Budget : 15 millions d'euros réinjectés pour les cancers pédiatriques, soulagement pour les professionnels de santé, mais pas assez pour les familles

Face aux critiques, le gouvernement réinjecte les 15 millions d'euros dédiés à la recherche sur les cancers pédiatriques dans le budget 2025. L'annonce soulage les professionnels de santé, mais ravive de douloureux souvenirs chez Jerry Ayan, sa fille est décédée d'une tumeur au cerveau.

C'est un rétro pédalage, les 15 millions d'euros dédiés à la recherche sur les cancers pédiatriques réintègrent finalement le budget 2025. L'enveloppe avait disparue du texte sur le projet de loi de finances du gouvernement. L'annonce intervient au lendemain d'une vague d'indignation d'associations et de députés. Elle ne laisse pas Jerry Ayan indifférent, sa fille est décédée d'un cancer. 

Regardez le reportage de Réunion la 1ère : 

Le gouvernement réinjecte les 15 millions d'euros alloués aux cancers pédiatriques, ça ravive de douloureux souvenirs chez Jerry Ayan

Un père de famille en colère

Après le tollé suscité, le gourvernement fait marche arrière et remet les 15 millions d'euros dans l'enveloppe dédiée aux cancers pédiatriques. Cette actualité ravive la souffrance de Jerry Ayan, suite à la perte de son enfant il y a plus de 10 ans.

L'auteur du livre Pourquoi je ne suis pas un papillon? a perdu sa fille Anne-Laure d'une tumeur au cerveau. Le combat de la famille a été mené dans un sentiment de solitude et d'impuissance et lui a fait ouvrir les yeux sur le retard de la recherche. 

Jerry Ayan est aujourd'hui furieux, ce qu'a fait le gouvernement est pour lui "inacceptable".

J'ai l'impression qu'on joue avec la vie des enfants, ce budget n'est pas une variable d'ajustement, c'est inhumain de le penser ! Ça m'a réveillé de très mauvais souvenirs.

Jerry Ayan, père de Anne-Laure

"Je suis en colère parce qu'il y a eu l'annonce du retrait des 15 millions et peut-être encore plus en colère car le gouvernement fait volte-face et dit remettre cet argent au budget !", s'écrie le père de famille. 

"Ces cancers n'apportent rien à l'industrie pharmaceutique"

Pendant le combat contre la maladie de sa fille, Jerry Ayan "s'est rendu compte que non seulement il n'y a pas de solution, mais qu'il n'y a aussi aucune recherche sur les cancers des enfants"

On m'avait expliqué que les cancers pédiatriques n'apporteraient rien à l'industrie pharmaceutique, parce que ça ne touche qu'une petite partie de la population.

Jerry Ayan

2300 enfants diagnostiqués chaque année 

En France, 2300 enfants sont touchés par un cancer tous les ans, 500 enfants en meurent chaque année. 

En 2017, huit ans après le décès de sa fille, Jerry Ayan constate que "les chiffres n'ont pas bougé, les budgets n'augmentent pas"

Il avait, cette année-là, écrit aux candidats de l'élection présidentielle pour les sensibiliser à la nécessité d'augmenter les enveloppes dédiées à la recherche sur les cancers pédiatriques. 

Les 15 000 euros supplémentaires votés sont déjà une bouffée d'oxygène mais on est quand même loin des 40 à 60 millions nécessaires.

Jerry Ayan, père d'Anne-Laure

La recherche est primordiale

Le service d'oncologie et d'hématologie pédiatrique du CHU de La Réunion est le seul service de la zone Océan Indien. Pour le Dr Yves Reguerre, chef du service, il est indispensable de développer la recherche.

"Il y a deux volets dans la recherche, déclare-t-il. Il y a la recherche fondamentale qui se passe dans les laboratoires pour mieux comprendre la maladie, les processus qui amènent au cancer. Ils vont nous permettre de trouver des voies pour de nouveaux médicaments et mieux traiter les enfants, explique le Dr Reguerre. Il y a ensuite les protocoles thérapeuthiques, on va tester de nouvelles molécules, ou de nouvelles manières d'utiliser de vieilles molécules", ajoute-t-il.

Tout ça coûte très cher, les processus sont très longs. Les recherches sont internationales et indispensables pour mieux traiter et essayer de guérir les 450 patients qu'on ne guérit pas chaque année à l'heure actuelle.

Dr Yves Reguerre, chef du service d'oncologie et d'hématologie pédiatrique du CHU

Des médicaments chers et taxés

Les médicament de recherche doivent être importés car il n'existe pas de laboratoire dédié à La Réunion. Ils ne suivent pas les mêmes modes de transport que les médicaments habituels.

"C'est un export hors espace Schengen, ils coûtent très cher et sont taxés à l'arrivée à La Réunion", explique le chef du service oncologie. Les promotteurs qui développent les études et donnent l'autorisation d'utiliser les protocoles sont réticents à ouvrir un centre de recherche à La Réunion en raison de ces surcoûts.

Il faut absolument que ça change, il faut que, politiquement et localement, on travaille sur la prise en charge de ces surcoûts domiens. On doit trouver des financements.

Dr Yves Reguerre, chef du service oncologie du CHU

Le gouvernement s'engage

Dans un communiqué, le ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche et le ministère chargé de la Santé et de l’Accès aux soins, affirment que le "gouvernement va rallonger le budget dédié à cette cause à hauteur de 15 millions d’euros, dès cette année. Le Gouvernement considère que la lutte contre les maladies rares, dont font partie les cancers de l’enfant est une priorité", précise le communiqué. 

Il est aussi indiqué que "la dotation annuelle de l’Institut national du cancer est passée de 38 millions d’euros à 68 millions d’euros en 2024. Tous les ans,10% à 15% de cette dotation sont consacrés à la recherche sur les cancers pédiatriques".