La pause de 72 jours dans l’utilisation des DCP, votée en février 2023 par une majorité de membres de la Commission de l’océan Indien, a été sans effet. Début avril, cette année, la France et la Commission européenne ont déposé une série d’objection au secrétariat de la CTOI, rendant inapplicables ces dispositions à leurs flottes, essentiellement françaises et espagnoles.
Pourtant, comme le dénonçait, le 10 févier 2023, la Fédération des pêcheurs et artisans de l’océan Indien (FPAOI), cette mesure symbolique était même qualifiée de "mascarade" le Seychellois, Keith André, président des professionnels de la pêche des Comores, de Madagascar, de Maurice, de La Réunion et des Seychelles qui précisait sur le site, Le Marin : "Cette interdiction ne concerne que les eaux internationales. Elle laisse donc toutes latitudes à ces navires industriels pilleurs des mers de sacrifier l’avenir des stocks halieutiques dans les zones économiques exclusives des pays de leur pavillon en océan Indien".
La France et la Commission européenne s’opposent à la pause
Les thoniers senneurs traquent les thons albacore, obèse et germon de l’océan Indien. Ces bateaux-usines débarquent les milliers de tonnes de poissons dans les hubs installés à Maurice, aux Seychelles et à Madagascar, rappellait Defimedia le 23 avril dernier. Là, les conserveries, qui emploient de la main d’œuvre à bas coût, mettent en boîte le thon rouge, blanc et les bonites "kalou" (ventre rayé), rebaptisée thon listao.
Depuis 2016, les associations écologiques Greenpeace, Sea Sheperd et Bloom alertent sur l’utilisation massive de DCP par les thoniers senneurs, comme l’écrivait Le Monde.
Ces dispositifs de concentration de poisson piègent des bancs entiers de thons, mais aussi des requins, des dauphins et des tortues marines. Si, une partie est remise à l’eau sans dommage, pour de nombreux autres l’océan devient un linceul.
Toutes les études montrent que les stocks de thon de l’océan Indien s’effondrent. Il suffit de faire le tour des 120 000 pêcheurs artisanaux des îles voisines pour avoir la confirmation du désastre en cours.
Le président du CRPMEM siège au sein de la FPAOI et de l'UE
À l’île Maurice, le MMM accuse ouvertement l’Union européenne de piller l’océan Indien, écrit Le Mauricien. Il compte 10 senneurs français, 15 Espagnols, 13 battant pavillon seychellois (NDLR : financés de A à Z par l’UE) et trois autres battant pavillon mauricien, mais eux aussi, ayant vu le jour, grâce à des fonds venus d’Europe.
Le Comité des pêches et des élevages marins de La Réunion a alerté le ministère des Pêches sur l’incohérence de cette stratégie. Cette démarche est très éloignée, "des enjeux locaux", explique Ludovic Courtois, secrétaire général du CRPMEM. Les recours, déposés au secrétariat de la CTOI, ont pour objectif de protéger les flottes françaises et espagnoles, donc les emplois de ces armements spécialisés dans la pêche industrielle. Ludovic Courtois qui conclue : "Les décisions à venir péseront sur le destin ou le déclin de la pêche artisanale dans l'océan Indien".
En clair, la protection des pêcheurs artisanaux de Mayotte, des Seychelles, de Maurice et de Madagascar risque de passer au second plan. Conscient des enjeux politiques et économiques très éloignés de notre zone océanographique, le président du CRPMEM, Claude Zitte, est à Maurice en tant qu’observateur. Il a choisi de rejoindre la délégation de la FPAOI et non celle de l’UE.