C'est un accord unanimement qualifié d'"historique" par les acteurs du secteur. Lundi 23 décembre, plusieurs organisations syndicales et patronales du transport de voyageurs ont signé un accord de branche inédit à La Réunion, 74 ans après la naissance d'une convention collective nationale jamais appliquée dans les outre-mer.
Un protocole validé sous l'égide de la direction de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités (Deets), qui viendra désormais encadrer une profession regroupant près de 3 000 salariés à La Réunion dans le transport urbain, interurbain et scolaire.
"Faire respecter la réglementation sociale"
"74 ans après, signer un accord dérivé de la convention collective nationale, c'est une satisfaction pour la profession de transport routier de voyageurs et une fierté pour nous" se félicite Eric Talassia d'UR974, le syndicat majoritaire cosignataire de l'accord avec la CGTR et FO. Le texte porte notamment sur les questions de temps de travail et de rémunération.
"Les salariés vont voir leur condition évoluer, la profession être plus attractive. Cet accord-cadre permettra de combler les disparités, et de surtout faire respecter la réglementation sociale, les salaires, et faire reconnaître ces métiers difficiles, leur pénibilité", ajoute-t-il.
Redonner de l'attractivité à une profession "désertée"
Satisfaction partagée du côté des employeurs. Deux organisations patronales, FNTV et OTRE ont signé cet accord qui devenait indispensable comme le souligne Loqman Moulan, président du directoire du Groupe Transports Mooland, l'un des acteurs majeurs du secteur avec 800 salariés à La Réunion.
"Il était temps que cet accord soit signé pour que l'ensemble des entreprises soient alignées sur les mêmes règles. C'est important pour l'avenir d'une profession désertée par beaucoup de salariés, car il y a malheureusement un désintérêt pour cette profession qui est préjudiciable à la mobilité sur l'île", souligne le transporteur.
Même si cela risque d'avoir un impact sur les finances des entreprises. "Ce ne sera pas simple à réaliser dans les faits, cet accord pèsera dans les comptes d'exploitation des sociétés" explique le dirigeant, "mais je crois en l'intelligence des partenaires sociaux pour qu'ensemble, nous puissions faire vivre cet accord sans remettre en cause l'équilibre des entreprises."
"Recruter en nombre"
Aussi espère-t-il que les collectivités, principaux clients du transport en commun, tiennent compte cette évolution du métier. "Nous souhaitons que les donneurs d'ordre prennent bien conscience de l'importance de cet accord pour l'avenir de la filière et du transport à La Réunion. Certaines collectivités comme la Région ont pris l'engagement de nous accompagner dans sa mise en œuvre, nous espérons l'élargir à d'autres collectivités", conclut Loqman Mooland.
Le directeur du travail, Arnaud Pouly, salue lui aussi un protocole "extrêmement important, car il faut redonner de l'attractivité pour ces métiers et pouvoir recruter en nombre dans les années qui viennent", et invite les partenaires sociaux à poursuivre les négociations plus avant. "La revalorisation salariale du temps de travail va rendre la branche très attractive, mais il faut aller plus loin sur les questions de prévoyance et tous les sujets d'une convention collective pleine et entière", souhaite le représentant de l'Etat.