Papouasie Nouvelle-Guinée:la biodiversité du Sepik, menacée par les excavatrices

Le fleuve Sepik est l'artère principale qui donne vie à toute cette région. Fred Hess, le PDG de PanAust: « notre motivation principale, ce sont les retombées économiques que la mine va apporter aux villages, en termes de santé et d'éducation ».
En Papouasie Nouvelle-Guinée, l'une des dernières zones naturelles intactes de la planète va être exploitée. Il s'agit du bassin du fleuve Sepik, sous lequel sommeille l'un des 10 plus grands gisements de cuivre et d'or du monde. 
Le fleuve sinue sur 1100 km avant de se jeter dans la mer sur la côte nord du pays. En amont, là où le fleuve Frieda se jette dans le Sepik, la compagnie minière chinoise PanAust et son partenaire à 20%, l'entreprise australienne Highlands Pacific, veulent ouvrir une mine.  
Mais le fleuve est aussi le berceau d'une biodiversité exceptionnelle, bien connue du biologiste Tim Flannery. L'explorateur australien a découvert 16 nouvelles espèces de mammifères en Papouasie Nouvelle-Guinée. 
« J'ai passé une décennie à arpenter cette région du Sepik, pour recenser sa faune, et j'ai pu prouver que cette zone est l'une des plus riches en espèces de mammifères de toute l'Australasie**. Du point de vue biologique, franchement, c'est le pire endroit pour développer une mine de cuivre. »


La joint venture PanAust - Highlands Pacific proposent de mettre en place une nouvelle forme de stockage des déchets - à la fois des résidus miniers et des roches extraites pour accéder aux minerais. Les déchets seraient noyés sous une lame d'eau. 
La méthode reste risquée, d'après Gavin Mudd, professeur en ingénierie environnementale à l'université Monash de Melbourne: « Ils vont déjà déterrer 2.7 milliards de tonnes de minerai d'or et de cuivre. Mais en plus il faut ajouter plusieurs millards de tonnes de déchets rocheux, c'est donc une mine à très très grande échelle et naturellement l'exploitation s'accompagne d'un risque environnemental à très grande échelle également. » 
Le Sepik est une région à risque sismique, les digues des bassins de rétention pourraient se rompent. Et comme le climat est tropical, le Sepik reçoit de fortes pluies. Il est possible que les bassins de rétention des déchets miniers, déjà recouverts d'eau comme le prévoit la procédure, se mettent à déborder avec l'eau de pluie, et contaminent le réseau fluvial avec des acides et des métaux lourds. C'est le problème auquel sont confrontés les Salomonais avec la mine de Gold Ridge, aux Îles Salomon. 

 
PanAust et Highlands Pacific projettent d'exploiter l'or et le cuivre à Frieda River. (Illustration: Highlands Pacific)
« La plus grande partie des déchets sont inoffensifs, affirme Fred Hess, le PDG de PanAust. Et notre but est de nous assurer que l'eau qui déborde est d'une qualité acceptable. (…) Il y aura du cuivre dissous dans cette eau, et nous devrons donc traiter l'eau avant de la stocker dans le centre de stockage. Et il sera très facile de respecter les standards les plus stricts sur la qualité des eaux rejetées. » 
Mais ces assurances butent sur le scepticisme de Tim Flannery. « L'impact des grandes mines en Mélanésie n'est pas franchement positif, rappelle le biologiste australien. On a eu la mine de cuivre de Bougainville, la première, qui a causé d'énormes dégâts environnementaux dans les rivières. Vous pouvez voir ça sur Google Earth. Même chose pour la mine d'OK Tedi sur le fleuve Fly (au sud-ouest du pays, NDLR), là encore, les dégâts sont visibles sur Google Earth, ils sont énormes, et personne le nie. » 
PanAust déposera une demande de permis d'exploitation auprès du gouvernement papou d'ici la fin juin. 
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**L'Australasie est la zone qui comprend l'Australie, la Nouvelle-Zélande, l'île de Nouvelle-Guinée, et les îles du Pacifique voisines.