Plus de trente ans de travail récompensé. Pour son ouvrage et ses recherches, Christophe Sand vient de recevoir un prix français annuel de l'Académie des sciences d'Outre-mer, créé en 2002 et destiné à récompenser un ouvrage traitant des divers aspects de la colonisation : le prix Luc Durand-Réville.
Il y a près de 500 ans dans certaines îles
Son livre Hécatombe océanienne - Histoire de la dépopulation du Pacifique et ses conséquences (XVIe-XXe siècle) aborde la chute des populations océaniennes à la suite des contacts avec les Européens et de l'introduction de maladies produisant, selon l'auteur, une hécatombe démographique, qui remonte pour certaines îles à près de 500 ans.
Une dépopulation malgré les nombreuses petites îles
Une satisfaction pour l'archéologue calédonien. "On en peut être que content qu’une institution française reconnaisse un petit Calédonien."
L'archéologue a choisi un titre percutant pour son livre, avec un mot fort : hécatombe. “Quand j’ai commencé à travailler sur le terrain il y a bientôt quarante ans, j’ai eu très rapidement le sentiment qu’il y avait quelque chose qui n’allait pas, par rapport à la version officielle de la dépopulation à travers le Pacifique. Parce qu’on trouvait sur le terrain énormément de traces montrant que dans le temps il y a avait eu beaucoup de monde. Et ça ne se reflétait pas dans la version officielle qui voulait que comme les gens étaient sur des îles, la dépopulation ait été bien moindre que sur le continent américain."
Une désorganisation durable des sociétés
Une chute démographique qui a eu des conséquences majeures sur les populations du Pacifique, selon l'archéologue. "Si vous avez une dépopulation faible, vous avez, malgré la colonisation, une relative continuité dans les structures sociales, l’occupation de l’espace", poursuit Christophe Sand. "Si, comme j’essaye de le montrer dans ce livre, vous passez à une perte, a minima, de pas loin de 90% de la population océanienne entre le 16e siècle et la deuxième guerre mondiale, là où il y avait 100 personnes, il ne reste plus que 10 personnes à la fin. Donc toute l’organisation fonctionne différemment."
Une partie des blocages des sociétés océaniennes aujourd’hui est directement liée à ça.
Christophe Sand, archélogue calédonien
Des problèmes de foncier ou de réalités coutumières
Hécatombe océanienne veut contribuer, dit son auteur, à redonner des bases plus justes pour penser. "Comme on n’a pas dit aux gens l’importance de la chute de population, ils ne peuvent pas véritablement faire le lien entre leurs crises aujourd’hui, comme les problèmes de foncier ou les problèmes de réalités coutumières, et cet événement marquant qui finalement a bouleversé toutes les sociétés océaniennes."
Jusqu'à Seconde Guerre mondiale
Malgré ses recherches poussées, Christophe Sand ne peut pas fournir d'estimation globale des populations avant les premiers échanges avec l'extérieur. "Il y a certains endroits où la dépopulation a commencé il y a 500 ans et à d’autres endroits, elle a commencé bien plus tard. Par exemple en Micronésie, la dépopulation était terminée au 18e siècle. Alors que dans le reste du Pacifique, c’est là qu'elle commençait. Au Vanuatu, la dépopulation s'est terminée au moment de la Seconde Guerre mondiale."