’Étoile bleue de Kawéni fin 2024. L’international centrafricain a pris contact avec un avocat pour saisir les prud’hommes. Il accuse notamment le club de ne pas avoir respecté ses engagements.
Le contrat d’engagement avec l’Etoile Bleue
Le joueur de 35 ans est arrivé à Mayotte en octobre 2024, après avoir officié en nationale 3 avec La Charité basket, un club de la Nièvre. Contacté par un joueur de l’Étoile Bleue, qu’il a connu en formation, il est convaincu de rejoindre l’équipe. "On m’a vanté un club revanchard, avec des objectifs, qui visait le titre", se rappelle Florent Ramseyer. Le scoreur participe à la Coupe de France jusqu’à la défaite de Kawéni en finale le 18 novembre 2024 face à Vautour de Labattoir. Un mois plus tard, le cyclone Chido dévaste le département. "Je n’ai plus eu de nouvelles après le cyclone, les dirigeants ont expliqué ne plus pouvoir me payer à cause de la catastrophe naturelle", explique le joueur. "On me disait qu’on verrait quand la saison reprendra, mais je ne peux pas rester à attendre sans salaire à Mayotte."
Un document est au cœur de cette discorde : un contrat d’engagement signé par Florent Ramseyer pour la période du 11 octobre 2024 au 31 juillet 2026. Ce document stipule qu’il serait notamment rémunéré 30.000 euros nets pour la saison 2024-2025 à raison de 6.000 euros à la signature du contrat puis "par virement de 3.000 euros par mois à partir de décembre 2024, tous les 11 du mois jusqu’en juillet 2025." Un problème apparaît lorsque le joueur réclame une rupture conventionnelle de son contrat. "Je voulais récupérer mon attestation employeur pour faire mes démarches, et là on me dit qu’on ne l’a pas déclaré", explique le basketteur. En effet, le contrat transmis par le basketteur n’a pas été signé par le club.
Le président de l’Etoile Bleue confirme ne pas l’avoir signé, mais ne remet pas en cause la véracité du document. "On est un club amateur, quand on a des ambitions et qu’on trouve quelqu’un de vraiment honnête, on se met d’accord et on s’entraide", explique Ahamadi Attoumani. "On fonctionne avec des licenciés ne peut pas faire des contrats comme des professionnels." Il reconnaît néanmoins "avoir fait les choses précipitamment" et avoir été "dans l’euphorie" à son arrivée. "On était dans la volonté de faire venir le joueur et de faire de belles choses avec lui, si tout se passait bien, on aurait trouvé des solutions", ajoute le président. "Je ne peux que regretter de l’avoir fait venir, ce n’était pas le joueur qu’on attendait."
Un logement et des relations tendues
Les relations se sont rapidement tendues autour de la question du logement de Florent Ramseyer. "Le club m’a trouvé un logement, mais qui n’était pas meublé, quand ma fille et la mère de ma fille m’ont rejoint en novembre, je n’avais toujours que deux matelas pour trois", explique le joueur franco-suisse. "La situation a duré un mois et demi avant que les joueurs se cotisent pour acheter de l’électroménager, alors que c’est la responsabilité du club." Le basketteur fait à nouveau valoir le contrat d’engagement qui prévoit que l’Etoile Bleue mettra à sa disposition un appartement meublé et équipé. "On s’était convenu qu’on lui trouverait un logement, on est un club amateur, on a dû se cotiser", réplique le président.
Selon Florent Ramseyer, des joueurs du club auraient tenté de le menacer et d’entrer par effraction dans son logement pour qu’il le quitte. "Il nous a dit qu’il voulait son billet pour partir le plus vite possible, on lui a pris, et après il était encore là. Il a dit qu’il avait repoussé son billet parce qu’il avait des rencontres avec des clubs", répond Ahamadi Attoumani, sans commenter ces accusations.
Un autre contrat, « du travail dissimulé »
Le basketteur et le club auraient également convenu qu’un travail lui serait proposé. "Je suis passé à un contrat de basket avec trois entraînements par semaine contre deux par jour en métropole", avance Florent Ramseyer. "J’avais beaucoup de temps, donc je pouvais avoir un travail à côté." Un CDD de 11 mois comme animateur sportif pour une rémunération de 2.500 euros net est alors signé avec l’association Kawéni Nouvelle Aire, présidée par le directeur sportif de l’Etoile Bleue, Kamal Abdoul Wahabi.
"Je n’ai jamais travaillé pour cette structure, quand je suis arrivé on m’a dit qu’on me trouverait un travail dans un collège, puis on m’a proposé une formation d’ambulancier", raconte le joueur. Une version vivement démentie par son employeur. "Il n’a jamais mis les pieds dans l’association, il n’a jamais voulu travailler on a donc rompu son contrat au bout de huit jours", affirme Kamal Abdoul Wahabi. Sur ce point aussi le joueur de l’Hexagone ne compte pas en rester là : une main courante a été déposée au commissariat de Béziers pour travail dissimulé.
« Un cauchemar »
Depuis, Florent Ramseyer a signalé sa situation à l’inspection du travail et prépare sa procédure aux prud’hommes, loin des parquets. "Je ne peux pas rejoindre de nouvelles équipes, car j’ai déjà joué pour deux équipes cette saison", précise-t-il. Le président du club et son directeur sportif dénoncent tous deux "un joueur qui n’est pas honnête et ne veut que de l’argent", évoquant également "des comportements inappropriés." Selon, le président, "sur le terrain, ça jouait, mais dans son comportement envers les autres, c’était vraiment un cauchemar." Le directeur sportif rappelle qu’il a été "licencié pour faute grave" par son précédent club nivernais en octobre, même si le motif de ce licenciement n’a pas été rendu public.
Le joueur explique avoir été impacté psychologiquement par cette affaire. "Tu passes de tout à rien en ayant vécu un cyclone", précise-t-il. Le président du club peste aussi de son côté. "Je suis épuisé, je dois réparer ma maison, mais encore une fois, il va falloir s’occuper de M. Ramseyer", résume Ahamadi Attoumani.