Théâtres d’Outre-mer en Avignon #5 : "Suzanne Césaire, fontaine solaire" (Martinique)

De gauche à droite, les actrices Astrid Bayiha, Martine Maximin et Nicole Dogué dans "Suzanne Césaire, fontaine solaire", au Festival Off d'Avignon, le 14 juillet 2016.
Durant toute la semaine, La1ere.fr est en Avignon pour vous faire vivre les spectacles présentés par les artistes des Outre-mer au Festival Off (7 – 30 juillet). Ce jeudi, une pièce inspirée des textes de la Martiniquaise Suzanne Roussi Césaire, qui fut l’épouse du poète Aimé Césaire. 
On connaît le grand poète Aimé Césaire, mais beaucoup moins celle qui fut son épouse, Suzanne Roussi Césaire (1915 - 1966). Pourtant cette dernière joua un rôle capital auprès de son mari et dans l’émergence de la littérature martiniquaise. Elle fut notamment cofondatrice de la revue « Tropiques », saluée notamment par André Breton et le courant surréaliste, dans laquelle elle écrivit d’importants articles. Ses principaux textes, publiés entre 1941 et 1945, ont été regroupés par l’écrivain guadeloupéen Daniel Maximin dans un livre intitulé « Le grand camouflage : Ecrits de dissidence », paru aux éditions du Seuil en 2009.
 
En Avignon, le même Daniel Maximin a réalisé une adaptation théâtrale des articles de Suzanne Césaire dans Tropiques. La pièce, intitulée « Suzanne Césaire, fontaine solaire » est mise en scène par le Burkinabé Hassane Kassi Kouyaté, directeur de Tropiques Atrium Scène nationale à la Martinique et ancien comédien du grand dramaturge anglais Peter Brook.
 

Trois femmes puissantes

Le spectacle, particulièrement dense, est porté par trois femmes puissantes : Astrid Bayiha (Cameroun), Nicole Dogué (Martinique) et Martine Maximin (Guadeloupe). Trois voix de l’Afrique et des Antilles qui donnent force à la parole de Suzanne Césaire. Quelque part dans un club, sur fond de jazz et de biguines traditionnelles, ces femmes conversent. Et leurs mots sont des « armes miraculeuses », des couperets et des lames qui tranchent dans le conformisme et la bienséance. Le propos est tour à tour poétique, analytique et subversif. Parfois démonstratif. Souvent impitoyable, notamment envers le consumérisme, la petitesse et la lâcheté de la bourgeoisie martiniquaise.   
 
L’écrivaine se joue des clichés paternalistes de l’époque, pour mieux les anéantir. Elle revient sur l’histoire de l’esclavage et de la sujétion. « Il est urgent d’oser se connaître soi-même », écrit-elle, prémonitoire. « Cette terre ne peut-être que ce que nous voulons qu’elle soit ». A l’écoute de Suzanne Césaire, on se rend compte de la portée révolutionnaire de ses écrits, pour l’époque, en pleine censure du régime de Vichy. Fustigeant l’hypocrisie et l’imitation servile des dominants, elle décrète encore : « La poésie martiniquaise sera cannibale ou ne sera pas ». 
« Il y a encore des textes méconnus de Suzanne Césaire », confie Hassane Kassi Kouyaté à la sortie de la pièce. « Ils se trouvent aux archives départementales à la Martinique ainsi qu’aux archives nationales. J’espère qu’ils seront édités un jour ». Et nous aussi, assurément.
 

REGARDEZ une présentation de « Suzanne Césaire, fontaine solaire »


« Suzanne Césaire, fontaine solaire »
Mise en scène : Hassane Kassi Kouyaté
Assistante à la mise en scène : Astrid Mercier
Avec Astrid Bayiha, Nicole Dogué, Martine Maximin
Production : Tropiques Atrium Scène nationale (Martinique)
Du 6 au 27 juillet à 12h10 au Théâtre du Balcon (38 rue Guillaume Puy, Avignon)
Durée 55 minutes
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