Attaqués par un gang, des milliers d’Haïtiens fuient un quartier de Port-au-Prince

Des habitants fuient leurs maisons pour échapper aux affrontements entre gangs armés, dans le quartier Carrefour-Feuilles de Port-au-Prince - 15/08/2023.
Les habitants de Port-au-Prince sont toujours plongés en plein cauchemar, alors que les gangs font régner la terreur, dans la capitale haïtienne. En début de semaine, un quartier du Sud s’est vidé de ses résidants ; ils sont plus de 3000 à avoir plié bagage et à être partis, sans trop savoir où aller. Pendant ce temps, les forces internationales tergiversent toujours, pour envoyer de l’aide à la population.

À pied, à moto, ou entassés dans des voitures, des milliers d'habitants, chargés de sacs et de valises, ont fui un quartier du Sud de la capitale haïtienne Port-au-Prince, attaqué par les membres d'un gang, mardi 15 août 2023.

Nous vivons une situation extrêmement difficile. Je ne sais même pas où aller. J'ai dû fuir ma maison.

Elie Derisca, résident du quartier de Carrefour-Feuilles

Plus de 3000 femmes, hommes et enfants sans logis

Le quartier de Carrefour-Feuilles, comme beaucoup d'autres en Haïti, subit régulièrement les assauts d'un gang dirigé par Renel Destina, également connu sous le nom de « Ti Lapli » et recherché par la police fédérale américaine (FBI).

Ils ont pillé et incendié des maisons et fait plusieurs morts. Les autorités n'ont rien fait pour voler à notre secours.

Elie Derisca, résident du quartier de Carrefour-Feuilles

Selon ce témoin, des membres du gang ont pris possession de certaines habitations.

Les autorités haïtiennes ont confirmé, lundi dernier, que des maisons avaient été incendiées. Elles ont également dit avoir reçu des signalements de décès, qui n'ont pas pu être vérifiés, pour l'heure.

Au moins 3120 personnes ont fui les lieux, selon un bilan provisoire de la direction de la protection civile haïtienne. Ce chiffre pourrait continuer à grimper, selon une source proche de cette institution.

Mardi, la panique était visible, dans les rues de Carrefour-Feuilles. Certains habitants portaient leur valise sur la tête, d'autres avaient empilé trois matelas et un meuble en bois sur le toit de leur voiture. La veille, de nombreux habitants du quartier avaient manifesté contre l'insécurité et la police nationale haïtienne était intervenue pour rétablir l'ordre dans la zone.

La police nationale continuera à déployer tous ses moyens pour mettre hors d'état de nuire les bandits qui veulent semer le trouble dans les communautés.

Communiqué de la police haïtienne

Un discours qui se veut rassurant, mais qui n’a pas convaincu les résidents ; ces derniers continuent à fuir.

Le Kenya volontaire pour venir en aide à Haïti

Haïti est englué, depuis des années, dans une profonde crise économique, sécuritaire et politique, qui a renforcé l'emprise des gangs. Ces bandes armées contrôlent environ 80% de la capitale haïtienne et les crimes violents sont fréquents.

Le chef de l'ONU a réclamé le déploiement "urgent", en Haïti, d'une force multinationale de "police" et de "militaires", pour lutter contre les gangs armés dans ce pays des Caraïbes ; Antonio Guterres a écrit au Conseil de sécurité en ce sens.

Fin juillet, le Kenya a annoncé être prêt à prendre la tête de cette force multinationale et à déployer 1.000 policiers "pour aider à former et aider la police haïtienne à rétablir la normalité dans le pays et à protéger les installations stratégiques". Cette proposition nécessite toutefois un feu vert du Conseil de sécurité, même si cette force armée internationale ne serait pas dépêchée sous drapeau de l'ONU.

Après l'annonce kényane, les Etats-Unis, qui président en août le Conseil de sécurité, se sont engagés, il y a deux semaines, à dégager des ressources, sans être plus précis, et à déposer "dans un proche avenir", avec l'Equateur, une résolution d'autorisation devant le Conseil.

Antonio Guterres a salué, dans son courrier, l'initiative de Nairobi, pour cette force, dont Haïti a besoin de "manière urgente" et le soutien exprimé de plusieurs Etats des Caraïbes : Bahamas, Jamaïque, Antigua-et-Barbuda.

Nous espérons que d'autres pays vont également se manifester (...) et que le Conseil de sécurité va avancer suivant les recommandations du secrétaire général.

Farhan Haq, porte-parole adjoint secrétaire général de l’ONU