"Au menu du jour, filet de bossu cuit à la vapeur accompagné de purée de patates douces et aubergines grillées". Pour satisfaire les clients des deux tables dont elle est chargée, Chantal met du cœur à l'ouvrage. Discrète et appliquée, elle fait partie des onze apprentis serveurs qui ont débuté leur formation en septembre au lieu de juin, en raison des émeutes.
Crise oblige, le concept d'alternance a dû être revu. Le temps en entreprise a été réduit, remplacé par de la théorie et des travaux pratiques allégés jusqu'à la réouverture, ce mardi 21 janvier, du New ville, le restaurant d'application du GIEP. "Au total, ils n'ont eu que quatre semaines de stage", note Thibaut Dierickx, formateur de service en salle. En temps normal, la promotion aurait dû bénéficier de plusieurs sessions de trois semaines en entreprise.
"Ma plus jeune a 20 ans, ma plus âgée en a 42, ce qui est très bien pour porter une classe puisque les mamans aident les enfants et vice-versa", poursuit l'enseignant, heureux de superviser une "belle promotion" cette année malgré les difficultés. Il a surtout été impressionné par leur volonté, racontant comment un stagiaire originaire de Saint-Louis a trouvé à se loger à Nouville, et comment un autre venait à pied de Rivière salée.
Une session d'examens en mars
Le temps est compté pour ces stagiaires qui passeront leurs examens en mars. Eva, 31 ans, était auparavant employée d'une société de nettoyage. Elle a choisi de suivre une formation qualifiante en cuisine.
"C'est intéressant et on apprend beaucoup de choses, surtout les techniques professionnelles. Ça nous change, c'est ce que j'ai dit à mes collègues : si vraiment on finit notre formation et qu'on travaille, et qu'à un moment donné on se lasse, au moins on aura appris des choses à faire à la maison, par exemple pour les enfants", souligne la trentenaire.
"On essaye de continuer à proposer un ensemble de formations parce qu'on a un public qui a besoin de se former, même si l'économie est difficile. Si on ne forme pas les gens et si nous n'anticipons pas, ces personnes n'auront aucun projet à construire", complète Pascal Velasco, le directeur adjoint du GIEP.
Le retour de l'alternance en 2025 ?
Le planning des apprentis se répartit entre des cours théoriques le lundi et le vendredi, et de la pratique au restaurant du mardi au jeudi. "On est passé de l'alternance à une formation continue. Il est impossible de réaliser en six mois un programme censé durer 24 mois. Alors on s'adapte, on va à l'essentiel, on demande beaucoup plus de travail personnel aux stagiaires", explique Fabien Muchuitti, qui transmet ses connaissances depuis plus de dix ans en cuisine. Sur les douze Calédoniens inscrits à la formation cuisine, huit ont persévéré.
La direction du GIEP doit à présent statuer sur la forme que prendra la formation de la prochaine promotion. Les entreprises embaucheront-elles des alternants ? La réponse est attendue en février.