ENTRETIEN. "Le solde migratoire est négatif de 10 713 personnes en 2024", estime David Guyenne, le président de la CCI

David Guyenne, président de la CCI.
Invité du journal radio ce mardi 28 janvier, David Guyenne, le président de la CCI, affirme que plus de 10 000 personnes auraient quitté le territoire en 2024. Une estimation à prendre avec précaution avant la publication d'une étude de l'ISEE prévue dans quelques mois.

La Nouvelle-Calédonie ferait face à une importante vague de départs suite à la crise, selon la Chambre de commerce et de l'industrie. La structure estime que 10 713 personnes ont quitté le territoire en 2024, cela représente 4% de la population. Un chiffre à prendre avec des pincettes avant la publication de l'étude démographique de l'ISEE, prévue en milieu d'année.

NC la 1ère : D'où viennent ces chiffres ?

David Guyenne : Vous savez que la CCI gère l'aéroport international de la Tontouta par lequel transite 99% des flux de de population. Donc nous avons tout simplement fait le solde entre les arrivées en 2024 et les départs en 2024. Et nous avons 10 713 départs de plus que d'arrivées. Ce qui veut dire que le solde migratoire est négatif de 10 713 personnes en 2024. Ce sont des chiffres bruts.

NC la 1ère : Selon l'ISEE, les conséquences démographiques, les chiffres qui sont consolidés, sur lesquelles on peut se baser pour faire des études, ce serait plutôt publiable en milieu d'année. Comment vous, vous pouvez être certain de vos chiffres si vite ?

David Guyenne : Alors il y a deux choses qu'il faut avoir en tête. La première, c'est que l'on a aujourd'hui 2 000 membres des forces de l'ordre qui sont en Calédonie, qui ne sont pas encore repartis. Quand elles vont repartir, ça fera 2000 personnes de plus qui partent. En revanche, on voit qu'il y a beaucoup de Calédoniens qui sont partis en fin d'année pour peut-être changer d'air, pour voir d'autres choses. Et on ne sait pas encore combien vont revenir par rapport aux vacances.

Et donc c'est effectivement ces petits ajustements qui vont permettre à l'ISEE de stabiliser un petit peu ce chiffre. Nous, d'un point de vue économique, ce que l'on voit, c'est que peu importe si les personnes reviennent dans un an, dans deux ans, dans trois ans, en 2025, il nous manquera 10 000 consommateurs. Il nous manquera 10 000 personnes qui sont dans des écoles. Il nous manquera 10 000 personnes qui travaillent dans une entreprise. Il nous manquera 10 000 personnes qui contribuent à la fiscalité de ce territoire.

NC la 1ère : Parce que pour vous, ces 10 000 personnes, il n'y en a pas une grande partie ou une partie significative qui commencent à revenir ou qui vont revenir dans l'année ?

David Guyenne : Alors vous savez, nous avions fait une première étude entre 2014 et 2022 et on était à moins 18 000 personnes. En 2023, il n'y a pas eu non plus ce rebond puisqu'on était à moins 2 000 personnes. Et on voit bien qu'en 2024, les conditions ne sont pas là pour attirer du monde. Parce qu'effectivement, on peut voir d'un côté de la médaille le fait que ce soit des raisons de départ.

Les raisons de départ, on les connaît. C'est des raisons économiques, de crise économique, des raisons d'accès à la santé, des raisons d'éducation, des raisons aussi de sentiments d'insécurité et d'avenir politique. Et l'autre face de la médaille, c'est les raisons, les causes d'attractivité de la Nouvelle-Calédonie. Tant qu'on n'aura pas répondu à ces problèmes là, on n'arrivera pas à retenir les Calédoniens qui partent, ou à attirer d'autres personnes pour construire la Nouvelle-Calédonie.

NC la 1ère : Et justement, vous appelez à reconstruire le climat de confiance, à rétablir l'attractivité de la Nouvelle-Calédonie. Qu'est-ce que vous proposez, vous, à la CCI, vous, en tant que président de la Chambre, pour travailler là-dessus ? 

David Guyenne : Il y trois grands piliers d'un retour à l'attractivité de la Nouvelle-Calédonie. Le premier, c'est évidemment l'accord politique. Il va signaler un retour à la stabilité, il va signaler un retour à des opportunités économiques. Et donc, on aura répondu à une partie des inquiétudes des gens. Donc, c'est nécessaire, mais pas suffisant.

Le deuxième pilier, c'est les réformes du gouvernement de la Calédonie. Là encore, il y a deux volets. La baisse du fonctionnement, donc des dépenses publiques de la Nouvelle-Calédonie, qui va permettre d'entrevoir un modèle fiscal, un modèle attractif pérenne. Et deuxièmement, les investissements que la Nouvelle-Calédonie va mettre dans l'économie calédonienne, dans le pays, pour permettre de relancer la machine.

Et le troisième point, c'est au niveau des entreprises, les facteurs microéconomiques. Par exemple, les taux d'intérêt, il faut qu'ils soient bas. Le crédit, il faut qu'il soit accessible. Et puis, retrouver ce sentiment de confiance, qui est quand même très fragile chez les entrepreneurs et les entreprises calédoniennes.