3 Guadeloupéens violemment agressés le soir des élections, l'un d'entre eux témoigne

Il y a une semaine, Stéphane*, jeune Guadeloupéen et deux de ses amis ont été pris pour cible par un groupe d'individus, à Paris.
Il a voulu témoigner pour éviter que cela se reproduise... Pour que tous ceux qui, comme lui, ont été agressés à cause de leur couleur de peau, parlent...

Dans la nuit de dimanche à lundi, au soir du deuxième tour de l'élection présidentielle, opposant Emmanuel Macron à Marine Le Pen, 3 jeunes Guadeloupéens (dont deux Saintannais) ont été agressés par une bande d'individus qui scandaient "Bleu Blanc Rouge, la France est à nous".
Stéphane*, l'un des trois jeunes agressés a souhaité s'exprimer (à visage caché), pour dénoncer cette violence gratuite dont il a été victime, en raison de sa couleur de peau. 

Des agresseurs fachos

Ils se trouvaient non loin du quai de la Tournelle, dans le 5ème arrondissement de Paris. Les trois amis souhaitaient juste sortir, et aller prendre un verre ensemble, histoire de passer un bon moment...
Cette soirée a finalement été l'une des pires de leur vie... Alors qu'ils marchent en discutant, une dizaine d'hommes, la plupart portant des capuches et des bandanas cachant leur visage attaquent les trois garçons. Les coups pleuvent... Des coups, d'agresseurs dont l'un déclare être un nazi.
Stéphane* raconte.

Choc et colère

Les trois jeunes Guadeloupéens sont profondément choqués.
Stéphane, lui a reçu des coups de poing à la tête et sur le corps. Ses deux amis sont aussi amochés. Mais plus que la douleur, c'est la colère qui s'empare d'eux. Comment peut-on être pris à partie, en 2017, pour sa couleur de peau ? Cette phrase, il la répétéra plusieurs fois durant l'entretien. 

En colère, il hésite pourtant à aller voir les autorités. Durant 2 jours, il s'interroge. Il se rend finalement à la police nationale et dépose plainte pour "violence suivie d'incapacité n'excédant pas 8 jours commise en raison de la race, l'ethnie, la nation ou la religion".  
Et, une semaine après l'agression, Stéphane est toujours en état de choc.

Comment retrouver une vie normale ?

Stéphane a quitté la Guadeloupe, il y a 3 ans. Il est aujourd'hui surveillant pénitentiaire et vit en banlieue. Depuis l'agression, il s'est entouré de son cousin, de ses amis, qui l'aident à surmonter cette épreuve. 
Mais, comment parler de cette agression à sa famille restée en Guadeloupe ? Comment sortir de chez lui ? Comment retrouver une vie normale ?
Il doit reprendre le travail, ce lundi 15 mai. Une reprise loin d'être sereine. 

Peur du sentiment anti étrangers

Stéphane peut compter sur le soutien de son cousin, Loïc, présent lors de l'interview. Les deux jeunes hommes sont inquiets. Les récentes élections et les scores réalisés par Marine Le Pen, chez eux, en Guadeloupe, les ont laissé dubitatifs. "Toutes ces personnes qui votent Front National oublient qu'elles ont de la famille qui vit en France et qui peut tomber sur des fachos qui votent comme eux et qui veulent nous tabasser ou nous renvoyer chez nous, parce que nous sommes noirs" regrette Loïc. 
Victimes du racisme dans l'Hexagone, ils ont peur que ce sentiment anti étrangers touche leur île et que des milices se créent pour se "débarrasser" des immigrés. 

Depuis l'interview, Stéphane a convaincu l'un de ses deux amis de porter plainte. Le troisième, porterait toujours les stigmates de cette agression... Des bleus au visage, mais aussi des bleus à l'âme. Il vit aujourd'hui dans la peur... Il n'a pas encore pu en parler autour de lui, à sa famille...

* Le prénom a été changé pour préserver l'anonymat du jeune homme.