Autour d'un stand, ces écolières se disputent pour recevoir un autographe au feutre directement sur leur bras. Celui qui provoque ici leur enthousiasme n'est ni rock-star ni vedette de télévision, mais est un auteur de livre péi.
Laurent Rivière est l'auteur des "12 couleurs indigènes de l'île de La Réunion", un album illustré à colorié autour de la flore et de la faune de l'île, pour leur faire découvrir les trésors de notre biodiversité.
Auteurs de La Réunion, mais pas que
Comme beaucoup d'autres ce week-end, il est invité au Salon du Livre jeunesse de l'océan Indien, qui se tient jusqu'au dimanche 13 octobre à la Cité des Arts de Saint-Denis.
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Séance de dédicaces, rencontres avec les auteurs, découverte de nouveaux ouvrages, avaient pour but de ravir les petits mordus de lecture, et de susciter les autres à ouvrir davantage de bouquins, voire de varier les plaisirs avec des auteurs venus de Mayotte, Madagascar, et Maurice. Avec 24 auteurs invités de l'extérieur, et 140 auteurs péi, ce ne sont pas les styles de livres qui manquent ici : romans, bandes-dessinées, albums illustrés, dans des genres tout aussi nombreux.
"La diversité de la littérature jeunesse"
"L'idée c'est de montrer toute la diversité de la littérature jeunesse de La Réunion, de l'océan Indien, et encore plus largement au niveau national", explique Aurélie Cottin, chargée de mission à La Réunion des Livres.
En exclusivité sur ce salon d'envergure, les visiteurs pouvaient également retrouver des livres bilingues en français et langue régionales, que ce soit créole mauricien, malgache, shimaoré.
Pour Naomi et Lili, 14 ans et lectrices régulières, l'événement est une bonne occasion pour partir à la découverte de nouveaux horizons. Et n'en espéraient pas tant. "On trouve ça honorable qu'il y ait autant de maisons d'édition réunionnaises", observe Naomi. Lili elle, apprécie de "découvrir les livres de l'océan Indien et d'échanger avec d'autres lecteurs".
De la BD au roman d'aventures
Parmi les auteurs péi, Abbass Mulla qui avec l'illustratrice Olma vient de sortir "Bois de Couleur". "C'est un conte qui parle du développement durable, de l'harmonie avec la nature, et de toutes les valeurs créoles. Les héros sont deux enfants, Charles et Marguerite, qui connaissent tous de la nature et en sont amoureux. Ce sont les adultes qui manquent de sagesse dans cette histoire, qui malgré tout se termine bien", résume l'auteur.
Nicola Bertani, lui, est venu présenter sa saga de cinq tomes, autour du héros Tom Castle, un ancien commando marine devenu professeur d'intelligence artificielle. "Un livre d'action, d'enquête et d'espionnage", comme le décrit son auteur, qui connaît un certain succès auprès des jeunes qui "manipulent beaucoup l'IA et sont amusés de voir un récit d'action qui l'intègre telle qu'on la vit aujourd'hui dans nos téléphones".
Le "papa" d'Anatole Latuile au rendez-vous
Parmi les 24 invités extérieurs de cette édition, Clément Devaux, particulièrement sollicité par les plus jeunes. et pour cause, c'est le dessinateur de la série BD "Anatole Latuile", dont les aventures sont publiées par le magazine "J'aime Lire" depuis près de 20 ans.
"Anatole, petit garçon qui a 9 ans et qui est le roi des catastrophes, est toujours animé de bonnes idées pour aider ses camarades et vivre des aventures. Mais tout ce qu'il entreprend finit souvent assez mal", raconte le dessinateur.
Son ouvrage fait partie de ceux régulièrement cité par les petits lecteurs de moins de 12 ans, comme Kira, fan de BD. "La lecture, ça fait partie de mes passions", sourit-elle. Pour Aya, amatrice de livres d'aventures et même de romans policiers, lire est tout aussi important, "pour avoir de l'imagination et se cultiver". Shaïna elle, très passionnée, nourrit l'espoir "qu'à l'avenir, les enfants vont adorer lire et apprendre".
Des animations pour donner le goût de lire
Peut-être les "animations innovantes", - autour du thème de la cabane - prévues ce week-end à la Cité des Arts permettront aux plus réfractaires de se laisser tenter. Lectures audio posé dans un transat, cabanes à colorier, lectures sous tipi, livres géants... "pour amener l'enfant vers le livre, parce qu'on sait que c'est encore plus difficile aujourd'hui", résume Aurélie Cottin, chargée de mission à La Réunion des Livres.
Face à la concurrence très rude des écrans, le livre est parfois délaissé. Pas pour Rose et son frère eux, emprutent chaque semaine "une vingtaine de livres, aussi bien des BD que des romans". "Tous les soirs en rentrant du collège, je lis, je lis, je lis, des trucs d'action et de comédie. Ce que j'aime dans la lecture c'est de pouvoir voyager, imaginer, développer notre vocabulaire parce que c'est bien d'avoir des bonnes notes en français", raconte le pragmatique garçon de 12 ans, qui confie qu'il n'a pas de téléphone. Sa petite soeur elle, âgée de 9 ans, se plaît à "imaginer les voix, les personnages, les couleurs dans les mangas, et (me) plonger dans l'aventure".
Des "médiabus" qui sillonnent les écarts
Une fois le salon terminé, dimanche soir, d'autres initiatives perdureront pour attirer davantage d'enfants vers la lecture. Comme ces petites bibliothèques itinérantes qui se rendent là dans les écarts de Saint-Denis où il n'y a plus de médiathèque physique.
Ainsi, la "Boit' Kiltir" se rend dans les hauts de la commune tous les mercredis, et dans les écoles les vendredi, avec pour objectif de "faire vivre le livre et donner aux gens l'envie de revenir vers nous", explique Yannick Guezello, animateur culturel pour la médiathèque François Mitterrand à Saint-Denis.
"C'est un petit bus magique avec des livres dedans, pour les marmailles et les adultes. On a une offre plus restreinte que la médiathèque, mais on essaie de coller au plus près des besoins de nos lecteurs, parce qu'on a une proximité qui nous permet de savoir ce que veulent les gens"
Yannick Guezello, animateur culturel pour la médiathèque François Mitterrand à Saint-Denis
Des efforts qui portent leurs fruits
L'animateur culturel constate avec enthousiasme les effets d'un tel dispositif. "On revient de plus en plus aux fondamentaux. A un moment, le téléphone et les jeux vidéo ont leurs limites, et quand les enfants découvrent le livre à nouveau, c'est magnifique. J'ai bon espoir qu'on y revienne de plus en plus", sourit Yannick Guezello.
Exemple avec le quartier du Brûlé, où les enfants se contentaient au départ de jouer au ballon ou faire du vélo devant le bus, avant de sympathiser, au fil des mois, avec l'animateur. "Ils sont venus, et j'ai eu une dizaine de création de cartes l'année dernière, pour des marmailles qui sont devenus aujourd'hui de fidèles lecteurs", observe-t-il satisfait.
Le livre jeunesse, secteur dynamique
Les chiffres eux, traduisent aussi la bonne santé du livre pour jeunes publics. "On se rend compte que ce qui se vend le plus à La Réunion reste le livre jeunesse. Même si eux ne sont pas lecteurs, les parents en achètent pour leurs enfants", achève Aurélie Cottin, la chargée de mission de La Réunion des Livres.