Du 7 au 15 mars, une vingtaine de biologistes marins internationaux a participé à la mission « Supernatural 2 », pilotée par l'IRD. Objectif : étudier la mangrove de Bouraké, un écosystème unique au monde, dans laquelle les espèces survivent en dépit de conditions extrêmes.
Caroline Antic-Martin •
Depuis quatre ans, Riccardo Rodolfo-Metalpa étudie les coraux de la mangrove de Bouraké. Ici l’eau est chaude, acide et pauvre en oxygène, pourtant les organismes marins survivent et même prospèrent. Cette situation inédite interroge les scientifiques du monde entier.
« Des scientifiques japonais, chinois, colombiens, français, australiens et Néo-zélandais apportent leur expertise afin de déterminer pourquoi les coraux et les poissons sont résistants ici dans ces conditions environnementales », indique le chercheur à l’IRD et chef de mission « Supernatural 2 ».
Des expériences uniques en milieu réel
Pour répondre à cette question, l’équipe « poisson » capture des spécimens devant l’îlot Puen. Ils prélèvent le cerveau, le foie et les ouïes pour les comparer à ceux de poissons capturés à l’intérieur de la mangrove, où les conditions extrêmes préfigurent celles des océans dans les décennies à venir.
« La plupart des expériences se déroulent en aquarium, c’est-à-dire dans un environnement artificiel où l’on recréé les conditions du futur liées au changement climatiques. Ici, à Bouraké, nous avons la chance de mener les mêmes expériences en milieu réel », explique Timothy Ravasi, professeur de biologie marine à l’Institut de sciences et technologies d’Okinawa. « Je suppose que nous allons découvrir des signes d’adaptation chez ces poissons qui vivent dans des conditions extrêmes ».
Les coraux de Bouraké se sont-ils acclimatés ?
A bord du bateau de l’IRD, une équipe étudie entre autre la respiration des coraux. « On fait plein d’expériences pendant cette mission sur différents paramètres qu’on analyse pour ensuite pouvoir comparer à la fin toutes les différences qui existent entre nos différents coraux et comprendre leur capacité à s’adapter à ce système que l’on a dans les mangroves », affirme Clément Tanvet, doctorant en biologie marine.
A la clé cette question essentielle : les coraux de Bouraké se sont-ils acclimatés ponctuellement à ces conditions difficiles ou s’agit-il bel et bien d’une adaptation ? « Les coraux pourraient avoir l’ADN pour résister à des conditions peut-être vécues dans le passé », répond Riccardo Rodolfo-Metalpa.
Nouvelle génération
Prochaine étape, au mois de décembre, pendant la période de reproduction, les scientifiques tenteront d’obtenir une nouvelle génération de coraux capables, comme ceux de Bouraké, de résister aux conditions extrêmes induites par le changement climatique.
Le reportage de Caroline Antic-Martin et de Gaël Detcheverry