Alors qu’il avait mis près de deux mois à nommer Michel Barnier Premier ministre après la dissolution de l’Assemblée nationale, Emmanuel Macron n’a attendu qu’un peu plus de 48h pour désigner son successeur, François Bayrou, ce vendredi 13 décembre.
"On est autant déçu que la dernière fois. On a moins attendu, mais on est autant déçu, voire plus, que la dernière fois, réagit Frédéric Maillot, député (GDR) de La Réunion. On se rend compte que la remise en question ne fait pas partie du logiciel d’Emmanuel Macron. Ce dernier se refuse à écouter la population : il n’y a rien de pire qu’un président qui se trompe en toute confiance."
La macronie est un rond-point. On tourne en rond : à chaque fois qu’il faut céder la priorité, quand le peuple demande de céder la priorité à gauche, ils la cèdent à droite.
Frédéric Maillot, député (GDR) de La Réunion.
Jean-Hugues Ratenon, député LFI de La Réunion, est tout critique et dénonce une "nouvelle ruse de Macron". "Pour rappel, François Bayrou a défendu un budget d’austérité avec une baisse de 50 milliards de la dépense publique et une hausse de la TVA", s’agace le député dans un communiqué. "C’est le représentant d’une élite hypocrite et corrompue, solidaire à la politique de Macron et proche de l’extrême droite de Marine Le Pen, à qui il a donné son parrainage lors des présidentielles de 2022", poursuit-il.
Un homme qui sait parler à la gauche et à la droite
Sollicitée, Estelle Youssouffa, députée LIOT de Mayotte, n’a pas souhaité faire de commentaire. Mais pour Olivier Serva, lui aussi député du groupe LIOT, la nomination de François Bayrou est "l’un des moins mauvais choix que pouvait faire le président". "C’est un homme qui sait parler à la gauche, qui sait parler à la droite", salue le Guadeloupéen. "Nous avons besoin d’un gouvernement d’urgence national, plaide Olivier Serva. Nous sommes prêts au groupe LIOT à participer au gouvernement d’urgence nationale avec un accord de non-censure, mais surtout un accord de non-utilisation du 49-3, (…) pour trouver des solutions dans l’intérêt du pays et des Outre-mer notamment".
Les Outre-mer sont en attentes d’un accord sur la vie chère, ça ne peut plus attendre. On est en attente aussi sur l’insécurité.
Olivier Serva, député (LIOT) de Guadeloupe.
Nicolas Metzdorf, député Ensemble pour la République de Nouvelle-Calédonie, voit dans la nomination de François Bayrou "une bonne nouvelle", alors que la passation de pouvoir qui se tient ce vendredi à Matignon est la troisième en 2024, un record sous la Ve République. "C'est une bonne nouvelle qu'on ait un Premier ministre. La Nouvelle-Calédonie a besoin d'un Premier ministre pour deux raisons", explique-t-il, citant à la fois l’urgence de reprendre les négociations sur l’avenir institutionnel de l’archipel et la nécessité de débloquer rapidement des crédits pour relancer l’économie calédonienne.
Rassuré par la nomination d’un chef de gouvernement, Nicolas Metzdorf salue aussi la personnalité du centriste. "Je crois que c'est une bonne chose pour l'Assemblée nationale. Aujourd'hui, il y a un bloc central et faire une majorité avec un centriste me paraît naturel, estime-t-il. Par sa carrière politique, qui est quand même aujourd'hui assez longue, on a quelqu’un qui maîtrise un minimum les grands enjeux de nos territoires. On a l'avantage d'avoir quelqu'un qui est quasiment un homme d'État, qui connaît les grands enjeux français, dont les Outre-mer font partie évidemment."
"Au-delà des hommes, il faut des actes"
"C’est une personnalité du centre qui avait déjà lancé l’idée que les groupes travaillent ensemble. Ça peut laisser quelques fenêtres ouvertes", espère lui aussi Elie Califer, député Socialistes et apparentés de Guadeloupe. L’élu voit en la nomination du maire de Pau une "récompense pour son engagement aux côtés du président Macron" et s’interroge sur "la latitude" qui sera laissée à François Bayrou, artisan de la victoire d’Emmanuel Macron en 2017. "Il s’agit de faire un pas vers les autres groupes de l’Assemblée nationale. Si l’on veut faire avancer les affaires de la nation, du pays, il faut qu’il y ait un bougé du côté du bloc central", estime-t-il.
Concernant les Outre-mer, ce n’est pas un changement de personne qui pourra nous satisfaire. Au-delà des hommes, il s’agit des actes. Nous avons besoin d’actes : qu’on prenne en compte la cherté de la vie, la continuité territoriale.. Nous demandons une véritable politique d’accompagnement de nos territoires.
Elie Califer, député Socialistes et apparentés de Guadeloupe.
"Nous avons eu un florilège de ministres des Outre-mer qui ont pu faire part de leurs difficultés à faire entendre nos problématiques. (…) Nous avions obtenu de monsieur Barnier qu’il y ait un ministère de plein exercice, j’espère que monsieur Bayrou ne nous fera pas l’injure de donner aux Outre-mer un secrétariat d’État sans pouvoir et sans moyens", conclut-il.
Si la passation de pouvoir entre Michel Barnier et François Bayrou a déjà eu lieu, on ne sait pas encore quand ce dernier annoncera la composition de son gouvernement.