Ahitini utilise ChatGPT pour rythmer sa vie comme pour l'aider à l'école. "Je mets mon cours dessus, je lui demande de me faire un quiz, ça me permet de retenir en quinze minutes quelque chose que j'aurai pu retenir en lisant pendant peut-être deux heures. Il ne faut pas l'utiliser bêtement. C'est un outil qui permet d'aller vite" témoigne-t-il. Récemment, le géant chinois Deepseek a fait son apparition et vient directement concurrencer ChatGPT offrant les mêmes possibilités d'échanges.
Un outil pour les étudiants...
Emilie, lycéenne en classe de cinéma a elle aussi recours à des IA génératives. "En cinéma, on l'utilise pour écrire des scénarios. Sur cette base, on voit ce qui ne va pas et on peut lui redemander de changer. Ça aide beaucoup et ça nous donne des idées" livre-t-elle.
De son côté, Matauhere a remarqué des failles. Il a essayé d'utiliser Chat GPT dans le cadre de sa formation en classe de Reo Tahiti. "Leurs traductions du tahitien sont toutes fausses. Du coup ça ne sert à rien pour l'aspect tahitien. Je fais à la manière traditionnelle : je vais lire des livres et je fais des recherches moi-même" dit-il.
En fonction des matières, les IA se révèlent donc plus ou moins utiles. La professeure d'anglais en charge du blog numérique du lycée Paul Gauguin en tire partie pour certains projets pédagogiques, même si elle prône un usage raisonné. "Par exemple là on est partis sur un concours photo par rapport à la St Valentin. On a demandé à ChatGPT ou autre de générer des photos qu'on a utilisées (...)" explique-t-elle. En revanche, "rédiger à leur place cela n'a pas de sens. Au départ, je pensais que l'IA allait remplacer l'expression écrite donc j'étais réticente mais je vois des applications qui deviennent vraiment intéressantes. Donc le but, c'est de leur apprendre comme on utilise ça."
Selon une étude menée en interne par l'Université Paris Dauphine-PSL, 78% des jeunes considèrent l'IA comme un gain de temps et un étudiant sur deux utilisent les intelligences artificielles génératives, c'est-à-dire des systèmes capables de générer du texte, des images, des vidéos ou d'autres médias en réponse à des requêtes.
Comme pour les professionnels
Midjourney permet par exemple de créer des scénarios, comme le suggère Emilie. Et les jeunes ne sont pas les seuls utilisateurs. L'outil s'est démocratisé dans le secteur de l'audiovisuel au fenua. Nyko PK16 en est l'exemple. Mais il tient à son éthique. "Je le dis [à mes clients ou mes collaborateurs, ndlr] quand c'est fait par Midjourney, ou que c'est fait par une intelligence artificielle et moi" rassure le producteur-réalisateur qui a reçu un prix au FIFO 2025.
L'usage se répand à Tahiti. De plus en plus de publicités sont générées grâce à l'IA. Mais le phénomène n'est pas au goût de tous. Certains professionnels le voient comme une menace pour les métiers de mannequins, de photographes, ou encore d'infographistes. Le producteur et réalisateur Heiano Alezrah lui, s'en passe volontiers. "Je ne sais pas utiliser. Il y a ChatGPT parfois. Mais utiliser des ordinateurs pour créer des visages polynésiens : non. Je préfère shooter de vraies personnes. Je ne pense pas pour le moment me lancer à fond dans l'IA. À ce moment-là je serai déjà en train de faire ma roulotte" lâche-t-il avec humour.
HeyGen est une autre IAG qui peut créér des doubles numériques. Elle pourrait faire parler Moetai Brotherson en russe par exemple. En fonction des intentions des utilisateurs, ce type d'IAG peut s'avérer très dangereux et les autorités du fenua sont en alerte. Une cellule a même été créée au sein de la DTPN pour lutter contre la cybercriminalité. Mais les moyens du Pays sont insuffisants face aux rapides évolutions de l'IA.
Pour l'heure, aucune réglementation n'existe à Tahiti. Mais les droits d'auteur ou d'image permettent déjà de se protéger contre l'intelligence artificielle.
L’intelligence artificielle est apparue dans les années 50 avec les premières machines. Le but : imiter les capacités intellectuelles d’un humain. Mais ces dernières années, elle progresse de manière fulgurante avec l’avènement du numérique. Dans un article du 03 février, le journal Le Monde se demande "jusqu'où ira l’intelligence artificielle ?" et propose un état des lieux complet sur le sujet.
Emmanuel Macron à la télé pour parler de l'IA en marge du Sommet
Quoi qu'il en soit, l'intelligence artificielle s'impose désormais dans la société. Un sommet international s'ouvre au Grand Palais lundi. Le président de la République Emmanuel Macron a accordé une longue interview après le 20 heures de France 2 à ce sujet, à la veille du Sommet de Paris sur cette technologie qui doit réunir dirigeants politiques et chefs d'entreprise. Il a notamment annoncé un investissement en France de "109 milliards d'euros dans les prochaines années".
L'interview a été diffusée sur Polynésie la 1ère à partir de 9h30 dimanche 09 février.
Par ailleur, le fonds canadien Brookfield va investir 20 milliards d'euros en France d'ici 2030 pour permettre notamment le développement de data centers, a appris l'AFP, confirmant ainsi une information de La Tribune Dimanche.