Australie: les travaillistes contre un référendum sur le mariage gay « cher et clivant »

Bill Shorten, le chef de file des travaillistes, estime qu'un référendum sur le mariage gay causerait du tort aux homosexuels, qui pourraient être blessés par la tenue de propos homophobes lors de la campagne.
Il n'y aura probablement pas de référendum sur le mariage entre personnes de même sexe le 11 février prochain, contrairement à ce que prévoyait le gouvernement australien. Car le parti travailliste s'oppose à l'organisation d'une telle consultation.
Le parti travailliste s'est réuni ce matin pour prendre sa décision. Il y avait peu de suspense et c'est à l'unanimité que les députés et sénateurs ont choisi de rejeter l'idée d'un référendum sur le mariage gay. Pour Mark Dreyfus, responsable des questions de justice au sein du principal parti d'opposition, il n'est pas utile de consulter l'ensemble de la population :
« On a désormais atteint un stade où il y a une majorité écrasante de gens qui disent au Parlement australien, 'allez-y, qu'on passe à autre chose'. »
Depuis plusieurs mois, la coalition libérale-nationale au pouvoir tente pourtant de convaincre les travaillistes de l'intérêt de consulter la population plutôt que de laisser les élus en décider au Parlement.
Le gouvernement dispose d'une majorité suffisante à la Chambre des représentants, mais au Sénat, il a besoin de l'appui des travaillistes, car les Verts et l'équipe du sénateur Nick Xenophon sont contre la tenue d'un référendum.
Il semble donc impossible pour la majorité de mettre son plan à exécution. Mais Simon Birmingham, ministre de l'Éducation, estime qu'un compromis est possible :
« Si le parti travailliste veut revenir vers nous et dire qu'il est d'accord pour soutenir le référendum sous certaines conditions, on adorerait savoir quelles seraient ces conditions. »
Il laisse donc la porte ouverte à des négociations, et prend même les devants : la majorité est prête à abandonner l'idée de financer la campagne des partisans du oui et du non. Le gouvernement prévoit de donner 7,5 millions de dollars à chaque camp, en plus des 160 millions de dollars que coûtera l'organisation du référendum. Cette question peut donc faire l'objet de négociations, affirme Simon Birmingham :
« Au bout du compte, si c'est quelque chose que le parti travailliste veut supprimer en échange de son soutien pour le référendum, qu'il le dise et on en discutera. Ce serait une demande raisonnable, une requête que l'on serait en mesure de considérer. »
La question ne fait toutefois pas l'unanimité au sein de la coalition ; certains élus ont fait savoir qu'ils tenaient à ce que les pro et anti-légalisation du mariage gay puissent faire campagne avec les mêmes armes.

Pour le parti travailliste, renoncer au référendum n'est pas renoncer à faire passer ce projet de loi. Au contraire, cela ira plus vite si la question reste entre les mains des élus, souligne Mark Dreyfus :
« Ce qui se passera si on rejette la tenue d'une consultation de tous les Australiens, c'est qu'on se retrouvera dans la même situation qu'avant août 2015, avec la nécessité d'organiser un vote au Parlement en laissant aux députés et aux sénateurs la possibilité de voter selon leurs convictions et non selon la ligne de leur parti. L'Australie pourrait alors rejoindre avec beaucoup de retard tous les autres pays développés du monde anglophone - certains d'entre eux, comme le Canada, ont légalisé le mariage homosexuel en 2006. »
Mais pour le moment, le Premier ministre, Malcolm Turnbull, refuse de s'avouer vaincu. Il entend continuer à pousser pour l'organisation d'un référendum dans quatre mois. S'il y parvient, les Australiens devront répondre à cette question : « La loi doit-elle être changée pour permettre aux couples de même sexe de se marier ? »