L'Australie a-t-elle eu raison d'intervenir en Irak en 2003 aux côtés des États-Unis ? La publication du rapport Chilcot au Royaume-Uni relance le débat. Le Premier ministre de l'époque, John Howard, défend sa décision d'envoyer des troupes australiennes en Irak.
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Saddam Hussein, l'ancien dictateur irakien, faisait-il produire des armes de destruction massive ? Oui, ont répondu, à l'époque, les États-Unis, le Royaume-Uni et l'Australie. Estimant que la menace était imminente, ils ont décidé d'envahir l'Irak.
On le sait, aucune arme de destruction chimique et biologique n'a été trouvée sur place. La coalition aurait-t-elle donc menti pour justifier son intervention ? John Howard était alors le Premier ministre de l'Australie ; il rejette cette accusation :
« Il n'y a pas eu de mensonge. Il s'agit d'erreurs des services de renseignement, mais pas de mensonge. Quand vous traitez avec les renseignements, c'est très très rare d'être dans une situation où les avis sont rendus sans réserve. Parfois, si vous attendez que cela arrive, vous pouvez vous retrouver face à des conséquences dramatiques. »
500 soldats des forces spéciales ont été envoyés en Irak. Trois navires de guerre et quatorze avions de combat ont participé aux opérations. L'Australie a aussi envoyé des centaines de formateurs. Aucun soldat australien n'a été tué sur le terrain lors de cette intervention en Irak, qui a commencé en 2003 et s'est achevée en 2009. John Howard se dit « désolé pour les blessures et les souffrances causées aux soldats envoyés », mais il « défend sa décision ». « Je ne crois pas, étant donné les informations dont je disposais à l'époque, que c'était une mauvaise décision, vraiment pas », ajoute l'ancien Premier ministre.
Ce n'est pas l'avis du député indépendant et ancien agent des renseignements Andrew Wilkie. Il réclame la mise en place d'une commission d'enquête sur les conditions de l'engagement australien et pointe du doigt la responsabilité du gouvernement de l'époque :
« La menace terroriste à laquelle on fait face actuellement dans notre pays est le résultat direct de la décision prise par le gouvernement de John Howard en 2003. Franchement, il y a un certain nombre d'hommes politiques qui ont du sang sur les mains. Les attentats de Bali en 2005 ne seraient pas arrivés si nous n'avions pas envahi l'Irak. La prise d'otages dans le café Lindt ne serait pas arrivée si nous n'avions pas contribué à créer les circonstances de la montée en puissance de l'État islamique. »
Le général Peter Leahy, qui dirigeait l'armée australienne pendant la guerre en Irak, ne pense pas qu'une enquête soit nécessaire, mais il voudrait un débat sur les raisons qui poussent l'Australie à prendre la décision de partir en guerre et sur ses relations avec ses alliés :
« On doit faire attention à ne pas s'engager à l'aveugle aux côtés de nos prestigieux partenaires stratégiques, et quand on regarde les autres problèmes qui se posent actuellement, il faudrait y réfléchir - quelles décisions est-on en train de prendre ? Ayons une discussion sur le sujet - pas une enquête -, une discussion sur notre relation avec les États-Unis, comment on décide de partir en guerre et surtout, comment on décide au quotidien quand nous sommes en guerre de rester en guerre. »
Au lieu de suivre systématiquement les États-Unis, la décision doit être prise par le Parlement australien, recommande le général Peter Leahy. « Même Vladimir Poutine a demandé l'avis du Parlement » avant d'engager les forces armées en Syrie, fait-il remarquer.