La dengue est-elle en passe d'être éradiquée à Nouméa et dans l'agglomération du Grand Nouméa ? S'il est trop tôt pour crier victoire, aucun cas n'a été recensé, depuis juillet 2021, dans le Grand Nouméa. Et dans le même temps, la proportion de moustiques Aedes aegypti porteurs de la Wolbachia, bactérie qui inhibe la transmission de ce virus, s'est considérablement accrue.
Un seul cas de dengue depuis le début de l'année
Selon les chiffres de la Direction des affaires sanitaires et sociales, un seul cas de dengue a été confirmé, depuis début 2022, en Nouvelle-Calédonie, à Poindimié. A titre de comparaison, en 2021, 52 cas de dengue été enregistré à Nouméa, 20 à Dumbéa, 15 au Mont-Dore et 14 à Païta. Encourageants, ces chiffres sont toutefois à nuancer.
"La méthode Wolbachia a certainement contribué à réduire le nombre de cas de dengue en 2020 et en 2021. La circulation restreinte des populations a également permis de préserver le territoire de l’introduction d’un nouveau sérotype de dengue. Les derniers cas de dengue recensés étaient de type 2. Ce même sérotype ayant été responsable de deux épidémies récentes, on peut supposer qu’une partie de la population est immunisée", explique Nadège Rossi, cheffe du projet World mosquito program en Nouvelle-Calédonie.
"Il est donc difficile de faire une évaluation précise dans ces conditions particulières. Avec le retour à une circulation normale des populations, la prochaine saison chaude pourrait permettre de mesurer plus finement l’impact de cette méthode sur les épidémies de dengue", fait valoir Nadège Rossi.
Une implantation réussie sur Nouméa
Fin mars, 70 pièges ont été installés dans l'ensemble des quartiers de Nouméa et 1 500 moustiques de l'espèce responsable de la transmission de cette arbovirose ont été capturés. Parmi eux, 80% se sont révélés porteurs de la Wolbachia, ce qui confirme "l’installation réussie de cette méthode de lutte biologique contre la dengue à Nouméa", estime le World mosquito program.
Si une courte période supplémentaire de lâchers pourrait encore avoir lieu à Nouméa et à la Vallée-du-Tir, lors de la prochaine saison chaude, pour encourager la fin de l'installation de ces moustiques, les résultats sont probants. "Il est très encourageant de voir que, neuf mois après l’arrêt des lâchers de moustiques, une très forte proportion de moustiques porte Wolbachia. Nous espérons ainsi nous prémunir de futures épidémies de dengue à Nouméa", poursuit Nadège Rossi.
40% des moustiques porteurs de la Wolbachia au Mont-Dore et à Dumbéa
Des lâchers de moustiques ont débuté à Dumbéa et au Mont-Dore, en janvier, et début mai, 40% des Aedes aegypti de ces deux communes étaient porteurs de la Wolbachia. "L’objectif est d’atteindre 50 % des moustiques porteurs de Wolbachia fin juin. Pour consolider l’installation des moustiques porteurs de Wolbachia sur certains secteurs, nous allons procéder, durant le mois de juin, à des lâchers de moustiques adultes en complément de l’installation des pots", précise la cheffe de projet.
Si tout se passe bien, la progression du pourcentage de moustiques porteurs de Wolbachia devrait se faire naturellement et rapidement lors de la prochaine saison chaude
Nadège Rossi, cheffe du projet World mosquito program en Nouvelle-Calédonie
Des moustiques porteurs de la bactérie doivent encore être déployés à Nakutakoin, Katiramona, Dumbéa, Saint-Louis, La Coulée, au Vallon-Dore, au Mont-Dore Sud et à Plum.
Un programmé déployé dans 11 pays
Le World mosquito program a été initié par l'université Monash, en Melbourne, en Australie. L'inoculation de la Wolbachia a des moustiques ensuite relâchés dans la nature et qui se reproduisent avec les moustiques sauvages. La bactérie qui inhibe la transmission des arboviroses tels que la chikungunya, la dengue, la fièvre jaune et le zika est ensuite transmise aux générations suivantes d'Aedes aegypti. Après des années de recherches et de développement en laboratoire, cette méthode a été déployée dans onze pays d'Asie, en Amérique latine et dans le Pacifique.
En Nouvelle-Calédonie, ce programme a été mis en œuvre en partenariat avec le gouvernement, l'Institut Pasteur et l'université de Monash et les communes de Nouméa, du Mont-Dore et de Dumbéa. Pas moins 94% des habitants de Nouméa et 91% des habitants de Dumbéa et du Mont-Dore ont approuvé son déploiement.