L'Azerbaïdjan est au cœur d'une polémique depuis plusieurs mois en Nouvelle-Calédonie, après la signature d'un mémorandum avec le Parlement de ce pays par une élue UC-FLNKS. Ce partenariat avait été critiqué par les partis non-indépendantistes du Caillou. Le ministre français de l'Intérieur, Gérald Darmanin, avait d'ailleurs dénoncé avant Valls "l'ingérence extrêmement néfaste" de l'Azerbaïdjan.
Un partenariat qui se renforce
Quelques jours après cette affaire, le 30 avril 2024, des représentants Tavini signaient à leur tour un mémorandum avec le Groupe d'Initiative de Bakou, un organisme international créé par le gouvernement d'Azerbaïdjan pour lutter contre le "colonialisme français". Un mois après, des cadres du parti indépendantiste polynésiens étaient de nouveau en Azerbaïdjan pour une conférence sur le "droit à la décolonisation".
Ces voyages dans un pays avaient suscité de vives réactions de la part de l'opposition au fenua, L’Azerbaïdjan figurant parmi les régimes les plus autoritaires et les plus répressifs au monde.
Samedi, dans un entretien accordé au quotidien Ouest France, le nouveau ministre des Outre-mer Manuel Valls a réitéré ces inquiétudes sur l'ingérence de l'Azerbaïdjan.
Je veux dénoncer fermement les opérations d’ingérence et de déstabilisation de l’Azerbaïdjan dans nos territoires d’outre-mer. Elles méritent une condamnation unanime de tous.
Manuel Valls, ministre des outremersOuest-France
Enjeux du Front international de décolonisation
Ses propos interviennent alors que se tenait, jeudi et vendredi, un congrès réunissant des représentants de mouvements indépendantistes ultramarins en Nouvelle-Calédonie. Le 24 janvier, ce congrès a mené à la création du Front international de décolonisation (FID) dont le Tavini Huiraatira est membre, révèle l'Agence France Presse.
Le FID entend notamment "obtenir le statut de membre observateur du Mouvement des non-alignés, ainsi que l'inscription de la Martinique, de la Guadeloupe, de la Guyane et de la Corse sur la liste des pays à décoloniser de l'ONU".
Suite à la création du Front, Abbas Abbasov, directeur exécutif du Groupe d'Initiative de Bakou a publié une vidéo de soutien contre la France.
Si les Ultramarins indépendantistes se réjouissent de ce nouveau partenariat, l'opposition s'en inquiète.
L'Azerbaïdjan n'est pas du tout un pays de liberté bien au contraire. L'Azerbaïdjan se sert des partis trop indépendantistes pour "se venger de la France".
Tepuaraurii Teriitahi, représentante Tapura à l’Assemblée de Polynésie
Pour l'élue Tapura, les propos de Manuel Valls fustigeant l'ingérence de l'Azerbaïdjan en Outre-mer sont donc rassurants. "On est très heureux de cette réaction de la France qu'on attendait. Il était temps. Cela fait plusieurs mois qu'au niveau de l'Assemblée de Polynésie, nous alertons nos collègues du Tavini sur ces nombreux déplacements qu'ils font en Azerbaïdjan et sur le profil de ce pays. (...) C'est un moyen qu'a trouvé l'Azerbaïdjan pour faire de l'ingérence dans les affaires de la France. De la même façon, nous avons toujours considéré que l'ONU n'avait pas sa place dans le dialogue de décolonisation, à notre sens. S'il faut qu'il y ait un dialogue sur l'indépendance ça doit se faire entre la France et le pays d'outre-mer qui le demande mais pas avec un intervenant extérieur" a déclaré Tepuaraurii Teriitahi, en direct dans notre journal radio ce dimanche matin.
Contexte national
Depuis des mois, Paris accuse Bakou d'"ingérence" et de manipulation sur la Nouvelle-Calédonie et plus généralement sur ses territoires d'Outre-mer, dans un contexte de tensions entre les deux capitales en raison du soutien de la France à l'Arménie, rival historique de l'Azerbaïdjan.
"La France est attaquée et humiliée par le régime de Bakou qui organise des sommets internationaux sur son sol et contre elle", a déploré sur X le député calédonien Nicolas Metzdorf, demandant la convocation de l'ambassadrice d'Azerbaïdjan en France.
Le ministre des Affaires étrangères Jean-Noël Barrot a quant à lui dénoncé des "tentatives vaines menées par l'Azerbaïdjan dans nos territoires" ultramarins, appelant à ce qu'elles cessent "immédiatement", à l'unisson de son collègue des Outre-mer Manuel Valls.