Depuis son arrivée à Saint-Pierre et Miquelon à l'automne 2024, Dominic cherche un emploi, mais en vain. De nationalité irlandaise, il pouvait travailler sans restrictions dans l'Hexagone. Mais les règles dans l'archipel sont différentes et le jeune homme ne l'a découvert qu'une fois sur place, malgré des recherches préalables.
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"Je me suis renseigné avant de venir, mais j'ai eu du mal à trouver des informations en ligne. J'ai donc fini par aller poser la question à la Police aux Frontières à Toulouse. On m'a répondu que je pouvais rester à Saint-Pierre et Miquelon aussi longtemps que je le souhaitais", assure Dominic.
Permis de travail obligatoire pour tous les étrangers
Mais personne ne l'informe qu'il est soumis à des restrictions pour travailler. En tant que "pays et territoire d'Outre-mer" (PTOM), Saint-Pierre et Miquelon suit en effet des règles différentes concernant le droit du travail des étrangers. Contrairement à l'Hexagone, les ressortissants de l'espace Schengen doivent obtenir un permis de la part de la préfecture. Cette autorisation de travail dépend d'un contrat précis et c'est à l'employeur d'en faire la demande.
Les démarches de recherche d'emploi peuvent s'en trouver compliquées, comme en témoigne Amani, de nationalité canadienne. "Ça demande à l'employeur d'accepter de faire des démarches supplémentaires pour nous".
Trois semaines de délai
Une fois déposée, la demande de permis de travail est traitée en 4 à 5 jours en moyenne, selon les chiffres de la préfecture. Mais avant d'obtenir le précieux sésame, les étrangers doivent prendre leur mal en patience. Avant de recruter un ressortissant de nationalité étrangère, un employeur doit "avoir démontré qu’il a réalisé une recherche d’embauche de salariés français et que cette recherche est restée infructueuse", peut-on lire sur le site de la préfecture de Saint-Pierre et Miquelon. "Pour cela, le dépôt d’une offre d’emploi auprès de Pôle emploi pendant au minimum 3 semaines est requis."
"Les emplois sont parfois pourvus entretemps", constate Amani. En l'absence de candidature française, l'employeur doit ensuite faire une demande de permis au moins quinze jours avant la prise de poste du salarié étranger.
"J'ai cru que j'allais devoir partir"
Anticiper est donc indispensable, encore faut-il être correctement informé. Et Amani a failli en faire les frais. "Après avoir obtenu un visa, j'ai travaillé pendant trois mois à mon arrivée à l'hôtel Robert. Mais quelques semaines avant la fin de ce premier contrat, j'ai appris qu'il me fallait un autre contrat avant la fin de celui-ci pour pouvoir conserver mon visa et rester dans l'archipel."
Et qui dit nouveau contrat dit nouveau permis et nouveaux délais. "J'ai cru un moment que j'allais devoir repartir au Québec. C'était assez stressant et angoissant". La préfecture accepte finalement de lui accorder un délai d'une semaine et Amani est embauchée rapidement par le refuge pour animaux de Saint-Pierre grâce à ses qualifications. En effet, les procédures peuvent être accélérées et allégées si aucun demandeur d'emploi n'a les compétences requises pour le poste.
109 autorisations délivrées en 2024
Comme Amani, Dominic assure "comprendre la priorité accordée aux demandeurs d'emploi locaux". Mais "c'est très difficile de trouver des informations claires", déplore-t-il. "C'est un peu l'histoire de l'œuf et la poule. Que doit-on obtenir en premier, un emploi ou un permis ?".
L'enjeu est pourtant de taille, vu le faible taux de chômage et les besoins de travailleurs qualifiés dans l'archipel. Une commission réunissant parlementaires, représentants des trois collectivités et organismes comme la Cacima, France Travail, DCSTEP (Direction de la Cohésion Sociale, du Travail, de l'Emploi et de la Population) et partenaires sociaux a été créée en avril 2024. Présidée par le préfet, elle vise à fluidifier les démarches pour embaucher des étrangers dans les secteurs en tension.
En 2024, la préfecture de Saint-Pierre et Miquelon a accordé 109 permis de travail pour des salariés étrangers, contre 81 en 2023 et 64 en 2022. Les secteurs en ayant bénéficié le plus sont le secteur maritime (30 autorisations délivrées en 2024) et celui de la santé (22 autorisations délivrées en 2024).