SANTÉ. Pharmaciens, infirmiers et médecins de Lifou espèrent du changement dans la gestion de la province des Îles

80% des clients de la pharmacie de Wé bénéficient de l'aide médicale
La province des Îles est désormais sans président. Une situation qui inquiètent les professionnels de santé de Lifou qui travaillent en libéral, alors que les retards de paiement pour le remboursement de l’aide médicale atteignent des sommets : dix mois, voire un an pour certains.

La pharmacie de Wé attend depuis un an le paiement par la province des Îles de l'avance faite à ses clients dans le cadre de l'aide médicale. Environ 80% de sa clientèle en bénéficie. Une situation jugée très préoccupante par les responsables de l'établissement. Et la vacance de la présidence à la province n'est pas un facteur rassurant.

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Avance de trésorerie

"Comme nous devons avancer la trésorerie, nous ne pouvons pas le faire de façon quotidienne, explique Tiphaine Bournac, copropriétaire de la pharmacie de Wé. Enfin on le fait, mais il n'y a pas d'argent. Cela fait des mois qu'on ne se paye pas à cause de ça, qu'on essaye de payer nos employés et nos fournisseurs. En fait, on fait toujours la banque de la province des Îles. On demande à être payés, pour le travail qu'on fait au quotidien."

On [est] la banque de la province des Îles depuis un an

Tiphaine Bournac, copropriétaire de la pharmacie de Wé, à Lifou

Gwénaelle et Mélodie sont infirmières libérales à Lifou. Elles interviennent en complément du service de soins infirmiers à domicile mis en place par la province. Un service qui ne prend pas les patients en charge le week-end et les jours fériés. Depuis deux ans, le problème du règlement des factures concernant l'aide médicale est récurrent, et les a obligé à prendre certaines décisions.

"On ne tourne qu'à deux sur le cabinet. Et depuis juillet, on n'accepte plus les aides médicales, malheureusement, parce qu'on n'a pas envie d'une médecine à deux vitesses, dénonce Mélodie Pertuisel. On nous y oblige. Mais si [on accepte], on ne peut pas se payer, ni l'essence, ni le matériel, et on ne peut rien faire."

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Les priorités ? "L'éducation et la santé"

"Pour moi la priorité de la province, ça devrait être l'éducation et la santé, assume Gwénaelle Goulard. Parce que ces deux bases créent une population qui peut s'élever, en bonne santé."

Frédéric Ballanger est médecin généraliste. Il compte dix mois d'impayés et a eu recours à la procédure judiciaire de mandatement d'office, par le biais du haut-commissaire, pour récupérer le règlement de ses factures.

"Le déficit financier de la province ne va pas se combler instantanément, donc ça va prendre du temps avant qu'on retourne à l'équilibre, avec des paiements réguliers. On espère avoir une équipe [à la tête de la province] qui soit à l'écoute de nos projets de faire du travail de qualité au niveau médical, d'améliorer la santé et la logique des soins pour la population de Lifou."

Privée de présidence, la province des Îles dit régler les affaires courantes. Le paiement des arriérés de l'aide médicale en ferait partie. Ce jeudi 5 décembre, les orientations budgétaires n'ont finalement pas été examinées.

Le reportage de Nicolas Esturgie :

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