C’est une peine qui pose toujours énormément de questions : la réclusion criminelle à perpétuité. Elle a été infligée par la cour d’assises de Nouvelle-Calédonie la semaine dernière, à l’encontre d’un homme qui avait tué ses enfants. Décryptage.
La réclusion criminelle à perpétuité, assortie de vingt-deux ans de peine de sûreté: telle a été la condamnation prononcée la semaine dernière, en Calédonie,
à l'encontre d'un père infanticide. Va-t-il rester en prison jusqu’à la fin de ses jours ? Que signifie la notion de peine de sûreté? Et pourquoi certains condamnés à de longues peines font-ils le choix de demander un transfert vers un établissement pénitentiaire de Métropole ?
Selon la nature du crime
«La réclusion criminelle à perpétuité peut effectivement être une mesure de prison à vie», répond Christian Pasta, avocat général.
«C’est une peine qui, en réalité, va dépendre de la nature du crime qui a été commis, précise ce magistrat du Parquet.
Des meurtres sur des mineurs de quinze ans, accompagnés d’actes de barbarie ou de violences graves: on a la possibilité de prononcer ce que l’on appelle la perpétuité réelle. C’est-à-dire qu’il n’y ait pas de possibilité, pour le condamné, de sortir avant une période qui est quasiment illimitée.»
Trois périodes
Trois périodes de sûreté sont possibles : dix-huit ans, 22 ans, trente ans. Une période pendant laquelle le condamné ne peut pas bénéficier d’une quelconque mesure d’aménagement de peine. Dans la perpétuité réelle, la situation du détenu peut évoluer au bout de trente ans.
«Il peut demander à être relevé de cette période de sûreté illimitée par une saisine du juge de l’application des peines, détaille Christian Pasta.
Lui-même va saisir des experts, qui vont se prononcer sur la dangerosité, ou pas, du condamné. C’est ensuite cinq magistrats de la cour de cassation qui vont décider si il y a lieu d’accorder ou pas les mesures d’aménagement de peine.»
Rarement prononcée
En fait, la période de sûreté illimitée est rarement prononcée.
«Un condamné qui se verrait infliger une peine perpétuelle réelle n’aurait plus rien à perdre, souligne l’avocat général.
L’ordre à l’intérieur des établissements pénitentiaires serait très difficile à maîtriser. Quelqu’un sachant qu’il ne sortira jamais de prison peut tout tenter pour essayer d’en sortir.»
Les objectifs de la prison
«L’espoir d’une sortie possible avant la fin de ses jours répond à une question de sécurité, renchérit Franck Royanez, bâtonnier du barreau de Nouméa.
Une peine de prison répond à trois objectifs sociaux. D’une part réparer le sentiment d’injustice pour les victimes. D’autre part, ramener la paix sociale. Et puis tient compte, aussi, de considérations humaines.»
Au Camp-Est ou en Métropole
Au Camp-Est, la centrale héberge les personnes condamnées à de longues peines. Le détenu peut aussi demander un transfert vers la Métropole.
«La raison la plus commune, c’est en vue de leur réinsertion, précise le bâtonnier Franck Royanez.
Il y a des centres de formation en Métropole dont on ne dispose pas nécessairement en Nouvelle-Calédonie. Etant précisé que le nombre de places disponibles en Métropole, aussi bien en milieu carcéral que dans ces centres de formation, est très réduit en réalité. Il est difficile d’obtenir un transfèrement pour cette raison-là.»
Peu de retours
Et selon le bâtonnier, en général, les transferts se font dans un sens. Car très peu de personnes, à l’issue du temps de détention, demandent un retour en Calédonie.