C’est dans le local de l’Association des anciens combattants de Saint-Pierre et Miquelon que son vice-président José Garzoni nous reçoit pour évoquer d’abord ces cérémonies patriotiques qu’il ne manquerait sous aucun prétexte.
Que ce soit le 11 novembre pour commémorer l’armistice de la Première Guerre mondiale, le 8 mai pour célébrer la victoire de la Seconde ou le 18 juin pour ne pas oublier l’appel du Général de Gaulle et “le sursaut de la nation”, José est toujours présent, tiré à quatre épingles dans son costume.
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“Mais quand parle-t-on finalement des autres conflits ? ”, s’interroge-t-il en évoquant l’Indochine, l’Algérie, le Liban, la Yougoslavie ou le Mali qui ont concerné tant de militaires morts pour la France, avec ou sans zone d’ombre.
Aujourd’hui pour lui le drapeau français n’a en tout cas “peut-être pas la même signification” qu’au tournant du siècle passé, du temps de ses aïeuls.
Une histoire de famille
Son grand-père Léon s’était engagé dans la Seconde Guerre mondiale comme mécanicien sur une vedette qui protégeait les eaux françaises autour de l’archipel. Son oncle, Étienne tenait lui la popote du foyer des FNFL à Halifax (Forces navales françaises libres) quand sa tante Paule s’était envolée comme aide-soignante à New-York avant de rejoindre l’Algérie puis Toulon. “Mais tout ça, on n’en parlait finalement pas trop à la maison”, nous explique José.
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Du rêve à l’engagement
Né dans une famille de sept enfants, José était le petit dernier et peut-être aussi le plus déterminé. Depuis son plus jeune âge, il savait en tout cas exactement ce qu’il voulait faire. “J’aimais mon pays et devenir soldat, c’était mon but, mon objectif”, nous explique-t-il en évoquant ses jeux d’enfant en treillis ou en tenues de camouflage.
Depuis tout gosse, je voulais faire l’armée
José Garzoni
Pour y parvenir, il va franchir les portes de la gendarmerie à sa majorité : “J’y suis allé tout simplement et je leur ai dit, bonjour, je voudrais m’engager ! ”
C’était en 1996, quelques mois après avoir arrêté l’école au cours de sa terminale BEP administration. “C’était un 1er avril, mais ce n’était pas une blague”, ajoute-t-il malicieux en expliquant s’être alors engagé en parallèle comme livreur chez Dagort pour mettre de l’argent de côté afin de poursuivre son objectif.
Une entorse à la cheville va toutefois repousser son engagement au début de l’année 1997 lorsqu'il rejoint enfin le Mans pour y intégrer le 2ème RIMA (régiment d’infanterie de Marine).
Les classes et l’apprentissage de la discipline militaire
Sitôt arrivé dans la Sarthe au sein de son unité, José se sent tout de suite à sa place. “C’était impressionnant d’être en tenue, de voir les véhicules et de découvrir la vie en régiment”, se souvient-il.
Sur place, il rencontre aussi d’autres ultramarins venus de Polynésie, de Guadeloupe ou de Mayotte. Un “mélange culturel et social” qui lui plaît immédiatement.
Pour eux, c’est aussi une découverte. Celle de la discipline militaire avec un mot d’ordre : ”tu fais ce qu’on te dit”.
Notre premier métier, c’était femme de ménage. Frotter le carrelage avec une brosse à dents, ce n’est pas un mythe… Ça fait partie de la formation mentale.
José Garzoni
"C'est sûr que ce n'est pas le Club Med", ironise-t-il en se remémorant le déroulé d'une journée type.
Réveil à 6h du matin, petit déjeuner, puis travaux d’intérêt général et nettoyage des bâtiments jusqu’au rassemblement de la compagnie à 8h. Ensuite, place au sport avec des footings quotidiens de 10,15 ou 20km. L’après-midi est consacrée à des cours et des formations sur le terrain. José apprend aussi bien à manier l’armement qu’à reconnaître par exemple le matériel ennemi.
Le mental pour souder les frères d’armes
Pour lui, ça devient de plus en plus concret, d’autant plus que tout le monde ne tient pas le rythme imposé : “Une fois par semaine, on effectuait des bivouacs à la belle étoile et il nous fallait marcher 90 km sur deux jours avec notre paquetage de 20 kilos minimum”, nous explique-t-il.
Dans le régiment, certains ne tiennent pas le coup. Au début, ils étaient 45. À la fin, ils ne seront plus que 21. C'est la “sélection naturelle” évoquée par les instructeurs. José lui, adhère très vite à cette philosophie. “Tout est dans le mental et la résistance. Comment faire confiance à quelqu’un qui céderait à la moindre difficulté ? ”
Si quelqu’un faisait une connerie, tout le monde payait
José Garzoni
À cette époque les sévices physiques étaient encore tolérés. Il avait beau chausser du 41, il a dû porter des Rangers taille 44 pendant 3 mois.
Mais, "il y avait une véritable solidarité entre nous", insiste-t-il. "Ce n’est pas pour rien qu’on parle de frères d’armes. On a chié dans le même trou. On pouvait partir au combat ensemble."