Il y a deux semaines, le mardi 15 octobre 2024, Meggy Biodore, une Guadeloupéenne de 25 ans, est morte d'une méningite aiguë, malgré trois appels au Service d'aide médicale urgente (SAMU) du Centre hospitalier universitaire (CHU) de Montpellier, par ses proches. Ces derniers accusent les secours de ne pas avoir pris en charge à temps la jeune femme, malgré des symptômes inquiétants.
Le Parquet de Montpellier (Hérault) a ouvert, hier (lundi 28 octobre), une enquête pour rechercher les causes de la mort, après ce décès brutal.
L’Agence régionale de santé (ARS) a aussi lancé une procédure.
La mère de la victime a accepté de témoigner. Elle veut que la lumière soit faite sur les circonstances de la mort de Meggy, alors qu’il y a matière à suspicion. Un combat à mener, alors que la douleur de la perte d’un enfant est insoutenable...
Un décès brutal, qui aurait pu être évité
Une amie de Meggy a raconté les faits en détail, à nos confrères de France 3 Occitanie. C’est elle qui a pris l’initiative d’appeler le SAMU, inquiète de constater que son état de santé se dégradait, après une nuit passée à vomir, avec des courbatures, de la fièvre et des difficultés respiratoires. La jeune Guadeloupéenne est, de surcroît asthmatique.
Ces symptômes ont été décrits aux opérateurs du service d’urgence, qui se sont montrés méprisants, selon l’amie. Ils n’ont donné que des conseils basiques : prendre une douche chaude, boire de l'eau et du sucre, ou prendre du Doliprane.
Aucune ambulance n’a été envoyée sur place. Il a été conseillé aux deux jeunes femmes de se rendre à l’hôpital, par leurs propres moyens ; elles qui n’étaient pas véhiculées.
Je vois tout en blanc, je vais mourir.
Meggy Biodore, quelques heures avant de décéder – 15/10/2024.
Dans l’après-midi, Meggy s’est évanouie. Les symptômes se sont intensifiés et multipliés.
Trois heures après le premier appel au SAMU, une voiture a été trouvée ; un copain est venu les chercher.
C’est à bord de ce véhicule que Meggy est décédée, avant même d’atteindre l’hôpital, d'une méningite aiguë foudroyante.
Je suis très en colère contre eux et surtout très triste. Je veux que justice soit faite, je n’ai pas envie que ce soit oublié et que ça recommence parce que ça n’aurait pas dû arriver. Elle aurait dû être prise en charge à 15h. Elle serait peut-être encore là actuellement.
Amie de la victime
Une enquête en cours
Aujourd’hui, le SAMU ne peut qu’admettre qu’il fallait effectivement débloquer une ambulance, mais cela n’est pas systématique, explique un responsable de ce service.
Je ne dirais pas s’il fallait envoyer une ambulance ou pas, il est trop tôt pour parler de dysfonctionnement (...). Mais, en pratique, dès lors qu’il y a plusieurs appels d'un même patient, il faut être très vigilant, être attentif à chaque appel, à l'évolution et s'adapter à chaque patient (...). Contre la méningite, ce qui prime, c’est l’administration précoce d'un traitement antibiotique qui doit être pris dans une structure médicale (...). Dans le cas d’une patiente jeune, on peut penser que le traitement antibiotique aurait été efficace.
Louis Soulat, vice-président Samu - Urgences de France
La méningite, maladie qui évolue très vite, est mortelle dans 10 à 15% des cas.
Le Parquet a ouvert une enquête judiciaire.
La famille de la victime se tient aussi prête à porter plainte, contre les pompiers et le Samu 34, notamment pour non-assistance à personne en danger.
L’ARS a, elle, lancé une mission d’inspection sur les conditions de prise en charge de la jeune montpelliéraine, le jour du drame.
Le régulateur du SAMU, qui a refusé d’envoyer une ambulance au domicile de la victime, a depuis été suspendu.
Une famille anéantie
Meggy Biodore était juriste dans les services de ville de Montpellier ; son premier poste. Baccalauréat en poche, un diplôme décroché au lycée Charles Coeffin de Baie-Mahault, elle a quitté la Guadeloupe il y a 5 ans, pour ses études, commencées à Orléans.
Cette jeune femme, pleine de vie et très entourée, aimait voyager, échanger avec autrui, faire la fête ; elle était taquine et déterminée.
En plus de ses nombreux amis, elle a laissé son petit frère de 14 ans, sa mère, son père et son beau-père dans la souffrance.
La nouvelle a été annoncée brutalement à la maman, par un interlocuteur qui voulait obtenir des papiers ; un choc total, pour elle, qui était si loin de son enfant.
La famille peine à faire son deuil, puisqu’obligée de mener un combat pour faire éclater la vérité sur les circonstances de sa mort.
Il y a plein de suspicion autour de sa maladie, qui fait que maintenant je suis là, devant vous, pour essayer de défendre cette injustice à laquelle elle a fait face. Ça rajoute à la peine que nous vivons.
Sandrine Porlon, maman de Meggy Biodore
Mais malgré la souffrance, la maman ira au bout, annonce-t-elle. Ce qu’elle sait des faits l’anéantit. Si effectivement sa fille n’a pas bénéficié des soins qui auraient pu la sauver, il faut obtenir justice en son nom.
Un sentiment de révolte !
Sandrine Porlon, maman de Meggy Biodore
Les membres de la famille avaient pour projet de partir tous ensemble en croisière, le mois prochain.
À VOIR/ Le témoignage complet de Sandrine Porlon, maman de Meggy Biodore :
RAPPEL/ Ce drame n’est pas sans rappeler celui qui concernait Yolande Gabriel, mère de famille martiniquaise, décédée à son domicile, le 21 août 2020. L’aide-soignante à la retraite s'était rendue aux urgences de Meaux, puis avait été renvoyée chez elle sur décision des médecins. Elle était décédée peu de temps après.
Les filles de cette victime, les jumelles Laura et Christine, ont déposé plainte en octobre 2021 contre le SAMU de Seine-et-Marne et le Grand Hôpital de l'Est Francilien pour homicide involontaire et omission de porter secours.