Violences conjugales : prendre la parole, une difficulté majeure à Saint-Pierre et Miquelon

L'accompagnement des femmes victimes de violences conjugales
En cette journée internationale des droits des femmes, le deuxième épisode de Mosaïque est consacré à l’accompagnement des femmes victimes de violences conjugales. Un sujet qu’il est difficile d’aborder, d’autant plus dans un territoire insulaire où les structures manquent.

C’est une triste réalité qui perdure. En France, une femme meurt tous les trois jours sous les coups de son conjoint ou ex-conjoint. La majorité avait pourtant déposé plainte. 

À Saint-Pierre et Miquelon, le parquet enregistre 12 procédures ouvertes en 2022. C’est 50% de plus qu’en 2021. Ces chiffres augmentent mais ne reflètent pas forcément ce qu'il se passe vraiment à l'intérieur des foyers.

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Rompre le silence et porter plainte : un parcours du combattant

La peur, la honte, la culpabilité. Les victimes se retrouvent dans un engrenage infernal, où la prise de parole est complexe. D'autant plus complexe dans un territoire insulaire de 6 000 habitants. Tout le monde se connaît. Par peur du regard des autres, le silence devient parfois même une obligation. 

Comment rompre la chape de plomb du silence sur l’archipel ? Moi j’ai une réponse : la vie de la victime compte plus que le regard des autres. 

Isabelle Arnal, procureure de la République à Saint-Pierre et Miquelon.

On les suspecte immédiatement de couper le lien du père avec les enfants, de lui prendre sa maison et qu’elles peuvent inventer les violences dont elles ont été victimes.

Maître Tomasini, avocate spécialisée dans la défense des victimes.

La parole de la femme victime est bien trop souvent minimisée. En France, 80% des plaintes sont classées sans suite par les autorités. Les formations existent mais sont récentes.

À Saint-Pierre et Miquelon, la brigade de la gendarmerie met un point d'honneur à l'apprentissage de ces enseignements liés aux violences conjugales. 

Les violences économiques encore méconnues 

Il existe 4 types de violences conjugales, répertoriées sur le site du gouvernement

  • Les violences physiques : coups et blessures. 
  • Les violences sexuelles : viol, attouchements, harcèlement sexuel, cyber harcèlement, tentative de viol, mutilations sexuelles, mariage forcé... 
  • Les violences psychologiques : harcèlement moral, insultes, menaces, humiliation... 
  • Les violences économiques : privation de ressources financières, maintien dans la dépendance...

Au cours de sa vie, 1 femme sur 2 a déjà subi au moins une forme de violence sexuelle. Partenaire, ami, famille, collègue, mentor... dans 91% des cas les femmes connaissent les agresseurs.

Selon les appels au 3919 (le numéro d’urgence en France), 20% des femmes dénoncent les violences économiques au sein de leur couple.

Il s’agit souvent de la première manifestation de violence, de contrôle. Mais aussi de moyen de pression après une rupture… Un ex-conjoint violent peut tenter de se soustraire à ses obligations financières, envers les enfants par exemple. 

Le manque de structures à Saint-Pierre et Miquelon

Depuis 2021, les victimes ne disposent d'aucun lieu d'écoute et d'accompagnement dans l'archipel. L'association Vivre Ensemble devrait être en mesure de répondre à ce besoin, urgent. Pour le moment, un hébergement d'urgence est ouvert, uniquement à Saint-Pierre. 

Hébergement d'urgence à Saint-Pierre

Autre difficulté : aucune structure n'est mise en place pour éloigner l'agresseur de sa victime. De par la superficie de l'archipel, cette dernière peut vite être amenée à le croiser dans son quotidien et ainsi amplifier son mal-être. 

La préfecture est dans une démarche d'identification de moyens pour éloigner l’auteur du domicile conjugal, mais pour l’instant la solution n’a pas été trouvée.

Colonel Eric Misserey, commandant de la gendarmerie.

Trouver de l'aide 

Numéros et liens utiles

Dans ce deuxième épisode de Mosaïque, des reportages mais aussi des échanges avec deux invitées en visio-conférence : 

  • Laurence Fischer, ancienne championne du monde de karaté et fondatrice de l’association Fight For Dignity, accompagne les victimes dans leur reconstruction à travers le sport, plus précisément le karaté.  
  • Cynthia Hamel, coordonnatrice à l'intervention de la Maison d’Aide et d’Hébergement l’Accalmie aux îles de la Madeleine. La problématique de l’ultra-proximité de son territoire s’apparente directement à Saint-Pierre et Miquelon. 

©saintpierreetmiquelon