Mercredi matin, Iluminado Candasua a apporté trois spécimens vivants dans un gobelet en plastique fermé hermétiquement. "Il est très difficile de capturer les moustiques", a-t-il confié à l'AFP, expliquant qu'il avait stratégiquement choisi pour piéger les insectes une caserne de pompiers. En récompense, il a reçu un peso, soit deux francs Pacifique, qu'il mettra dans une tirelire pour économiser en vue de l'achat d'un téléphone portable à son enfant.
Le projet a été lancé par Carlito Cernal, chef du village d'Addition Hills, à l'est de la capitale. Il estime que son idée peut avoir un "impact énorme" sur le ralentissement de la dengue, même si les autorités sanitaires et experts interrogés par l'AFP restent dubitatifs.
L'Organisation mondiale de la santé (OMS) a classé les Philippines comme le pays le plus touché par la dengue dans la région du Pacifique occidental en 2023, avec 167.355 cas et 575 décès recensés. L'archipel a connu une "augmentation inhabituelle" du nombre de cas cette année, avec 28.200 patients enregistrés au 1er février, soit une augmentation de 40% par rapport à la même période de l'année dernière.
Cette maladie tropicale, parfois mortelle, se manifeste par des symptômes allant de la fièvre et des maux de tête à l'enflure des ganglions. Elle circule d'ailleurs activement en Polynésie actuellement.
Quel impact ?
Mercredi, le Dr Domingo a indiqué à l'AFP qu'il était important que les communautés locales consultent les autorités sanitaires avant de lancer des actions ad hoc, ajoutant que la meilleure façon de traiter le problème était de "revenir aux fondamentaux". "Plus tôt nous nettoierons notre environnement et toutes les zones où l'eau stagnante s'accumule, mieux nous pourrons lutter contre la dengue", a-t-il déclaré, exhortant les habitants à se protéger avec insectifuges et manches longues.
Anthony Leachon, expert en santé publique,salue toutes les initiatives de lutte contre la dengue, mais la campagne locale d'Addition Hills n'aurait à ses yeux "que peu ou pas d'impact du tout". Certains habitants pourraient même exacerber le problème en élevant des moustiques pour gagner de l'argent, a avertu l'expert.
Rachel Estoque a quand même tenté le coup. Cette femme au foyer de 45 ans a expliqué à l'AFP qu'elle s'était levée tôt pour attraper des larves de moustiques qui se développaient dans l'eau de son pot de fleurs. Les 20 larves lui ont rapporté quatre pesos, soit l'équivalent d'une toute petite bouteille d'huile de cuisine. Comme d'autres personnes qui attendaient de pouvoir échanger leurs prises, Mme Estoque a déclaré que l'argent était moins important que le principe en jeu.