Reconstruction de Mayotte : "On attend du concret", dit le président du Conseil départemental de Mayotte, en déplacement à Paris

Le président du Conseil départemental de Mayotte, Ben Issa Ousseni, au ministère des Outre-mer, le 24 novembre 2023.
Ben Issa Ousseni a rencontré plusieurs élus et représentants de l'État dont le ministre des Outre-mer Manuel Valls et celui de l'Intérieur Bruno Retailleau. Selon lui, la loi d'urgence pour la reconstruction de Mayotte, actuellement débattue au Parlement, est nécessaire, mais incomplète.

Plus d'un mois après le passage dévastateur du cyclone Chido sur Mayotte, l'heure est à la reconstruction. Tandis que les élèves doivent retourner à l'école la semaine prochaine, l'Assemblée nationale se penche sur l'examen de la loi d'urgence pour la reconstruction de l'archipel, qui vise entre autres à assouplir les réglementations pour accélérer les procédures.

Le président du Conseil départemental de Mayotte, Ben Issa Ousseni, est en déplacement dans l'Hexagone depuis la semaine dernière. Il a rencontré plusieurs ministres, dont celui des Outre-mer, Manuel Valls, et celui de l'Intérieur, Bruno Retailleau. Il a accordé un entretien à Outre-mer la 1ère.

Outre-mer la 1ère : De nombreuses familles ont décidé d'envoyer leurs enfants poursuivre leur scolarité à La Réunion ou dans l'Hexagone. Comment les accompagnez-vous ?

Ben Issa Ousseni : Nous travaillons avec la région Île-de-France pour pouvoir accueillir des élèves qui souhaitent notamment venir passer leur bac ici. On en est encore au stade de travail, mais on croit qu'on va pouvoir concrétiser ça très prochainement.

On travaille aussi avec le ministre des Outre-mer, via le dispositif de continuité territoriale, sur une aide qui pourra être mise en place pour accompagner les élèves qui veulent continuer leurs études ici.

Qui prendra en charge les coûts induits par ce déplacement ?

Ce que nous souhaitons, c'est qu'il y ait une prise en charge [de l'État] au niveau du billet d'avion. Bien sûr, il y aura aussi une participation des familles et le Conseil départemental viendra compléter les offres qui seront proposées.

Vous êtes venu à Paris pour plaider la cause de Mayotte . Considérez-vous que l'État est au rendez-vous ?

On est dans l'attente. Il y a eu beaucoup d'annonces. Maintenant, on attend du concret. Les Mahorais veulent la traduction concrète de ces annonces sur le territoire. Ils veulent être accompagnés pour reconstruire leurs logements. Ils veulent être accompagnés pour pouvoir s'approvisionner en nourriture. Ils veulent que la rentrée scolaire puisse se faire. Effectivement, nous attendons beaucoup la traduction concrète sur le terrain des annonces du gouvernement jusque-là.

Aujourd'hui, clairement, la reconstruction de Mayotte doit se mettre en place. Mais nous, avant tout, on souhaite que Mayotte soit reconstruite autrement. On ne peut pas reconstruire Mayotte si la problématique des bidonvilles n'est pas au centre du projet. Et ce n'est pas forcément le cas. La lutte contre l'immigration, la lutte contre les bidonvilles doivent être une priorité.

Êtes-vous confiant ?

C'est nécessaire. Mais on est beaucoup plus vigilants que confiants en ce moment. Encore une fois, tant qu'on n'a pas vu le déploiement des aides promises sur le territoire, on ne peut pas dire qu'on est rassurés.

Vous estimez que la loi d'urgence pour la reconstruction de Mayotte, actuellement examinée par le Parlement, est "nécessaire mais incomplète". Que manque-t-il ?

Toute la partie sur l'immigration. Qu'est-ce qu'on fait ? Quelles sont les mesures qu'on prend pour contrôler les entrées irrégulières sur le territoire ? C'est nécessaire. On ne peut pas reconstruire Mayotte sans régler ce problème de l'immigration que nous connaissons aujourd'hui. On ne sait même pas combien nous sommes sur le territoire. 

On nous a aussi annoncé une zone franche d'activité. On aurait aimé savoir comment est-ce qu'ils comptent la déployer. On ne le retrouve pas clairement dans cette loi. Et il manque aussi toutes les mesures d'aide aux collectivités pour reconstruire ne serait-ce que leurs locaux et pour pouvoir assurer pleinement leur mission de service public dans les meilleures conditions.

Le sénateur Saïd Omar Oili demande le lancement d'une commission d'enquête sur la gestion de la crise liée à Chido. Y êtes-vous favorable ?

C'est son choix. Moi, je le dis : il y a un travail qui a été fait. Si on juge que ce travail-là n'a pas été complet, il est normal de demander une commission d'enquête. Mais moi, je suis de ceux qui croient qu'il y a un gros travail qui a été fait en amont et aussi après. Il peut y avoir effectivement quelques manquements ici et là, je ne dis pas que tout a été parfait, mais j'ai vu qu'il y avait un gros travail de préparation. Le cyclone qui a attaqué Mayotte était dévastateur. Est-ce qu'on pouvait être mieux préparés ? Je ne peux pas répondre à cette question.