ILEVA : projet d’incinérateur, une stratégie obsolète pour les écologistes

Enfouissement et incinération ne doivent pas être les piliers de la politique de gestion des déchets à La Réunion pour Europe Ecologie Les Verts et Génération Ecologie. A la veille de l’enquête publique sur le projet d’incinérateur d’ILEVA, les écologistes montent au créneau.
Du 26 octobre au 27 novembre, aura lieu l’enquête publique sur le projet de pôle multi-filières des déchets d’ILEVA dans le Sud, à Pierrefonds, qui inclut une usine de tri et une usine d’incinération des déchets, et sur la demande d’autorisation environnementale qui l’accompagne.

Europe Ecologie Les Verts et Génération Ecologie ont tenu une conférence de presse ce vendredi pour alerter sur ce projet. Les deux partis écologistes sont aussi revenus sur ce qu’ils appellent le " fiasco  de la gestion des déchets à La Réunion ".


Un projet à 300 millions d’euros

Le syndicat mixte ILEVA traite l’ensemble des déchets non dangereux produits sur les territoires du TCO, de la CIVIS et de la CASUD. 15 communes sont ainsi concernées, de La Possession à Saint-Philippe, soit 60% des déchets de l’île de La Réunion.

Trois entités de traitement, pour un montant de 240 millions d’euros sont prévues. D’autres unités devront intervenir ensuite pour traiter les résidus de l’incinération, elles devraient se chiffrer à 53 millions d’euros, soit un total de près de 300 millions d’euros.

Jean-Pierre Marchau, secrétaire régional d’Europe Ecologie Les Verts, précise que le coût d’exploitation de ces installations est d’environ 10 millions d’euros par an, ce qui signifierait que la taxe des ordures ménagères pourrait " exploser ".Pour les deux organisations, c’est le moment d’alerter l’opinion sur le projet qui est en train de se mettre en place, et de dresser le bilan sur la gestion des déchets.

Il faut dire que le sujet manque bien souvent de visibilité pour le grand public. Ce grand public est pourtant appelé à s’exprimer durant un mois.
 

20 ans d’errance à La Réunion

Jean-Pierre Marchau, d’EELV, suit ce dossier depuis plus de 20 ans. La question de l’incinération des ordures ménagères était déjà dans les tuyaux, lors de la présentation d’un premier plan déchets par le Département en 2021, alors en charge de la compétence des déchets. Le projet avait été retiré suite à une action citoyenne d’une association créée par Jean-Pierre Marchau.

L’incinération avait ensuite disparue du second plan déchets du Département, rejeté en 2010 par le préfet de La Réunion, lui demandant de revoir sa copie. En 2013, un troisième plan a donc été  présenté, dans lequel l’incinération était de retour sous la forme d’un pôle multi-filière comprenant une usine de tri automatisée des déchets et un centre d’incinération.

En 2016, la Région a récupéré la compétence des déchets, mais n’a pas fait de plan déchets, selon Jean-Pierre Marchau. En 2018, Didier Robert annonçait se rallier à l’objectif " Zéro déchets ", à savoir pas d’enfouissement et pas d’incinération. Depuis, aucune délibération n’a été prise sur un plan déchets. Le plan de référence reste celui du Département de 2013.
 

L’UE opposée à l’enfouissement et  l’incinération

Depuis le 22 mai 2018, le " paquet " européen d’économie circulaire change radicalement la donne en matière de déchets en fixant des objectifs plus ambitieux que ceux qui existent en France. Il oblige notamment à la collecte des biodéchets.

Les plans régionaux de gestion des déchets doivent tenir compte de cette argumentation européenne. Ce n’est pas le cas dans l’île. L’Union européenne souhaite que tous les déchets soient réemployés, recyclés, et non plus enfouis ou incinérés. Elle prévoit aussi la réduction des subventions à l’incinérateur au titre des soutiens à l’énergie " renouvelable ".

Le projet d’ILEVA de construction d’un incinérateur ne s’inscrit donc pas dans le mouvement européen pour Jean-Pierre Marchau. Un incinérateur a une durée de vie de 30 ans. La France pourrait alors être condamnée pour des manquements sur ses plans déchets.


L’incinération, une stratégie obsolète pour les écologistes

Pour Jean-Pierre Marchau, il aurait peut-être fallu prendre au pied de la lettre le ralliement de Didier Robert en 2018, pour mettre en place le " Zéro déchets ". Le secrétaire Régional d’EELV regrette cependant que le président de Région n’ait pas mis en place ce " Zéro déchets ", qu’il n’ait pas fait de plan déchets en conséquence. Il évoque un manque de volonté politique.

Pour Emmanuel Moulouma, de Génération Ecologie, il est indispensable de mettre en place une collecte séparée des biodéchets et d’adopter une tarification incitative pour réduire les déchets des ordures ménagères. Il est aussi, selon lui, nécessaire de limiter le jetable partout où cela est possible, de faciliter l’accès à l’eau potable ou encore de favoriser les dispositifs de consigne.