La percée inédite du Rassemblement national au premier tour de ces élections législatives anticipées interpelle les acteurs du monde associatif et syndicaliste de la Réunion.
Du côté de la CGTR, aucune hésitation possible quant au soutien accordé pour le second tour. De même, le syndicat enseignant FSU Réunion multiplie les publications sur les réseaux. "L'extrême-droite est un danger pour nos services publics et pour notre école", écrit-elle.
"On est inquiet pour le vivre-ensemble et pour la solidarité"
L'union syndicale Solidaires a également partagé un communiqué appelant à "battre l'extrême droite". Pour l'organisation, la perspective que le RN puisse gouverner le pays est "intolérable". "Le fondement du parti du Rassemblement national est le racisme et le rejet de l'autre comme de la démocratie", écrivent encore les délégués régionaux Christian Monteil et Vincent Nativel.
Et puis, les associations qui oeuvrent en faveur des plus démunis font part également de leurs craintes, à l'instar de la Fondation Abbé Pierre Réunion. "On est inquiet pour le vivre-ensemble et pour la solidarité parce que le Rassemblement national n'apportera pas vraiment de réponse pour changer le quotidien de ceux qui ont des difficultés financières pour se nourir, se loger ou se soigner", réagit Matthieu Hoarau, le directeur de l'organisation basée dans le chef-lieu.
Regardez le reportage de Réunion La 1ère :
Un collectif d'associations mobilisé contre le RN
Pour l'intéressé, les valeurs prônées par le parti de Marine Le Pen ne sont pas compatibles avec celles qu'il défend au travers de la Fondation. "En mettant en avant la question de la préférence nationale, ça nous obligerait, nous acteurs de la solidarité, à trier entre les personnes qui sont les plus souffrantes et les plus vulnérables, pour dire qui aurait le droit de manger ou pas, qui aurait le droit de se soigner ou pas et qui aurait le droit de se loger ou pas", argumente encore Matthieu Hoarau.
Le 28 juin, à la veille du premier tour, la Fondation Abbé Pierre Réunion avait déjà fait part de son inquiétude dans un communiqué commun signé aux côtés une douzaine d'autres organisations telles qu'ATD Quart Monde, la CEMEA, Emmaüs, La Cimade, la Ligue des droits de l’Homme, Médecins du Monde Océan Indien, l'association OriZon ou encore le Réseau Oté.
"Ne renions pas l'Histoire de La Réunion"
Celles-ci estiment que l'extrême droite "représente un danger dans l’accès pour toutes et tous à la santé, au logement, aux droits sociaux, à la mobilité et aux services publics de manière générale". Ces associations ajoutent : "Ne renions pas l’Histoire de La Réunion, le métissage, la lutte pour l’égalité de toutes et de tous".
Sur les ondes de Réunion la 1ère radio, Bernard Grondin, le directeur d’Emmaüs-Réunion avait déjà appelé à voter contre le RN pour lutter contre toutes formes d’exclusion. "Chacun na le droit de vote ou sa li veut, seulement, nous, nous dit que nana un risque de forte exclusion. Nous dit domoun, réflechis bien, parce que, une fois que ça lé en place, lé très compliqué de revenir en arrière".
Revoir l'interview de Bernard Grondin sur Réunion La 1ère :
"Il faut un élan réunionnais"
De son côté, l'association Rasine Kaf qui milite pour l'identité et la culture des descendants d'esclaves voit néanmoins à travers l'issue du premier tour des législatives "un mal pour un bien pour s'émanciper".
"Mi pense que c'est un résultat qui annonce la fin d'un régime qu'on appelle républicain mais qui est en réalité bourré de discriminations", argumente sa présidente Ghislaine Mithra Bessière.
"Il faut un élan -réunionnais cette fois-ci- pour lever la tête et montrer notre voie, celle de l'émancipation et de la décolonisation". Ghislaine Mithra Bessière s'était déjà exprimée au sujet du RN après la polémique de la Fèt Kaf' avec Johnny Payet, le représentant péï du parti d'extrême droite: "On a tout à craindre du Rassemblement national qui menace de s’attaquer à notre diversité", avait-elle notamment déclaré sur Parallèle Sud.
La gauche réunionnaise face aux candidats d'extrême droite
Reste que l'appel national de la gauche à faire barrage au Rassemblement national pour le second tour ne fait pas non plus l'unanimité dans le département.
Anael Goetschel, la présidente de l'association réunionnaise de lutte contre l'antisémitisme, se dit tout autant angoissée par la posture de certaines personnalités politiques au sujet de la question de la Palestine.
"Je pense que la gauche se trahit (...), estime-t-elle. On a d'un côté la gauche qui est en train de se déliter et de faiblir sur ses valeurs, là où l'extrême droite essaye tant bien que mal de faire amende honorable sur les choses du passé. Donc je peux comprendre qu'il y ait une propension à vouloir faire confiance à l'extrême-droite".
Le Rassemblement national n’a jamais été si proche du pouvoir. A La Réunion, les candidats du parti se sont qualifiés dimanche dernier pour le second tour dans les sept circonscriptions, malgré leur relative anonymat. Ce samedi 6 juillet, ils feront face aux candidats de la gauche.