Alors qu'ils ont 11 ans, la fille et les jumeaux de celle que l'on nommera Sandra auraient été agressés sexuellement par leur père. Ces violences sexuelles et psychologiques durent deux ans.
La mère de famille apprend ces faits d'abus sexuels six ans plus tard, après sa séparation avec son mari.
"Deux ans d'horreur"
La fille de Sandra, aujourd'hui âgée de 17 ans, refuse de voir son géniteur.
"Ma fille a subi des agressions sexuelles, des attouchements, raconte Sandra. Elle était obligée de prendre des douches avec lui. Il y a aussi des moments dont ma fille ne se souvient plus, parce qu'il y a la mémoire traumatique, ça efface les souvenirs", détaille la mère de famille, en colère. Les agressions ont duré deux ans.
Ses deux autres enfants, des jumeaux, ont eux aussi été agressés sexuellement par leur père. Sandra l'apprend lorsqu'elle entame des procédures en justice.
"Maman, papa m'a violé"
Sandra porte plainte contre le père de ses enfants, lorsque sa fille lui raconte les faits.
Après trois ans d'instruction, un non-lieu est prononcé. L'un des fils jumeaux tente, à ce moment-là, de se suicider. Il révèle qu'il a lui aussi été abusé par son père, de même pour son frère jumeau.
Maman, papa m'a violé.
L'un des fils de Sandra
"L'un de mes fils m'a dit : maman, papa m'a violé", déclare Sandra.
Mes enfants ont clairement été violés par leur géniteur. Il les obligeaient à faire des fellations, à regarder des scènes pornographiques et je pense que mes garçons ne m'ont pas tout livré.
Sandra, mère des enfants victimes d'inceste
"La justice est complice"
Âgées aujourd'hui de 22 et 24 ans, les victimes vivent tous les trois un traumatisme profond qui les empêche d'avoir une vie normale.
Leur mère se sent abandonnée par la justice. Malgré la plainte et un courrier de l'une des victimes, la justice n'a pour l'heure "rien fait", dit-elle. Les révélations des enfants n'ont pas abouti à l'ouverture d'une enquête, augmentant le traumatisme de la famille.
"La justice est complice de ces prédateurs sexuels !, s'insurge-t-elle. Je trouve inadmissible qu'en 2025, l'inceste soit jugé surtout en correctionnelle. Pour l'Etat, l'inceste est un délit !", s'écrie Sandra.
Voler l'enfance d'un être humain, voler toute son innocence, son présent, son futur, c'est un délit ? On est quatre victimes ignorées par la justice, parce que l'inceste n'est pas traité comme il se doit !
Sandra
Sandra estime que l'inceste doit être jugé en cour d'assises car "ce sont des vies dont on parle". Quelques années après les faits, le quotidien de la famille est aujourd'hui encore très compliqué.
J'ai quand même un fils qui a fait deux tentatives de suicide et tout le monde s'en fout, tout le monde s'en lave les mains !
Sandra
L'accusé a été innocenté deux fois par la justice.
4000 victimes par an
160 000 enfants subissent des violences sexuelles, et notamment l'inceste chaque année en France, selon la Ciivise, la Commission indépendante sur l'inceste et les violences sexuelles faites aux enfants.
À La Réunion, près de 6 000 informations préoccupantes ont été relevées en 2022.
Affaires classées sans suite
Les derniers chiffres du ministère de la justice révèlent que le nombre de condamnations pour infractions et crimes incestueux a augmenté de 100 %.
En revanche, 33 % des plaintes pour viols incestueux et 39 % des plaintes pour agressions sexuelles incestueuses ont été classées sans suite par les tribunaux en 2023.
Saïrati Assimakou l'évoque dans son livre "Lakinta et le secret d'oiseau". La présidente de l'association "Ose libérer ta parole" a été victime d'inceste durant son enfance.
Elle était l'invitée de la matinale :
Cette mère de famille, âgée de 31 ans, insiste sur la nécessité d'informer les enfants et de libérer leur parole.
Son ouvrage évoque une petite fille qui semble épanouie, pourtant victime d'inceste. "Certains signes alertent, affirme Saïrati Assimakou. Lakinta, à la base rayonnante et solaire devient timide et ne veut plus parler à ses amis, cela peut être un signe d'une situation grave qui aurait pu arriver" poursuit-elle.
Lorsque l'on distingue des faits étranges, la première chose à faire "est de discuter avec l'enfant, de comprendre ce qui ne va pas", explique Saïrati Assimakou.
Une fois qu'on recueille la parole de l'enfant, il faut l'orienter vers des structures adaptées pour le prendre en charge urgemment.
Saïrati Assimakou