C'est un nouveau coup dur pour une filière déjà très éprouvée par une récolte 2024 catastrophique. Il y a quelques semaines, certains planteurs de canne à sucre du Sud et de l'Ouest ont appris la suspension de commercialisation d'une jeune variété, la "R589".
Une décision incompréhensible pour Jean-Paul Pajaniaye, rencontré ce lundi 6 janvier sur son exploitation. Ce planteur de Saint-Leu est dépité par cette interdiction, alors qu'il est persuadé que sa canne est saine. "J'ai planté exprès pour avoir des boutures en cette période, j'ai un hectare trente, environ 190 tonnes de canne", estime-t-il.
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"Nous ne sommes pas des cobayes !"
"Ça ne fait même pas quatre ans que cette variété est sortie, et on nous dit de ne plus planter cette variété. Nous ne sommes pas des cobayes !", fulmine l'agriculteur.
"Il faut attendre la récolte pour voir s'il y a réellement du charbon dessus", estime pour sa part Yanos Maillot, un agriculteur de Saint-Louis confronté au même problème. "Et s'il y en a il faut repréparer le sol pour pouvoir enlever cette variété-là et remettre une autre variété. C'est du temps perdu et de l'argent jeté", déplore-t-il.
Perte de production
La mise au placard de cette variété intervient à la suite de la découverte de la maladie du charbon dans une plantation du Gol, à Saint-Louis.
"Si on a l'apparition d'un foyer charbonneux sur la dernière pousse, alors la tige crève" décrit Bernard Siegmund, directeur d'eRcane, l'organisme réunionnais de recherche sur la canne à sucre. "Si on a quelques tiges, ce n'est pas très grave, mais s'il y a beaucoup de tiges dans le champ, ça veut dire que ce ne sont plus des cannes usinables et donc une perte de production pour le planteur", explique-t-il.
Pourtant la "R589" avait montré de bonnes dispositions à sa création. "On fait des essais pour voir si nos variétés sont résistantes aux maladies. La R589 avait montré une bonne tolérance au charbon" se souvient le chercheur.
"Une maladie de zone sèche"
Mais le contexte climatique semble influer sur la prolifération du champignon causant la maladie, Sporisorum scitamineum. "Les conditions de 2024, c'est la sécheresse, et c'est une maladie de zone sèche", constate Bernard Siegmund.
La suspension de la commercialisation ne signifie pas toutefois l'arrachage de cette variété. Du moins pour l'instant.
En attendant, les planteurs réclament un rendez-vous avec l'organisme de recherche eRcane pour tenter de trouver une solution.