À bientôt 82 ans, Roland Delacour est en bonne santé. Il se considère comme un chanceux. Cela n'a pas été le cas pour son meilleur ami, avec qui il a participé à plusieurs campagnes de tirs en Polynésie française. Il est mort d'une double tumeur au cerveau, attribuée aux expositions.
"Je suis là pour témoigner. Donc je suis à disposition pour faire état de mon expérience."
Roland DELACOUR - Ancien marin à Mururoa
Roland Delacour vient participer à la table ronde organisée autour des vétérans des essais nucléaires, réalisés par la France en Polynésie française entre 1966 et 1996. Les témoignages de ces militaires sont précieux.
"Comment ces personnels ont-ils participé et vécu les essais nucléaires qui, pour beaucoup d'entre eux, leur ont laissé des dommages corporels malheureusement irréversibles. Les écoutez est donc, pour nous, la moindre des choses que nous puissions faire, dans le cadre de cette commission d'enquête" déclare Didier Le Gac, le président de la commission d'enquête relative aux conséquences des essais nucléaires en Polynésie française.
Le 24 août 1968, Roland Delacour, alors second maître, a assisté à l'opération Canopus. C'est le nom de code pour le premier test de la bombe H, réalisé par la France. Roland Delacour était à bord d'un bateau, qui accompagnait le porte-avions Clémenceau.
"Sur ce bateau, comme sur tous les bateaux de la Marine, l'eau de mer était partout. L'eau de mer qui pouvait être éventuellement contaminée. Ainsi que les systèmes d'air qu'il y avait à bord, c’est-à-dire le conditionnement d'air" raconte Roland Delacour, assis à la table ronde de la commission d'enquête.
"En 1968, on n’a pas été spécialement informés des risques encourus, d'ailleurs, pas du tout."
Roland Delacour - ancien marin à Mururoa
Roland Delacour milite aujourd'hui pour la déclassification des documents relatifs aux essais nucléaires en Polynésie française. "Faut faire éclater la vérité. Il y a eu des manquements, pour ne pas dire des erreurs. Des expériences qui ont eu des ratés, il y en a eu. Y en a une notamment, en 1974, qui a touché Tahiti. Et à Tahiti, il y a des gens qui ont été certainement irradiés et dont aujourd'hui, on se demande si les enfants ou les petits-enfants ne sont pas victimes de ces errements" argumente-t-il.
Au total, Roland Delacour a assisté à trois campagnes de tirs en Polynésie française. Il est membre de plusieurs associations qui se battent pour la reconnaissance et l'indemnisation des victimes des essais nucléaires menés par la France.
À noter que ce mardi 21 janvier dans la nuit, le Sénat a adopté un amendement déposé par Teva Rohfritsch et Lana Tetuanui, pour prolonger de trois ans le délai de dépôt des dossiers au CIVEN des ayants droits de victimes décédées avant 2019. Ce délai devait arriver à échéance le 31 décembre 2024, il a donc été prolongé jusqu'en 2027.