Moins dépistés et moins vaccinés, les Outre-mer en retard dans la lutte contre le cancer du col de l'utérus

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La maladie, qui survient généralement après une infection par un papillomavirus, peut être évitée grâce à la vaccination. Si la couverture vaccinale progresse en France, les DROM sont bien en dessous de la moyenne nationale.

Chaque année, 1 100 femmes meurent du cancer du col de l’utérus en France et plus de 3 000 cas sont recensés. Pourtant, la maladie est largement évitable.

Ce type de cancer survient en général plusieurs décennies après une infection par un papillomavirus humain. Il existe plus de 200 types de papillomavirus. Certains sont sexuellement transmissibles et peuvent provoquer plusieurs types de cancers : du col de l’utérus, de l’anus, du vagin, du pénis, mais aussi de la bouche ou de la gorge. 80% des femmes et des hommes sont exposés au cours de leurs vies à ces virus.

Il existe un vaccin contre les papillomavirus. La vaccination prévient jusqu’à 90% des infections à l’origine des cancers. Elle est recommandée pour les filles et les garçons entre 11 et 14 ans et nécessite deux doses. Il est aussi possible de se faire vacciner entre 15 et 19 ans, mais la réponse immunitaire sera moins forte et il faudra trois doses pour rendre le vaccin efficace. L’injection peut être faite par un médecin ou en pharmacie, et, depuis la rentrée 2023, les enfants en 5e peuvent se faire vacciner au collège si leurs parents donnent leur accord.

Campagne pour la vaccination contre le papillomavirus

Les Outre-mer en retard

Dans un état des lieux de la vaccination et du dépistage du cancer du col de l’utérus publié par Santé publique France à l’occasion de la Journée mondiale contre le cancer, l’organisme note que si "la couverture vaccinale est en constante progression depuis 2016", il existe d’importantes "disparités territoriales". Parmi l’ensemble des territoires français, les Outre-mer sont les plus à la traîne.

En 2023, sur l’ensemble du territoire national, 55% des filles de moins de 15 ans avaient reçu au moins une dose de vaccin. Elles n’étaient que 31% en Guadeloupe, 29% en Guyane, 24% à La Réunion et 22% en Martinique.

Pour la dernière période observée (couverture vaccinale 2023), la Guadeloupe, la Guyane, et la Martinique présentaient des taux particulièrement bas en comparaison avec la moyenne nationale.

Santé publique France

Les meilleurs élèves sont les Pays de la Loire et la Normandie, des régions où plus de 66% des filles sont vaccinées. Ces chiffres restent néanmoins bien en dessous des objectifs fixés par l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), qui vise 90% des filles vaccinées avant leurs 15 ans.

Il existe une deuxième arme pour combattre le cancer du col de l’utérus : le dépistage, qui permet de prendre en charge les patientes le plus tôt possible et de réduire la mortalité.

En 2023, près de 60% des femmes de 25 à 63 ans avaient réalisé un dépistage du cancer du col de l’utérus au cours des trois dernières années. Mais là encore, la pratique est moins courante en Outre-mer qu’ailleurs en France. Seule La Réunion est dans la moyenne nationale (64%). Les femmes dépistées n’étaient que 44% en Guadeloupe, 40% en Martinique et 32% en Guyane sur la même période. Le chiffre tombe à 15% pour Mayotte.

Un cancer qui peut être éradiqué

Les auteurs de Santé publique France citent plusieurs facteurs qui pourraient expliquer les faibles de taux de vaccination et de dépistage observés dans les territoires ultramarins, notamment des "freins culturels autour de la sexualité", un accès plus difficile "à l’information et aux professionnels de santé" et les "inégalités économiques".

Plus une population est défavorisée, plus la couverture vaccinale contre les papillomavirus est faible. Le Baromètre de Santé publique France 2021 démontre que les adolescentes dont les parents se considèrent comme étant "à l’aise financièrement" sont vaccinées à près de 60%. La proportion est de 26% pour celles dont les parents "y arrivent difficilement" et chute à 15% pour les adolescentes dont les parents "n’y arrivent pas sans dettes".

Autre facteur explicatif : la peur que la vaccination soit dangereuse. Depuis la création du vaccin, plus de 300 millions de doses ont été injectées dans le monde. "On a le recul nécessaire pour affirmer que le vaccin est tout à fait sûr", assure Jérôme Viguier, oncologue à l'Institut national du cancer. En Australie, l’un des premiers pays à avoir lancé une campagne de vaccination, les infections aux papillomavirus sont de moins en moins nombreuses. Le cancer du col de l’utérus pourrait même être éradiqué dans le pays dès 2035.