Campagne sucrière : à peine la moitié des cannes déjà broyées par Gardel

En deux mois de récolte, 183 000 des 421 000 tonnes de cannes prévues ont été coupées
En deux mois de récolte, lancée le 27 février, 43% des 421 000 tonnes de cannes prévues en Guadeloupe dite continentale pour la campagne sucrière 2020 ont été broyées par l’usine Gardel. Les conditions climatiques permettent de bons taux de sucre.
Alors que la campagne sucrière démarre tout juste à Marie-Galante, les moulins de Gardel, eux, tournent depuis déjà deux mois. Lancée le 27 février, la récolte, en Guadeloupe dite continentale, est donc à mi-parcours. La sucrerie du Moule a broyé au 26 avril près de 183 000 tonnes de cannes, soit un peu plus de 43% des quelques 421 000 tonnes prévues en début de saison. 
 

De bons taux de sucre

Hormis un épisode pluvieux avant Pâques, qui a dégradé la qualité des livraisons (présence de boue), les conditions climatiques, depuis le début de la campagne, sont favorables à la maturation de la canne, et donc à une bonne teneur en saccharose. Le taux de richesse saccharine moyen cumulé pour l’ensemble des cannes livrées depuis le 27 février est de 8,44 (%). 
Une valeur moyenne qui masque les disparités habituelles entre les bassins, puisque ce taux n’est que de 6,82 en Basse-Terre (qui compte notamment les plaines arrosées de Capesterre-Belle-Eau), alors qu’il monte à 9,19 en sud et centre Grande-Terre et à 9,61 en nord Grande-Terre (et même 9,80 sur la dernière quatorzaine, avec des pics à 12 pour certaines parcelles !). 
 

Mais peu de cannes

Ces teneurs en sucre devraient en partie compenser le faible tonnage de cette saison, similaire à la campagne 2019. Car les rendements à l’hectare sont impactés en particulier par le manque d’entretien de certaines parcelles, où l’enherbement n’est plus contrôlé, depuis le retrait de plusieurs herbicides, et un recours encore timide aux méthodes alternatives. 
Franck Buffon, le président de l’Iguacanne, l’Interprofession guadeloupéenne de la filière canne et sucre, fait le point sur l’état d’avancement de cette campagne :


« Nous avons dû mettre en place les gestes-barrière, du champ jusqu’à l’usine ».

 

Franck Buffon


Gardel ne tourne pas à plein régime

Côté industriel, la sucrerie Gardel fonctionne en-deçà de sa capacité journalière de broyage, censée atteindre 5 500 tonnes.
Franck Buffon :

A propos de l'usine...


Aide à la garantie de prix : beaucoup de planteurs pas en règle

Le prix de la canne, livrée par les planteurs aux sucreries, est composé de la part payée par l’industriel (environ 37€ par tonne, pour une canne à 9 de richesse), à laquelle s’ajoute notamment l’ « aide à la garantie de prix » (AGP), versée par l’Etat (environ 30€). 
Depuis l’an dernier, les planteurs doivent remplir des conditions d’éligibilité très strictes pour accéder à cette aide : ils doivent avoir effectué leur déclaration de surfaces (Télépac), disposer d’un numéro de SIRET agricole et être à jour de leurs cotisations sociales (Amexa). S’ils répondent à ces trois critères, ils doivent en outre, pour percevoir 100% de l’AGP, avoir déclaré leurs revenus agricoles. A défaut, l’aide est réduite (de 25% en 2019, de 50% en 2020, puis de 75% l’année suivante et 100% en 2022 !).
 

Se mettre à jour après le confinement

En 2019, les services de l’Etat avaient accordé aux agriculteurs un délai supplémentaire, jusqu’au 30 septembre, pour se mettre à jour. Afin de faciliter leurs démarches, l’Iguacanne a mis en place, dans chaque SICA cannière, un « guichet unique », regroupant les différentes administrations. Pour 2020, le mot d’ordre des pouvoirs publics était « tolérance zéro » : pas d’AGP pour ceux qui ne remplissent pas les conditions ! 

« Nous avions tout mis en oeuvre pour que tous les planteurs soient éligibles cette année à l’aide AGP, mais vu la situation sanitaire, beaucoup n’ont pas pu se rendre dans leur SICA pour régulariser leur situation… »


Les producteurs concernés avaient initialement jusqu’au 15 mars pour régulariser leur situation. Or, à cette date, plus des deux tiers des planteurs ne sont pas éligibles ou pas en mesure de toucher la totalité de l’aide. Et le confinement, imposé depuis le 17 mars, a suspendu le guichet unique. 
A la demande d’Iguacanne, et à l’approche du paiement des premières quatorzaines, le préfet a décidé, ce lundi 27 avril, de modérer les pénalités prévues. Les planteurs qui ne sont pas dans les clous percevront malgré tout au moins 50% de l’AGP, à condition d’avoir effectué leur déclaration de surface en 2019. Ils devront se mettre en règle après la fin du confinement, pour pouvoir percevoir le solde de l’aide.
Les précisions de Franck Buffon :

AGP : qui sera payé ?

Tous les planteurs toucheront au moins 50% de l'AGP, en attendant de se mettre en règle


 
Moins d’un tiers des planteurs peuvent prétendre à 100% de l’aide
Sur les 2 491 planteurs de canne qui livrent leur production aux sucreries et peuvent ainsi prétendre à l’aide à la garantie de prix cette année, 787 seulement (soit 31,6%) sont éligibles et en mesure de toucher 100% de cette subvention. Les 1 704 autres exploitants (68,4 %) sont soit inéligibles -près de 700 ne sont pas à jour de leurs cotisations sociales- soit éligibles, mais n’ont pas effectué leur déclaration de revenus 2018, et donc se voient amputer de 50% du montant.