Crise en Nouvelle-Calédonie : seuls 70 % des pré-rapports d'expert d'assurance ont été traités

Un bâtiment brûlé durant les émeutes (image d'illustration)
Trois mois et demi après les premières exactions en Nouvelle-Calédonie, de nombreux habitants demeurent dans l'attente d'un remboursement de la part de leur assurance. Avec le sentiment que les choses n'avancent pas assez rapidement.

Sa pizzeria a été saccagée à Magenta le 14 mai dernier, au lendemain des premières exactions. C'est à chaque fois avec la gorge nouée que Christan Geraert revient sur les lieux. "Tout le magasin a été vidé de ses marchandises qui ont été réparties au sol et sur notre parking, puis nos scooters ont été volés", détaille-t-il.

Le chef d'entreprise, à la tête de trois commerces, a perdu une somme importante avec le sinistre. Son assurance lui a déjà versé une avance partielle sur la somme globale des dégâts et sur la perte d'activité. Une aide indispensable pour tenir le coup. Mais il aura dû attendre deux mois pour percevoir la somme.

"Ce n'est jamais supportable d'attendre deux mois des remboursements tout en ayant un magasin fermé qui se doit d'avancer les salaires du personnel en attendant les remboursements de la Cafat", confie Christian Geraert.

Un long chemin

Le temps peut sembler bien plus long encore pour d'autres entrepreneurs. Sur les 120 milliards d'indemnités estimés au global par les assureurs, 8 milliards et demi avaient été distribués au 20 août avec un rythme moyen de 850 millions par semaine. Le processus est donc encore loin d'être terminé, d'autant que 70% seulement des pré-rapports d'experts, nécessaires pour verser un acompte, ont été traités pour le moment.

"Il n'y avait certainement pas assez d'experts missionnés pour le sujet", concède Frédéric Jourdain, le président du Comité des sociétés d'assurance de Nouvelle-Calédonie. "Ces experts sont rentrés en Métropole et n'ont pas travaillé pendant les grandes vacances alors qu'on attend la réception de beaucoup de choses de leur part pour indemniser les entreprises", poursuit-il, tout en soulignant que les sociétés d'assurance "n'étaient pas assez staffées pour faire face à autant de déclarations".

De fait, le nombre de déclarations est impressionnant : 3310 au total depuis le 13 mai. Un peu moins de la moitié des dossiers ont déjà reçu une première indemnisation. Et pour toucher la totalité des fonds, il faudra encore se montrer patient car le cheminement des dossiers prend généralement du temps. 

Vers des procès contre l'Etat ?

"Il y a plusieurs étapes : d'abord, le temps du versement de l'acompte, qui est une mesure d'urgence. Puis on indemnise les dommages suite au rapport définitif de l'expert. Et dans un troisième temps viendra le moment de payer la perte d'exploitation. Mais ce n'est que deux ans plus tard, une fois que la reprise de l'activité a été constatée", explique Frédéric Jourdain.

D'ici à deux ans, la donne pourrait toutefois être différente. D'après nos informations, plusieurs compagnies d'assurance préparent des recours en justice contre l'Etat, afin de faire reconnaître sa responsabilité dans le non-maintien de l'ordre public durant les émeutes.

Certains clients ont en outre reçu des mails de leur compagnie les incitant à porter plainte sur la base de l'article L211-10 du code de la sécurité civile, disposant que "l'Etat est responsable des dégâts et dommages résultant des crimes et délits commis".